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Un moratoire pour freiner les projets éoliens
Le Département a adopté un moratoire sur l’éolien lors de la session de printemps, fin mars. Objectif : bloquer les projets éoliens durant deux ans, le temps d’établir un schéma départemental de développement durable.
« Retrouver la pertinence et la volonté des élus de structurer leur territoire « . C’est l’argument avancé par le président du Département Dominique Bussereau et du président de l’Observatoire de l’éolien Lionel Quillet pour justifier le moratoire soumis au vote des élus lors de l’ouverture de session du département, le 18 mars. Celui-ci demande au préfet de surseoir à tous projets éoliens se présentant dans les deux ans à venir.
Pourquoi deux ans ? « Deux ans, c’est le minimum de temps nécessaire pour faire un travail sérieusement, quand on connaît la complexité des enquêtes environnementales et le nombre de gens qu’il faut interroger », dit Dominique Bussereau, qui veut se laisser le temps de prendre de nouvelles dispositions dans le cadre de l’élaboration du schéma environnemental et du développement durable du département.
Si Lionel Quillet et Dominique Bussereau comptent barrer le passage à tous projets éoliens d’ici la mise en application du schéma départemental, c’est pour « prendre le temps de décider si on veut plus d’éoliennes ou pas, et où on les met ». « On atteint un nombre d’éoliennes et de projets d’implantation qui est tout à fait inacceptable », juge Dominique Bussereau, qui estime notamment qu’avec quatre cent cinquante éoliennes sur le territoire et autant en projet (voir encadré), la Charente-Maritime a déjà bien donné sa part à l’éolien et que le reste peut donc attendre.
Des projets mercantiles
Les deux élus remettent également en cause le côté « écologique » de cette énergie dite verte. « A l’heure actuelle, on ne sait pas recycler les installations des éoliennes : les bases en béton restent à jamais en place, suintent de l’huile, tandis que mâts et pâles partent pourrir en Afrique », affirme Lionel Quillet. Face aux quelques élus demandant ironiquement aux deux édiles s’ils préféraient le nucléaire à l’éolien, Dominique Bussereau a répondu sans ciller par l’affirmative, mettant fin au débat. Et Lionel Quillet d’enfoncer le clou en renchérissant qu’aucun des choix d’implantation n’avait été jusqu’à présent motivé par des raisons écologiques : « Ce sont des implantations purement privées avec un rendement à deux chiffres. Ce n’est pas un choix en matière environnementale mais purement commercial. En Vals de Saintonge, on est bientôt à deux cents éoliennes. A ce niveau là, ça s’appelle une aire industrielle », a-t-il asséné, rappelant avec ironie que le vent ne soufflait pas plus dans le nord-est du département qu’ailleurs, alors qu’il concentre la majeure partie des installations et des projets. « Les maires n’ont même pas leur mot à dire […] Ils sont mis devant le fait accompli. Dans des conditions autres du marché public des bâtiments, on considérerait ça comme une action de justice à mener », assène Lionel Quillet, « choqué qu’il n’y ait pas de réactions de la justice en la matière ».
Dominique Bussereau et Lionel Quillet craignent notamment que cette pollution technique, visuelle et sonore pour les habitants des zones éoliennes ne finissent par les faire fuir de ces territoires.
Un mix énergétique
« Soyons clairs, nous ne sommes pas contre l’éolien », a précisé Lionel Quillet, face au tollé provoqué par plusieurs élus ne comprenant pas l’intérêt de ce moratoire et appelant à un mix énergétique, de la conseillère du canton de Marans Karine Dupraz au conseiller du canton de Saujon Pascal Ferchaud. « Nous voulons un mix énergétique basé sur un schéma […] incluant la méthanisation, le solaire, la géothermie, l’hydrolien », a voulu rassurer Lionel Quillet, regrettant l’absence d’un tel schéma régional depuis la disparition de l’entité Poitou-Charentes : « Le schéma de développement durable concernera tous les secteurs, de la mobilité à l’aménagement urbain en passant par la transition écologique ». Après un débat enflammé de l’assemblée sur les problématiques environnementales, la motion a emporté l’adhésion de la majorité, malgré huit abstentions et dix votes contre.
Le refus de la préfecture
Restant droit dans ses bottes, le secrétaire général de la préfecture Pierre-Emmanuel Portheret a fait savoir que les services de l’Etat ne soutiendraient pas cette motion. Motif principal : « L’implantation des éoliennes étant du ressort de l’Etat, un soutien de ses services à un tel moratoire serait considéré par les élus qui tentent de faire émerger des projets éoliens comme l’expression d’un retrait du soutien du Gouvernement à l’éolien terrestre et risquerait de provoquer de l’étonnement », a expliqué à mots choisis le représentant du préfet à Dominique Bussereau, avant de rappeler que d’un point de vue juridique, un moratoire départemental ne valait pas un kopeck face à un tribunal administratif. Il a en revanche invité
le Département à répondre à un appel à projet « éolien et territoire », en cours de préparation au ministère de l’écologie, en vue « d’accompagner les collectivités prêtes à s’investir dans une démarche d’aménagement conciliant développement de l’éolien et prise en compte du paysage ». Profitant du débat sur l’éolien, le secrétaire général de la préfecture en a profité pour revenir sur le projet de parc éolien le long de la Gironde, qui cristallise tous les griefs. « EDF a lancé une concertation avec les garants du débat public et se dit prêt à faire évoluer le projet au vu de la concertation », a-t-il expliqué, invitant le Département à un nouveau dialogue avec EDF. « Concernant l’estuaire, je vous le dis tout de suite, il ne s’agira même
pas de rentrer dans la concertation ! », a balayé du revers de la main Dominique Bussereau, qui refuse toute négociation ayant pour but de « détruire l’estuaire de la Gironde ». L’édile a également prévenu qu’il ferait fi de l’absence de soutien de l’Etat à sa motion : « Le Département, via l’Observatoire de l’éolien, continuera de poser des recours sur certains projets qui n’auraient pas l’assentiment des élus locaux ou qui seraient jugés nuisibles pour l’environnement […] J’en ai le pouvoir par les responsabilités que [les services de l’Etat] m’ont confiées ».
ALD
Les autres décisions du Département
• Pont de Ré. Suite à la rupture d’un câble de précontrainte du viaduc et face aux nécessités impérieuses de diagnostic et de réparation dans les plus brefs délais et dans des conditions
de sécurité garanties, le Département a choisi de retenir l’entreprise Freyssinet parmi trois propositions. Le montant du marché négocié s’élève à 2 805 864,89 € HT.
• Aide aux petites communes. La Couardesur-Mer et Rivedoux Plage font partie d’un fonds de revitalisation pour une enveloppe totale de 769 319,95 €.
• Sport et handicap. Le Département a attribué au Comité départemental de sport adapté une subvention de 3 500 € pour l’organisation de challenges dans divers disciplines : bowling, pétanque, judo, tennis de table et rugby.
EN CHIFFRES
L’éolien en Charente-Maritime :
• 26 parcs ont reçu une autorisation d’exploiter (148 mâts) pour 345 MGWatt, dont :
– 15 parcs en activité (181 mats)
– 11 parcs (67 mats) non construits
• 19 dossiers en cours d’instruction (112 mâts) pour 375 MGWatt, dont :
– 12 mâts dans le canton de Surgères
– 11 mâts dans le canton de Matha
Soit 719 MGW de prévisions si l’ensemble des projets devait aboutir.
• 30 éoliennes dans l’estuaire de la Gironde, un projet encore non déposé mais dont la préfecture a connaissance.
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