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- Naufrage du paquebot Afrique
Un drame historique à quelques milles des côtes rétaises
Peu de temps après la grande guerre, le paquebot mixte Afrique de la ligne maritime des chargeurs réunis, construit en 1907 aux chantiers anglais Sawn Hunter et Wigam Richarson de Newcastle, appareillait à destination du Sénégal le 9 janvier 1920 vers 19 heures du quai des Chartrons à Bordeaux.
À son bord : une cargaison de cinq cents tonnes de « divers », colis postaux, produits manufacturés, champagne… et 602 passagers comprenant les membres de l’équipage, dont 264 personnes réparties dans les différentes classes de cabines qui rejoignaient les colonies africaines pour reprendre leur affaires, les administrations, leur travail, 17 missionnaires et religieuses, 192 tirailleurs sénégalais de l’armée coloniale et 28 militaires non africains, qui rentraient également au pays. Tous reprenaient espoir après des années de souffrances.
Un navire à la pointe de la technologie de l’époque
Le paquebot mixte Afrique, long de 120 m et large de 15 m, avait un tirant d’eau de 6,50 m. Il transportait passagers et marchandises sur la ligne Bordeaux – Dakar à la vitesse de croisière de 13 noeuds, propulsé par deux machines à vapeur à triple expansion développant 7 200 chevaux, qui entraînaient deux hélices. Six chaudières cylindriques fournissaient la vapeur pour les machines et les auxiliaires. Cloisonné en quatorze compartiments étanches, le navire présentait des conditions de sécurité optimum, contrôlées par le bureau Véritas. Pour leurrer la surveillance allemande pendant toute la première guerre mondiale et transporter sans encombre les troupes coloniales et le matériel nécessaires à la guerre de tranchée, une de ses cheminées était peinte en jaune pour qu’il soit confondu avec les navires belges qui rapatriaient les soldats allemands.
Des avaries et du gros temps
Le 9 janvier 1920, l’Afrique appareille de Bordeaux, descend la Garonne jusqu’à l’estuaire de la Gironde en connaissant de nombreuses pannes et incidents, alors qu’il sort de maintenance. Il fait de l’eau par une fi ssure dans la coque, depuis son départ. Il aurait heurté une épave.
Le 10 janvier, il aborde la pleine mer vers 10 h. L’eau s’engouffre dans la cale de la chaufferie. Malgré le courage et l’intervention de l’équipage les machines tomberont successivement en panne. Le paquebot ne répond plus aux commandes de son équipage. La nuit tombe et la mer se creuse. L’eau dans les chaufferies n’a pas pu être pompée et a même un peu augmenté. C’est un désastre. Dehors le vent devient de plus en plus fort, la tempête guette. Le navire est à ce moment à 70 milles sud-ouest de la Coubre, le plateau de Rochebonne est sous le vent à environ 55 milles dans le Nord. Les tentatives, décidées par le commandant Le Dû, pour remettre le navire sur la route de La Pallice s’avèreront périlleuses et vaines. La tempête s’est transformée en ouragan. Malgré toutes ses difficultés l’Afrique tient le cap entre le nord-ouest du compas et le nord, il ne gouverne plus travers au vent. Les passagers sont tous malades du mal de mer. Seulement quelques-uns ont dû se rendre compte de la catastrophe qui était en cours en écoutant les conversations de l’équipage et les allers retours des mécaniciens pompant l’eau.
Le 11 janvier à sept heures du matin, Antoine le Dû, commandant de l’Afrique demande du secours par radio. Deux remorqueurs de la Marine nationale basés à Rochefort, le Cèdre et le Victoire, plus remorqueurs de port que de mer, se préparent à appareiller pour secourir l’Afrique. Toutes les communications avec les navires « sauveteurs » et la terre sont en Morse. Le Ceylan, cargo postal parti de Bordeaux le 10 janvier pour l’Amérique du sud va se manifester vers 8h30 et se déroute pour porter assistance à l’Afrique.
À 14 h, mauvaise nouvelle, le commandant de l’Afrique apprend que les deux remorqueurs Cèdre et Victoire, n’ont pas pu dépasser l’île d’Aix à cause du mauvais temps. Vers 15h30 le Ceylan arrive sur zone et propose à l’Afrique de le remorquer, mais le commandant Le Dû lui répond qu’il est impossible d’exécuter cette opération avec une seul machine en état de marche, et lui demande juste de l’escorter. Le bateau-feu du plateau de Rochebonne est alors à une vingtaine de milles.
Vers 18 h la dernière machine en marche (machine bâbord) ralentit et stoppe par manque de pression. Le Ceylan a dû s’éloigner de l’Afrique pour prévenir un abordage et éviter de heurter les hauts fonds de Rochebonne de plein fouet. Sans électricité, devenu invisible, l’Afrique dérive à environ 7 à 8 milles du bateau-feu de Rochebonne. Tout en continuant de monter, l’eau a envahi toutes les machines et la chaufferie, sauf les compartiments isolés par des cloisons étanches. L’Afrique dérive lentement vers le bateau-feu (bouée automatique) de Rochebonne.
Soudain à 22 h le bateau heurte plusieurs fois le bateau-feu par tribord devant et par le travers de la cale N° 2, durant 7 à 8 minutes, occasionnant une forte voie d’eau dans les aménagements des 3e classes. Fermeture des portes étanches de ces différents compartiments pour évacuer les passagers et le personnel, l’opération est terminée à 23h30 environ.
À quelques milles entre l’île de Ré et les Sables d’Olonne, le navire, maintenant incontrôlable, dérive dangereusement au milieu de la tempête.
À minuit, le commandant fait mettre les canots de sauvetage à la mer. Certains passagers sont projetés à la mer avec les hommes d’équipage. Malades et apeurés par la hauteur des vagues, les passagers n’embarqueront pas dans les baleinières en nombre insuffi sant et resteront sur le paquebot en perdition pour prier avec les missionnaires et Monseigneur Jalabert. Les éléments sont déchaînés et l’équipage embarque à grands risques dans les chaloupes et les radeaux avec un passager qui les suivra, et qui survivra.
Je sombre !
« Je sombre !… Suis exactement entre les roches des Barges, le banc de Rochebonne et les Baleines à la pointe de l’île de Ré » émet l’Afrique par radio à 3 h du matin, avant de se disloquer par gros temps sur les rochers et sombrer, aux abords nord-est du plateau de Rochebonne à moins de 23 milles (42 km) des Sables-d’Olonne. Fidèle à la tradition et aux passagers, son commandant était resté à bord.
Occultée par la grande guerre et l’élection présidentielle la même année, oubliée de tous, cette catastrophe ne fera que 34 survivants sur les 602 passagers. Aux Sables d’Olonne, près du mémorial aux disparus en mer, près du Fort St-Nicolas, il existe une plaque commémorative qui rappelle la plus grande catastrophe maritime française.
Seule marque de souvenir : un timbre à l’effigie de l’Afrique, créé en 1990 par la Côte d’Ivoire.
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