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Sylvie Marcilly, en tête à tête
Un bel après-midi de septembre, la présidente du Département a accueilli Ré à la Hune, détendue et avec le sourire, dans son grand bureau lumineux. Elle est la première femme à la tête du Conseil départemental de Charente-Maritime. Les femmes restent trop rares en politique, dans le monde économique et dans les médias. Une complicité féminine s’est installée naturellement dès le début de cette interview…
Ré à la Hune : Beaucoup de Rétais et Charentais-Maritimes ne vous connaissent pas ou très peu, pouvez-vous nous parler de vous ?
Sylvie Marcilly : Nous sommes arrivés en Charente-Maritime avec Jean-François Marcilly, mon ex-mari, en 1995, nous avions acheté un bateau Fountaine-Pajot et nous voulions quitter la région Parisienne. Il a vendu son officine, nous avons suivi une formation de galénique-cosmétique et avons recherché des bureaux sur l’Agglomération rochelaise, sans succès. On a mis le cap sur le sud et avons trouvé des locaux à Fouras où nous avons installé nos Entreprises. Nous nous entendons toujours bien et travaillons en partenariat, Jean- François gère la partie cosmétique avec les Laboratoires Cosmalia qui fabriquent, entre autres, pour le laboratoire AquaScent que je dirige, accompagnée d’une commerciale. Nous faisons un chiffre d’affaires avoisinant les 400 K€, je trouve cela pas mal du tout !
« Être et rester Chef d’Entreprise m’ancre dans la réalité »
Vous continuez à gérer votre Entreprise, à côté de vos nouvelles et importantes responsabilités ?
Oui, je me suis organisée pour cela, j’aime ce monde de l’Entreprise qui me permet de garder un pied dans la réalité économique. Nous avons accusé de plein fouet la flambée des prix des matières premières, il a fallu négocier avec les fournisseurs, il faut sans cesse inventer de nouveaux produits, signer des contrats avec les clients, situés en France et partout en Europe et même aux USA. Cela est motivant ! Il ne faut pas oublier que je suis diplômée du Cycle des Hautes Etudes pour le Développement Economique et de l’Institut des Hautes Études Économiques, après avoir suivi des études de Langues…
Vos enfants sont désormais autonomes, trouvez-vous un peu de temps pour pratiquer vos sports favoris ?
J’ai quatre filles âgées de 31, 30, 21 et 19 ans, Juliette, la plus jeune, est encore étudiante à La Rochelle, sa soeur finit ses études d’ingénieur en logistique à Paris, nos deux aînées sont dans la vie active. J’arrive encore à faire du vélo tôt le matin, ou bien le soir et j’ai une passion pour la course automobile, l’été je pratique aussi le paddle.
Comment êtes-vous arrivée à la politique et quel est votre parcours ?
Jean-François était maire en Région Parisienne. Peu de temps après notre arrivée à Fouras, le maire de l’époque qui cherchait son successeur est venu le voir. Cela ne l’intéressait pas, mais moi oui ! J’ai été battue aux élections de 2001 à 40 voix près dans une triangulaire, j’ai refusé une alliance avec le Front National. J’ai donc siégé 7 ans dans l’opposition, avant d’être élue maire de Fouras au 1er tour en 2008. En 2010, j’étais en 2ème position sur la liste de Dominique Bussereau aux élections régionales face à Ségolène Royal, puis je suis partie en 2011 aux élections cantonales sur le canton de Rochefort- Nord, que j’ai gagnées face à André Bonnin. J’ai été réélue aux municipales de 2014 au 1er tour, puis je me suis présentée aux élections départementales sur le nouveau canton de Châtelaillon avec Stéphane Villain, nous les avons remportées au 1er tour. En 2017, j’ai échoué aux élections législatives sur la 2ème circonscription de Charente-Maritime, face à Frédérique Tuffnell et finalement heureusement ! En 2020 j’ai été réélue à Fouras au 1er tour des municipales, puis vous connaissez la suite, notre victoire avec Stéphane Villain aux élections départementales de juin 2021 et mon élection à la présidence du Département, où je succède à Dominique Bussereau.
