- Politique
- Territoire Île de Ré
- Digues et PPRL
Vers une sortie de crise début 2014 ?
A la suite de son entrevue avec le Ministre de l’Ecologie, Philippe Martin, le jeudi 24 octobre au matin, obtenue in fine grâce à Ségolène Royal qu’il accompagnait, Lionel Quillet se dit très satisfait. Car au delà des communiqués de presse qui se sont succédé eu égard à la médiatisation forte des dossiers à l’ordre du jour, ce sont de vraies avancées de fond qui ont été obtenues sur plusieurs fronts. Et son aura d’ « expert-ès digues national » qui en est sortie renforcée.
Censé se limiter à 30 minutes, l’entretien a duré 1h15 et a porté sur les trois sujets majeurs que sont pour l’île de Ré et le littoral de Charente-Maritime les digues PAPI, le PPRL et les permis de construire refusés ou bloqués.
Les précédents rendez-vous avec le Directeur de Cabinet et les services, les messages passés sans relâche depuis Xynthia – auprès de Jean-Louis Borloo, Nathalie Kosciuzsko-Morizet, Delphine Batho et Philippe Martin – mais aussi le travail du Député Olivier Falorni et du Président du Conseil général Dominique Bussereau, sans oublier la forte mobilisation rétaise et la médiatisation locale et nationale ont porté leurs fruits.
Procédures simplifiées, guichet unique et déconcentré, mode projet ont été « actés » pour les digues
Les services du Ministère de l’Écologie ont aussi travaillé ces dossiers, amenant le CGED (Conseil Général de l’Environnement et du Développement Durable) à reconnaître que la lourdeur et la complexité des procédures digues constituent un vrai problème. Aussi le Ministre a-til envoyé aux Préfets concernés une instruction afin :
– que soit utilisée la procédure simplifiée pour les projets labellisés ayant un impact limité sur l’environnement : ainsi les rehaussements ou réfections d’ouvrages existants en bénéficieront ;
– d’expérimenter la déconcentration de la labellisation par les services de l’État des projets de digues, ce qui clarifiera et simplifiera le dispositif pour les porteurs locaux de projets qui auront un « guichet unique » qui sera soit à la Préfecture de Région, soit à la Préfecture de Département.
Ces mesures vont permettre d’accélérer les projets de digues prioritaires (Charron/Esnandes, ex zones noires et sur l’île de Ré Loix 1, La Flotte et Les Doreaux à St Clément) tout en respectant les exigences de sécurité des ouvrages construits et de respect de l’environnement. Le fait que ces projets n’aient pas à passer par la procédure PSR au niveau national va faire gagner 6 mois, laissant espérer le début des travaux en 2014 au lieu de 2015. Un bilan de la mise en oeuvre de cette instruction sera fait par le Ministre au début de l’année 2014, avec les services de l’État et l’ensemble des élus concernés.
Le Ministre a également souhaité renforcer le travail en « mode projet » des services de l’État pour l’instruction des projets de digues. Cette expérimentation, qui vise à réduire les délais d’instruction des projets, sera lancée d’ici la fin 2013. Les premières conclusions sont attendues pour juillet 2014.
Pour les digues de Charron, Lionel Quillet a demandé et obtenu la mise en place d’une cellule d’appui technique.
Sur ce premier volet digues, une réunion a été organisée le 31 octobre au Conseil général avec les services Mer et Digues, les bureaux d’études, la direction infrastructures pour que – en fonction des projets de digues pouvant rentrer en procédure simplifiée – un nouveau calendrier puisse être élaboré avec si possible le début des travaux fin 2014 ou début 2015. « Sur 17 projets en cours, je pense qu’on peut booster 6 ou 7 projets PAPI, dont 3 sur l’île de Ré » a précisé Lionel Quillet. Il aimerait que d’ici 2016 toutes les digues PAPI de Charente- Maritime aient été engagées.
L’ensemble des projets des digues (9 sur Ré, 20 en Charente-Maritime) représentant 135 millions d’€ de travaux, pourront enfin être déposés en Préfecture avant fin mars 2014.
Par ailleurs, Lionel Quillet a demandé au Conseil général que pour les digues hors PAPI soit repris le principe du plan triennal pour la Charente-Maritime, avec un financement qui passera de 70 % / 30 % à 50 % / 50 % répartis entre la CdC et le CG 17, soit un financement complémentaire de 3 millions d’€. Il attend les arbitrages du Service financier et du Président Dominique Bussereau.
