- Politique
- Territoire Île de Ré
- Révision du plan de prévention des risques littoraux
Un travail concerté avec le Ministère de l’Écologie conduit à l’abandon de la méthode forfaitaire sur Ré
De nouveaux défis à réaliser pour l’île de Ré
Après la longue interview du Président de la CdC publiée dans notre précédent numéro, Ré à la Hune revient sur la révision du PPRL, la loi Gemapi et la loi ALUR/Duflot qui ont toutes des conséquences importantes en termes de protection et d‘aménagement du territoire. Une nouvelle interview de Lionel Quillet, un point presse au Conseil général et son intervention devant les adhérents de l’APSL (Association de protection des sites de Loix) samedi 19 juillet, ont permis de préciser les choses et clarifier certains points, sur ces sujets complexes.
Le PPRL n’est pas un projet normalement porté par les collectivités territoriales mais par l’État. La forte implication de la CdC de l’île de Ré témoigne d’une volonté politique déterminée pour défendre le territoire. Nos élus ont bien conscience que l’île de Ré est un territoire submersible, à risque, et leur problématique est de défendre les populations et la vie permanente dans les périmètres existants, non pas de construire des « digues immobilières », le repli des populations n’étant pas envisageable sur un territoire insulaire.
Rappelons que depuis le porter à connaissance auprès des élus de la carte de l’État en 2012, l’île de Ré est dans une période transitoire, en attente de la carte d’aléas. Pendant cette période transitoire, la Préfecture de Charente-Maritime a pris le parti d’instruire les permis de construire en appliquant un principe de précaution maximum, et en prenant comme référence une « carte pédagogique » résultant d’une faillibilité totale des digues. Au-delà de cette position « dogmatique », la Préfecture de Charente-Maritime a clairement « fait du zèle », puisque sur à l’origine 157 permis bloqués, 140 le sont toujours actuellement (17 seulement réexaminés par la DDTM se sont transformés en avis positifs) : 53 sont certes bloqués sur des terrains submergés par Xynthia, mais 87 permis le sont sur des terrains non submergés par Xynthia. Dans tous les cas, la Préfecture n’a pas tenu compte des 30 millions d’€ de travaux de protection réalisés et nombre de permis concernent des garages, plateforme technique, aménagements « mineurs ».
« L’État a validé notre méthode, non la carte, évolutive »
Les élus rétais ont fortement contesté la méthode forfaitaire, certes inscrite dans la circulaire, cette dernière ouvrant toutefois la voie à d’autres possibilités. Le Ministre de l’Écologie Philippe Martin et son directeur de cabinet Francis Rol-Tanguy ont donné leur feu vert à la CdC rétaise pour étudier de façon beaucoup plus sérieuse et fi ne la faillibilité des digues. Un grand pas de plus a été franchi avec l’arrivée de la nouvelle Ministre, Ségolène Royal, et sa directrice de cabinet, Elisabeth Borne, qui ont validé la méthodologie des cabinets d’études CASAGEC / Van der Meer au service de la CdC et ont confirmé dans un courrier adressé au Président Lionel Quillet qu’à partir de maintenant les ouvrages seront pris en compte dans la modélisation. Le ministère n’a pas à ce stade validé de cartes, celles-ci évoluant sans cesse, mais bien la méthode. Une digue peut être bréchée, submergée, mais cela se calcule et se modélise… Même si la circulaire n’a pas de fondement juridique et serait facilement contestable devant le Conseil d’État, d’après des spécialistes, l’île de Ré a préféré passer par la discussion avec l’État…
La part du territoire de l’île de Ré urbanisé submersible passe de 40 % à 26 %
Ainsi, à partir du 1er octobre, la CdC – qui à cette date prend la compétence – instruira les permis sur la base de la carte d’aléas qui aura entre temps fait l’objet de nombreux aller-retours entre les experts CdC et DGPR. Contester aujourd’hui au plan technique des cartes qui ne sont pas encore finalisées – et évolueront au fil des réalisations des travaux de digues – n’est pas le sujet… La CdC a déjà recruté deux personnes de haut niveau et la directrice de service arrivera en septembre. Ce sont près de 350 permis qui attendent cette instruction avec impatience, avec les 140 permis bloqués et les environ 200 permis qui n’ont pas été déposés vue la situation de blocage. La CdC instruira sur la base de sa carte PPRL, déclinée au niveau parcellaire.