« Depuis septembre, je suis en permanence sur le terrain »
Quel a été votre premier constat ou votre premier étonnement en arrivant à la tête du Département ?
Je suis arrivée juste au moment des périodes de vacances pour les Services, qui avaient besoin de souffler. Je connaissais déjà bien la « Maison », j’ai été vice-présidente en charge des affaires économiques, avec des attributions aussi à l’international. Ce qui m’a le plus étonnée est la grande qualité des Services du Département, qui est une petite collectivité, leur capacité à réagir après le Covid et à s’adapter à des situations compliquées. Il y a vraiment une bonne dynamique au service de la Charente-Maritime, au plus près des réalités.
Depuis septembre je suis en permanence sur le terrain, je visite tous les services du Département, ainsi que les délégations territoriales Ré, Aunis, Rochefort ; je suis récemment allée sur un chantier routier de nuit, de sécurisation d’un site, les agents sont très professionnels. Je suis fière de la qualité de nos services.
Quelle est votre vision pour la Charente-Maritime, quelles sont vos priorités ?
L’aide sociale est la première des priorités, le Département accompagne les familles, depuis la planification familiale avant la naissance, puis la PMI, le handicap, l’Aide Sociale à l’Enfance, le logement, la Maison départementale des personnes handicapées (MDPH), l’Allocation personnalisée d’autonomie (APA), pour les personnes âgées… tout au long de le vie le Département est là pour soutenir les personnes en difficulté.
Loïc Girard est premier vice-président en charge des finances, c’est vers lui que convergent tous les aspects financiers, Chantal Guimberteau s’occupe des Ressources Humaines et nous avons introduit une nouveauté importante, l’Evaluation des politiques publiques, mise en place très rapidement et qui a pour objectif de se remettre en question en permanence, pour coller aux réalités et aux besoins du terrain. Il y a aussi dans cette fonction un volet de benchmarking, de veille sur les politiques et dispositifs mis en place par les autres Départements de France. Nous voulons développer des dispositifs innovants, nous renouveler, adapter notre politique publique.
« L’aide sociale à l’enfance est un sujet qui m’interpelle particulièrement »
Avez-vous des sujets de préoccupation plus spécifiques ?
Je porte une attention particulière à deux secteurs qui m’ont interpellée : l’aide sociale à l’enfance et la volonté de travailler avec la justice en amont pour prévenir les situations irréversibles. On voit que la mise en place ce matin (mercredi 23 septembre 2021, date de cette interview – NDLR) par le Gouvernement d’un numéro d’appel pour les victimes d’inceste répond à un vrai besoin, les politiques publiques doivent trouver des réponses pour éviter que ne soient ainsi détruites des vies entières.
Un autre de mes sujets de préoccupation spécifique concerne la qualité et la gestion de l’eau, sous la compétence de Françoise de Roffignac. L’eau en général est une préoccupation majeure de la planète pour les années à venir. La qualité des eaux maritimes, des eaux de baignade, de l’eau de consommation, sa gestion, son approvisionnement, l’irrigation agricole et la nécessité d’économiser la ressource en eau, constituent des enjeux importants.
La jeunesse constitue aussi un sujet d’attention particulière, avec deux vice-présidents : Caroline Aloé, en charge de l’éducation et des collèges – Patrice Raffarin s’occupe de l’enseignement supérieur -, et Alexandre Grenot, en charge de la jeunesse et de la citoyenneté. Nous voulons mettre en phase le plan jeunesse et les modes de vie des jeunes, favoriser la citoyenneté des jeunes, à travers des activités adaptées.
En matière d’environnement, le Schéma de Développement Durable (SDD) a été présenté aux élus en toute fin du mandat de Dominique Bussereau, quel sort lui réservez-vous ?