Pour les dunes, si le Ministre comprend que certaines dunes valent digues, cela allongerait encore les délais de chercher à les intégrer maintenant, mais « dans le cadre du PAPI 2 nous amènerons une cohérence entre digues et dunes. Finissons le PAPI 1 pour 2015/2016 et trouvons pour le moment des solutions par nos propres moyens pour les dunes, financées avec l’écotaxe. »
Ironie de l’histoire, Lionel Quillet est auditionné ces jours-ci par la CMI (Commission mixte inondation qui valide les PAPI) car elle s’inquiète que les travaux n’avancent pas alors que ce sont tout de même 135 millions d’€ qui ont été labellisés en Charente- Maritime et que sur 35 PAPI seulement 2 sont mis en oeuvre !
PPRL : des propositions de Lionel Quillet
Sur le sujet PPRL, Lionel Quillet a senti une très bonne écoute du Ministre et ensuite de la Préfète de Région, Elisabeth Borne, rencontrée pour la première fois sur ces dossiers, le 30 octobre dernier, en présence de la Préfète de Département, Béatrice Abollivier.
L’un comme l’autre ont admis qu’il y avait eu surinterprétation de la circulaire. Lionel Quillet a rappelé qu’en toute logique il incombait à l’État de réaliser les études de danger, plutôt que de se contenter des fameuses « analyses forfaitaires » mais que la CdC allait se substituer à lui pour qu’un diagnostic des digues – avec 14 millions d’€ de digues tout de même réalisées depuis Xynthia – permette de prendre en compte dans le PPRL la solidité de ces digues.
Le Ministre a bien perçu que la carte des aléas naturels modélisée sans digues se superposait parfaitement à une carte « naturelle » de l’île de Ré, et que de fait les habitants ne sont pas plus en sécurité. Déjà évoqué lors des journées ANEL, le concept de « PPRL indicés » fut de nouveau mis sur la table, afin d’obtenir des modélisations plus rapides puisque dès qu’une nouvelle digue est achevée elle rentrerait dans la modélisation sans nouvelles études ou processus administratifs lourds.
Il a également fait remarquer qu’il n’y avait pas de base d’expertise nationale, que les différents bureaux d’études – avec il est vrai des cahiers des charges très différents – ne sont pas d’accord entre eux, et que les études de danger ne sont pas faites à ce stade. Que les premières cartes de niveaux d’eau ont été présentées sans qu’aucune étude de danger n’ait été faite, et qu’elles ont été immédiatement applicables.
Aussi a-t-il suggéré qu’une plateforme d’expertise nationale soit créée à La Rochelle, qui dispose de l’Université et dont le Département et la Région – sur ce sujet – travaillent de concert. Il a d’ailleurs rappelé à la Conseillère technique du Ministre que l’étude de danger ne définit pas la hauteur de sécurité – à cet égard son courrier au Ministère il y a plusieurs mois pour connaître la hauteur de sécurité n’a pas reçu de réponse – et que les digues PAPI ont été labellisées à l’aune des Analyses Coûts Bénéfices (ACB) et non de la sécurité des personnes…
Autres étapes concernant le PPRL de l’île de Ré, une réunion technique dans le cadre du comité de pilotage s’est tenue le 25 octobre en Préfecture. S’il a été reconnu que les cartes manquent de fiabilité, la CdC a reposé la question de l’intérêt de sortir des cartes d’aléas dès le 15 décembre qui ne seraient pas fiables et suggéré qu’il serait plus judicieux de sortir un peu plus tard des cartes communes et fiables.
Il a aussi été admis que la CdC ferait des études de diagnostic des ouvrages et que ces études seraient bien prises en compte dans les modélisations, et non pas des études de danger, beaucoup plus complexes et lourdes financièrement, puisqu’une étude de danger pour un tronçon de digue coûterait de 30 à 50 000 €. Il est impensable d’assumer financièrement de telles études de danger pour 66 km de digues.
Aussi Lionel Quillet a proposé que les cartes d’aléas intégrant ces études de diagnostic soient finalisées au plus tard en mars 2014, marquant ainsi « la sortie de crise ».
Des réponses seront apportées pour le 1er décembre pour les 120 permis de construire bloqués
« Last but not least » Lionel Quillet a également obtenu qu’une réponse serait apportée pour les « 120 » permis de construire, d’aménager, certificats d’urbanisme actuellement en souffrance (depuis passés à 135…) avec trois types de réponses : les sites pour lesquels les niveaux d’eau sont potentiellement trop importants et pour lesquels les réponses seront négatives, ceux où une révision des positions de l’État sont possibles et ceux qui nécessitent d’être regardés de plus près. « Début décembre, les Maires reprendront donc la main sur les instructions, une fois que je leur aurai déblayé le terrain », a précisé le Président de la CdC.
