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Véronique Richez-Lerouge dénonce la stratégie de labels
Mi-enquête mi-essai, « Les labels pris en otage » dénonce, exemples et anecdotes à l’appui, les dérives des labels officiels et publics pris d’assaut par l’agro-industrie avec la caution des pouvoirs publics.
Élue locale*, femme de média et de terroir, Véronique Richez- Lerouge raconte comment et pourquoi les produits labellisés en appellation d’origine protégée (AOP), Indication géographique protégée (IGP), Label rouge, censés être aux avant-postes de la gastronomie et du goût, se vident de leur sens, ne sont plus synonymes de qualité et entretiennent des liaisons dangereuses avec des milliardaires planétaires qui jouent aux apprentis artisans. Ils se payent les dernières entreprises détentrices des savoir-faire et privatisent le terroir, sans que l’Institut national des appellations d’origine et de la qualité (INAO), n’y trouve rien à redire. Sur un ton humoristique, l’auteure passe au peigne fin les labels, bio compris, et prend des exemples dans différents secteurs, vin, fromage, beurre, salaison…
Véronique Richez-Lerouge ne donne quitus à personne. Elle explique que l’INAO censé être le gardien du temple, joue au pompier pyromane en attribuant des labels AOP et IGP dans les mêmes familles de produits et sur un même territoire, source de contentieux interminables dont les mastodontes sortent gagnants. Il ne fait pas de bien aux territoires, il les divise, et décourage les paysans.
Elle cite la colère des petits producteurs de charcuterie traditionnelle corse AOP concernant la nouvelle IGP ‘charcuterie île de beauté’, la guerre du camembert de Normandie AOP et bien d’autres exemples laitiers. Sont aussi évoqués la soumission des sauniers de l’Atlantique suite à la volonté de Bruxelles et de la France d’imposer un label bio dicté par un conglomérat d’industriels, les viticulteurs qui claquent la porte des appellations car ils veulent reprendre leur liberté.
La France, berceau des appellations d’origine, favorise l’émergence de filières labellisées à forte rentabilité, calquée sur un modèle industriel qui n’a pas sa place dans ce marché de niche.
L’auteure met en lumière la stratégie de l’État qui orchestre la concurrence entre labels, notamment dans le secteur du bio, avec l’émergence de certifications moins exigeantes comme la HVE, créant la confusion auprès des consommateurs et mettant en danger les agriculteurs engagés dans une démarche en Agriculture biologique, en contradiction avec les objectifs qu’il s’est lui-même fixés.
La journaliste alerte sur l’incapacité des filières protégées à endiguer la disparition des artisans et des fermiers, ces dépositaires légitimes des savoir-faire, avec toutes les conséquences sur la physionomie du paysage et l’effondrement de la biodiversité.
Qui sont les coupables ? Les acheteurs, les vendeurs, ou bien l’État ? Pour que les AOP, IGP, Label rouge et le label AB conservent leur effet bouclier, l’auteure propose de réformer le système et apporte des solutions de femme engagée et de terrain.
*Conseillère départementale pour le canton de l’île de Ré.
Bibliographie
Véronique Richez-Lerouge est l’auteure de plusieurs ouvrages sur les fromages, le lait cru et les labels :
– France, ton fromage fout le camp ! Michel Lafon, 2012 ;
– La Vache qui pleure, retour au lait naturel, une question de santé, Nouveau Monde, 2016 ;
– Main basse sur les fromages AOP, comment les multinationales s’emparent de nos appellations, Erick Bonnier, 2017 ;
– Le Manifeste du Bien-Manger, notre civilisation se joue dans notre assiette, Erick Bonnier, 2018.
Elle a fondé l’Association fromages de terroirs en 2001 pour la défense des fromages fermiers et a créé la Journée nationale du fromage.
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