Il s’agit d’un travail à remettre en permanence sur le métier, toutes nos actions seront pensées à l’aune du développement durable. Par exemple les pistes cyclables, facteur d’attractivité touristique de la Charente- Maritime, doivent aussi être mises au service d’une mobilité douce, pour les habitants. Nous voulons travailler sur le volet environnemental des projets avec les Maires. Par exemple, quand on entreprend des chantiers de voirie, on peut penser à des trottoirs drainants, il faut désimperméabiliser nos sols, planter une végétation drainante qui absorbe les hydrocarbures au bord des routes…
Le SDD doit être en parfaite adéquation avec notre vision du développement durable et de la protection de l’environnement. Le document actuel est bien fait, nous devons l’alimenter et l’enrichir, il ne sera jamais achevé.
Nous travaillons en partenariat avec l’IFREMER sur la recherche de matériel ostréicole bio-sourcé, les coquilles d’huîtres concassées peuvent être utilisées dans le revêtement des routes, avec une moindre réflection de l’intensité lumineuse. Nous sommes à l’écoute des innovations issues des recherches universitaires, des travaux du laboratoire du Littoral Urbain Durable Intelligent (LUDI)…
Le pont de Ré est payant, celui d’Oléron est gratuit, quelles sont vos volontés en matière de droit départemental de passage sur ces ponts ?
Le débat pour le DDP sur le pont d’Oléron est fermé pour les élus oléronais. Cap Oléron 2021 a permis de belles réalisations, notamment en matière de mobilité douce. Les priorités sont évaluées par le Département et les élus du territoire.
Pour le Pont de l’île de Ré, le tarif préférentiel en hiver favorise les entrées sur l’île, la politique de mobilité doit permettre de limiter l’usage de la voiture. La passerelle qui ira du Belvédère au pied du pont est en cours de réalisation. Les travaux sur les câbles sont programmés (lire encadré).
« La Loi 3DS donnera plus d’autonomie aux Départements »
Quelle place souhaitez-vous accorder à la politique culturelle du Département ?
Notre volonté culturelle reste la même, le Département fait entrer la culture au collège, avec notamment le prix collèges de la filière audiovisuelle, les programmations des médiathèques dans les écoles. Les Sites en Scène sont de très bonne qualité, nous voulons bien sûr les maintenir et nous soutiendrons les projets culturels des collectivités locales.
Quel rôle le Département entend jouer dans le débat sur le projet de parcs éoliens Sud- Atlantique, qui agite fortement les Charentais-Maritimes ?
L’avis du Département n’est pas requis, ce qui n’empêche pas que nous portions une attention particulière au projet et écoutions les élus locaux. Il y a quelques années, tout le monde était pour l’éolien, pas mal de projets se sont développés et leurs nuisances sont apparues, notamment pour ce qui concerne leurs impacts sur la qualité de vie. Je suis en train de m’intéresser à la question à titre personnel. L’évolution du mix énergétique se fera, au détriment des énergies fossiles, mais où et dans quelle envergure, c’est toute la question.
J’ai échangé avec les Services de la Préfecture. La Loi 3DS*, en cours d’élaboration, permettra de donner plus d’autonomie aux collectivités locales dans plusieurs domaines.
*Projet de loi « relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique »
Pont de Ré
Point sur les travaux sur les câbles
Il est prévu :
– Le sciage, en vue de sa rupture, d’un câble situé au début du viaduc 1 côté Île de Ré. Cette opération nécessitant la coupure de la circulation sera réalisée soit juste avant les vacances de la Toussaint soit juste après et le câble sera remis en service au plus tard en décembre 2021. Comme à l’habitude, Ré à la Hune publiera un post sur sa page Facebook dès connaissance de la date d’interruption du trafic.
– Le remplacement après détente lente des deux câbles (l’un en raison de sa corrosion, l’autre à titre préventif) assurant la jonction entre les viaducs 1 et 2 à l’hiver et au printemps 2022.
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