Dès le 1er octobre seront priorisés les permis très simples à débloquer et ceux d’intérêt économique majeur, afin d’apporter rapidement une réponse aux professionnels. Rappelons qu’au délai maximum d’instruction de 3 mois il faut ajouter 2 mois pour les recours des tiers et le contrôle de la légalité par les services de l’État. Soit 5 mois maximum, tout sera fait par la CdC pour aller vite. Sachant que Patrick Rayton, élu référent à la CdC et Lionel Quillet seront « très sévères » dans leur instruction au regard des obligations légales d’urbanisme mais aussi des risques de submersion et que la délivrance des permis de construire est du seul pouvoir du maire. Il ne s’agit pas d’une victoire de la CdC sur le Ministère, mais bien d’un travail concerté rendu possible par la grande ouverture dont ont fait preuve la nouvelle Ministre Ségolène Royal, sa directrice de cabinet, Elisabeth Borne et la DGPR, avec bon sens et pragmatisme. Lionel Quillet le dit volontiers : « Nous avons une Ministre de l’Écologie qui est une grande Ministre, costaud. Quand elle prend une décision, elle l’applique. On peut l’aimer ou non, le sujet n’est pas là, on ne peut contester sa détermination et son poids politique ». Il ne tarit pas non plus d’éloges sur Elisabeth Borne, « polytechnicienne très intelligente et qui sait s’adapter aux problématiques de territoires ». « Ce n’est de toute façon pas l’île de Ré qui a gagné, mais une vision politique pragmatique et forte et la concertation État/ territoire ». Par ailleurs, il est intéressant de noter que Ségolène Royal a présenté le 10 juillet dernier sa « Stratégie nationale de gestion des risques d’inondation », dont l’un des objectifs majeurs est de rendre les territoires moins vulnérables au risque inondation. « Ne plus subir, mais anticiper et s’organiser est le maître mot de cette Stratégie » car « en France, 1 habitant sur 4 et 1 emploi sur 3 sont exposés à ce risque ».
L’île de Ré est montée au créneau très en amont et fortement, là où d’autres territoires – limitrophes ou non – validaient les cartes de niveaux d’eau de l’État et se retrouvent aujourd’hui en gestion de crise, avec de nombreux blocages, le « cas par cas » ne donnant évidemment pas satisfaction. Les Juges vont prendre le relais dans bien des cas. L’île de Ré a justement voulu éviter que son territoire soit géré au gré des jurisprudences…
Planning des travaux de digues sur l’île de Ré
2014
> Digue du Boutillon
2015
> Les Doreaux sur 1,6 km à Saint-Clément
> Porte du Port à La Flotte
> Loix Est
2017
> Corniche et centre-bourg de Rivedoux
> Site de Montamer à Sainte-Marie
> Parapet ou porte sur le Port de Saint-Martin
> La Couarde
> Ars et Les Portes, plus difficiles à défendre avec le Fier
Les nouvelles emprises de submersion
Avec les modélisations de la CdC, les surfaces submersibles se rétractent de façon sensible puisque pour l’île de Ré dans son ensemble on passe de 40 % à 26 % du territoire urbanisé submersible, ces 26 % comprenant les petites hauteurs d’eau n’empêchant pas la constructibilité mais avec certaines contraintes.
Ars : 53 % à 38 %
La Couarde : 91 % à 62 %
La Flotte : on arrive à 4 %
Les Portes : 79 % à moins de 50 % (dont 30 % ont moins de 50 cm d’eau)
Loix : 29 % à 23 %
Rivedoux : 15 % à 9 %
Saint-Clément : 76 % à 27 %, c’est la commune qui bénéficie le plus de la nouvelle modélisation
Saint-Martin : 8 % à 5 %
Droits de mitigation
Après l’application du PPRL, les propriétaires ou locataires des propriétés situées en zone submersible devront réaliser à leurs frais, à hauteur de 10 % de la valeur de leur propriété, des travaux de mise en sécurité. L’État pourra contrôler leur bonne réalisation, mais de toutes façons les assureurs les exigeront.
Voir l’article consacré au désengagement de l’Etat en matière de risques naturels (île de Ré – Charente-Maritime)
Voir l’enjeu de la densification de l’île de Ré (loi Alur-Duflot)
Lire aussi
-
Politique
Signalétique des voies cyclables, où en est-on ?
On en entend parler depuis un moment mais la situation a-t-elle changé ?
-
Politique
Département : « Tout ce qui a été voté sera fait »
Alors que la dernière séance pleinière du Conseil départemental a confirmé l’état très préoccupant des finances du Département de la Charente-Maritime, les conseillers départementaux de l’île de Ré ont tenté de rassurer, relativisant quelque peu le discours de la présidente.
-
Politique
Séance municipale animée au Bois-Plage
La pugnacité des débats n’est pas chose extraordinaire au Bois-Plage, mais il aura fallu quand même près de trois heures pour mener à terme l’ordre du jour du 25 septembre.
Je souhaite réagir à cet article