« Trouver un juste équilibre entre le National et le Local »
Tout juste deux ans après son élection, Ré à la Hune a rencontré Olivier Falorni, Député La Rochelle-île de Ré pour évoquer avec lui le contexte national, son approche de sa fonction, ainsi que les grands dossiers qui lui tiennent à coeur.
Ré à la Hune : Comment réagissez-vous aux résultats des récentes élections Européennes et comment vous positionnez vous eu égard au contexte politique national ?
Olivier Falorni : L’Europe a été la grande absente des débats électoraux et n’a pas mobilisé les Français, les partis politiques n’ont pas su donner un sens à cette élection. Il s’agit à mes yeux d’un raté démocratique, l’Europe déçoit, elle est trop technocratique, trop éloignée, trop tatillonne, pas assez démocratique. On reproche à la Commission de décider et aux États de s’incliner, mais ce n’est pas tout à fait vrai, il s’agit là d’un mauvais procès fait à l’Europe. Elle ne répond pas à un double objectif social et fiscal, le dumping entre pays européens est préjudiciable et nécessiterait une harmonisation des législations. L’élargissement de l’Europe aux Pays de l’Est l’a fortement affaiblie, l’espace communautaire est devenu une menace et non plus une protection. Le mode de scrutin et le découpage des circonscriptions, beaucoup trop étendues, font que les Français ne perçoivent pas l’importance des enjeux européens, peu impliquants pour eux. Au plan national, j’ai le sentiment que les deux premières années du Mandat de François Hollande ont été en partie gâchées par quelques mauvais choix et un manque de lisibilité et je ne sais si la pente pourra être remontée… Je soutiens le Gouvernement de Manuel Valls, arrivé avec un projet clair autour de trois politiques identifiées et ciblées sur la compétitivité des Entreprises, le surendettement de l’État et le problème de l’emploi. Aujourd’hui on n’est plus dans la posture politicienne, la situation de la France est tellement grave que personne ne peut souhaiter l’échec du Gouvernement et j’espère que celui-ci réussira, sinon je crains qu’en 2017 on connaisse un nouveau « 21 avril ». Le « Pacte de Compétitivité » me semble une bonne chose et j’apprécie le Gouvernement de Manuel Valls qui a cassé les tabous de l’endettement – on ne peut plus vivre à crédit – et de la compétitivité des Entreprises, vieux tabou de la Gauche. Il faut faciliter la vie des TPE, la suppression des seuils y concoure.
Deux ans après et avec donc un peu de recul, comment appréhendez- vous votre fonction de Député ?
Dans mon appréhension du mandat de député, j’ai toujours en tête mon double rôle d’élu national à Paris et d’élu local dans ma circonscription. Le député est un « facilitateur de projet » et sa force réside dans son ancrage territorial, je ne veux surtout pas faire partie de ces députés « législateurs » scotchés à l’Assemblée Nationale car le risque d’enfermement est fort. Quand on étudie les textes, on a vite le sentiment d’être coupé de la réalité et on ne perçoit pas toujours leurs conséquences. C’est pourquoi si je suis trois jours par semaine à Paris, je consacre les quatre autres jours à ma circonscription ; je reçois beaucoup d’acteurs du territoire à ma permanence et vais à leur rencontre sur le terrain. Les textes sont souvent conçus avec de très bonnes intentions, mais n’intègrent pas toujours la réalité du terrain, tels les lois sur l’économie sociale et solidaire, sur le logement ou encore la réforme des rythmes scolaires… À mes yeux il y a trois types de députés : ceux qui sont de purs législateurs, très peu présents sur leur circonscription, les élus qu’on ne voit jamais à l’Assemblée du fait du cumul de leurs mandats, et enfin ceux qui exercent à plein temps leur fonction de député avec un juste équilibre entre le national et le local. Par ailleurs, je dois travailler avec tous les Maires, quelle que soit leur sensibilité politique et j’entretiens des relations de confiance avec tous. Étant en contact chaque semaine avec les Ministres, et en connaissant bien un certain nombre, je peux leur remonter les problématiques de terrain. Enfin, ma forte présence locale est étayée par la permanence parlementaire – où un grand nombre de Rochelais et Rétais viennent me rencontrer – et le travail de trois collaborateurs à plein temps. Mon prédécesseur, Maxime Bono, n’avait pas de permanence physique.
Quels sont les dossiers sur lesquels votre intervention a été déterminante ?
Le premier dossier sur lequel j’ai beaucoup travaillé, avec la Préfète, est celui du Commissariat de La Rochelle, situé place de Verdun, qui est dans un état désastreux et pour lequel il était urgent de prévoir le déménagement. En coordination avec Manuel Valls, le projet de nouveau commissariat à la caserne Mangin a bien avancé – ce sera le seul nouveau commissariat en France – et la première pierre sera posée avant la fin de l’été 2014 pour une livraison fin 2015 ou début 2016. Sur le très grand espace de la caserne, le lotissement des Cordeliers accueillera des logements privés et des logements sociaux. La vente du terrain de l’ancien commissariat suscite les appétits vu son emplacement, elle permettra de financer une partie de l’opération. Sur un autre sujet qui me tient à coeur, l’accessibilité de la Gare de La Rochelle, j’ai rencontré Guillaume Pepy, président de la SNCF, Jacques Rapoport, président de RFF et Frédéric Cuvellier, Ministre des transports. Cette gare qui accueille deux millions de voyageurs par an est inaccessible aux personnes à mobilité réduite, ce qui n’est pas admissible. Or RFF est tenu d’assurer l’accessibilité aux trains dans les grandes gares. Je les ai aussi entretenus du dossier connexe du Pont de Tasdon, qui est dans un état déplorable et dont des morceaux tombent sur les voies SNCF. Évidemment la révision du PPRL de l’île de Ré est un gros dossier sur lequel je suis intervenu en appui aux élus locaux pour appuyer les solutions proposées et faire pression auprès des autorités nationales. La pression a payé, la position de l’État s’est assouplie. Je suis aussi intervenu avec succès sur le maintien du chef-lieu de canton de l’île de Ré à Saint-Martin, contre le choix initial de Sainte-Marie dans la réforme.