Le Président multiplie par ailleurs les réunions d’information afin de rassurer raisonnablement les acteurs du territoire : ainsi a-t-il reçu les banquiers de l’île de Ré, les associations Ré-Veille, Avenir et Réagir, avec toujours le même message : tenez encore cet hiver…
Une lourde responsabilité pour les collectivités et quelques mauvaises surprises à venir pour les propriétaires ?
Une réunion publique pour informer la population est prévue le vendredi 22 novembre, à 19 h à la Salle des Fêtes de Saint-Martin au cours de laquelle Lionel Quillet donnera très largement la parole à des intervenants externes puisque le Bureau d’études CASAJEC présentera les processus PPRL, de modélisations et de diagnostics d’ouvrages, tandis que l’expert mondialement reconnu J. Van Der Meer présentera sa vision et son approche de la défense de l’île de Ré, et qu’enfin Maître Jean-Marc Février, Avocat et conseiller auprès du CEPRI (centre européen de prévention contre les risques d’inondations) et spécialiste PPRL expliquera à qui incombent les responsabilités des digues.
« L’État nous a amenés in fine à prendre des responsabilités techniques, de réalisation, de gestion et nous risquons fort de devoir endosser les responsabilités juridiques en bout de course, ce qui peut constituer une limite à notre volontarisme sur ce dossier PPRL nous a fait remarquer Maître Février. »
Satisfaits de toutes ces avancées, les élus rétais n’en restent pas moins sur leur garde : « Si ces mises au point techniques s’avéraient insuffisantes, alors nous continuerions ce combat sur le terrain juridique » a jugé bon de préciser Lionel Quillet lors du conseil communautaire de ce 7 novembre.
« L’application de la circulaire non seulement sur-interprétée mais en plus mise en oeuvre de façon particulièrement drastique devrait être jugée par le tribunal administratif » a suggéré Anne Deniel. « Chaque Maire devra prendra ses responsabilités, nous avons fait des choix légalistes jusqu’ici, mais il existe en France des digues parfaitement fiables, plaidées par Maître Février avec des jurisprudences qui seront intéressantes comme cette route construite sur une digue, ou encore cette zone commerciale construite juste derrière une digue. À partir de janvier, les Maires pourront soit respecter les avis des services instructeurs de l’État, soit réagir comme le fait le Maire de Cap Ferret qui signe tous les permis de construire et demande ensuite l’arbitrage du juge. Les jurisprudences qui en sortiront nous seront profitables, mais attention il n’y a rien de pire pour un territoire que d’être géré par des procédures judiciaires » a mis en garde Lionel Quillet.
Enfin, bien qu’il ne soit pas revenu sur ce sujet depuis, il avait lors de son point du 28 octobre lâché une information explosive : « Les propriétaires sur l’île de Ré et partout sur le littoral risquent d’avoir encore quelques grosse surprises et je leur expliquerai notamment lors de la réunion du 22 novembre que les travaux de mise aux normes de sécurité légalement obligatoires dans le cadre du PPRL seront très certainement à leur charge et risquent d’être élevés ». C’est effectivement déjà le cas dans le cadre du PPRT (plan de prévention des risques technologiques) de La Pallice où les riverains doivent financer des travaux de mise en sécurité sur leurs deniers personnels, et où certaines associations essaient – en vain – d’obtenir que ce soit les industriels à l’origine du risque qui les financent… Cela risque fort d’être le prochain combat des associations des propriétaires et des professionnels qui n’admettront certainement pas d’avoir à financer ces travaux, à l’image de cet Internaute qui sur realahune.fr n’a pas manqué de réagir à cette information inédite : « Je tiens à faire remarquer que les dégradations des digues sont dues essentiellement au manque d’entretien depuis de longues années, avec les conséquences que nous connaissons aujourd’hui, et principalement après une forte tempête du type Xynthia. Ainsi la responsabilité des riverains/ habitants des villages n’est pas engagée et ils n’ont pas à subir financièrement les erreurs du passé ».
Lire le communiqué de presse du Ministre
Voir notre précédent article sur la question des digues et du PPRL
Lire aussi
-
Politique
Signalétique des voies cyclables, où en est-on ?
On en entend parler depuis un moment mais la situation a-t-elle changé ?
-
Politique
Département : « Tout ce qui a été voté sera fait »
Alors que la dernière séance pleinière du Conseil départemental a confirmé l’état très préoccupant des finances du Département de la Charente-Maritime, les conseillers départementaux de l’île de Ré ont tenté de rassurer, relativisant quelque peu le discours de la présidente.
-
Politique
Séance municipale animée au Bois-Plage
La pugnacité des débats n’est pas chose extraordinaire au Bois-Plage, mais il aura fallu quand même près de trois heures pour mener à terme l’ordre du jour du 25 septembre.
Je souhaite réagir à cet article