Quels sont les projets de lois sur lesquels vous vous êtes plus particulièrement investi ?
Le travail parlementaire concerne à la fois les projets de loi initiés par le Gouvernement et les propositions de lois émanant des parlementaires. Il existe des « niches parlementaires », soit un jour par mois, pour les propositions de loi des groupes parlementaires. Enfin, le travail sur l’amendement des lois déjà existantes est une part non négligeable. Dans le cadre du texte sur la réforme territoriale je suis consterné par la nouvelle carte proposée. Je suis totalement favorable à une refonte territoriale, face au millefeuille territorial coûteux et inefficace mais je pense que les départements ne doivent pas disparaître, même si les Conseils généraux constituent une instance de trop, il faut donner plus de lisibilité sur les compétences, car aux yeux des citoyens il y a confusion sur le rôle de chacun et tout le monde fait tout. Pour les Régions, il ne s’agit pas de faire un découpage géographique au scalpel, mais de leur donner un poids financier et économique qu’elles n’ont pas face aux lands allemands, par exemple. Nos Régions sont des nains en termes financiers, il faut les fortifier au niveau de leur budget et de leurs compétences. Mais la réforme a été faite à la hussarde et je suis favorable à des référendums sur des sujets aussi importants. Il faut, dans le découpage envisagé, s’appuyer sur les identités historiques et géographiques et sur l’âme des habitants. Quand ceux-ci ne s’approprient pas un territoire, il n’y a plus d’espace collectif partagé et la communauté se délite. Or il est évident que la Charente-Maritime est avant tout le nord du Sud-Ouest et que notre ancrage naturel est du côté Aquitaine, tout comme à mon sens les Deux-Sèvres et la Vienne devraient être regroupés avec l’Aquitaine. Ce sont des logiques politiciennes qui ont prévalu et je le regrette.
Quelles sont les propositions de lois de votre groupe parlementaire que vous défendrez ?
La proposition de loi sur la fin de vie déposée par le groupe 2RDP (Radicaux républicains démocrates progressistes), qui comprend 16 PRG et quatre autres élus, n’est pas encore mise en lecture car il s’agit d’un engagement de campagne de François Hollande : sa proposition 21 promettait l’assistance médicalisée au décès pour terminer sa vie dans la dignité. Cette promesse engage aujourd’hui le Président et son Gouvernement et je considère que tout renoncement en la matière serait pour notre société un véritable reniement. J’ai d’ailleurs interpellé le Premier Ministre dans le cadre des questions d’actualité au Gouvernement et je ne lâcherai pas là-dessus. Une autre proposition de loi déposée concerne la question de la laïcité, suite à l’affaire Baby Loup. La crèche est le premier lieu d’éducation et la laïcité doit commencer au plus jeune âge et s’applique à tout le monde, elle protège les croyants, quelle que soit leur religion et évite les stigmatisations.
Comment percevez-vous le positionnement de l’île de Ré par rapport au reste de votre circonscription, rochelais, et quelle est votre position sur l’écotaxe payée à l’entrée du Pont et sur le développement du Grand Port Maritime juste en face de ce territoire protégé ?
L’île de Ré constitue une opportunité pour notre circonscription, dont les deux parties ont des spécificités mais aussi des intérêts communs. Je suis favorable à l’écotaxe et la gratuité du Pont n’est pas envisageable, il faut développer tous les moyens d’accès alternatifs à la voiture. Je suis favorable au maintien du tarif actuel du Pont. Il faut réfléchir à la modulation de l’écotaxe en hiver, afin par exemple de favoriser l’accès des Rochelais en basse saison. Mais l’écotaxe contribue largement à la préservation de l’île de Ré. Le Grand Port Maritime constitue un atout important pour le territoire, la lutte en faveur de la croissance et la création d’emploi. Toutefois son mode de développement doit être changé, il doit passer par des industries d’avenir, non polluantes, à forte valeur ajoutée.
Selon quels critères affectez-vous votre réserve parlementaire ?
Je dispose d’une réserve de 130 000 €, la règle est que les aides – affectées à des associations ou communes – ne sont pas renouvelables sur un même mandat. Mes choix vont sur les projets concrets qui s’inscrivent dans la solidarité et je répartis équitablement entre la partie rochelaise et la partie rétaise de ma circonscription, chacune regroupant 10 communes. Ainsi en 2014, côté communes, j’ai attribué des subventions à la restauration de l’Hôtel de Ville de La Rochelle, à la construction d’une salle associative municipale à Saint-Clément des Baleines et à la rénovation de la cour du groupe scolaire de Sainte-Marie de Ré. Côté associations, mes choix se sont portés sur Cercle Handi Rochelais, Enfance et Partage 17, Unicef 17, K d’urgence (aide aux familles monoparentales), le comité 17 de prévention routière, Pousse de Bambou (aide à l’adoption), le Secours Populaire 17 et SOS Amitié 17. En 2013, sur l’île de Ré ma réserve parlementaire avait été affectée aux communes d’Ars, de Loix et de Rivedoux et aux associations Ré Clé Ré, SNSM et Restos du Coeur, ainsi qu’à île de Ré Radiodiffusion. Les sollicitations sont nombreuses et les choix forcément difficiles, nous échangeons avec mes trois collaborateurs avant d’arrêter chaque année les subventions.
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