Pour sensibiliser le public à la réalité carcérale

Dans le cadre de la 23ème édition des JNP, le groupe local de concertation prison* de La Rochelle organisait une projection débat autour du thème « vivre enfermé ».

La salle de la Médiathèque était comble mardi 22 novembre pour assister à la projection du « corps incarcéré », un web-documentaire de Soren Seelow construit sur le témoignage de quatre anciens détenus.

Comment perçoit-on le corps, l’espace et le temps lorsqu’on est prisonnier ? Quels sont les effets de l’enfermement sur l’esprit des personnes détenues ? Ce sont à ces questions qu’ont tenté de répondre une surveillante, un chef de détention, un membre de l’équipe de direction, Corine Rondel, cadre et praticien hospitalier Santé mentale, et Christophe de La Condamine, ancien détenu, lors du débat qui suivait le visionnage du film. Chaque année, cette soirée est l’occasion pour les bénévoles des associations qui agissent en milieu carcéral (aumôniers, visiteurs de prison ou encore à l’accueil des familles) d’aller à l’encontre des à priori sur le milieu pénitentiaire. Une nécessaire mise en lumière au regard du paradigme sécuritaire ambiant, qui prône le durcissement des conditions de détention et la construction de cellules supplémentaires en réponse au malaise d’une société. Car la problématique carcérale est plus large que le sujet de la surpopulation, certes majeur ; il touche le champ d’une réflexion à mener sur la punition par l’enfermement ou ses alternatives.

Favoriser la réinsertion pour lutter contre la récidive

Une justice qui reconstruit passe t-elle forcément par la prison ? « Il faut sortir de la logique du « tout carcéral », d’autant qu’on sait qu’elle favorise la récidive » affirme haut et fort Denise Piau, membre de l’Association Nationale des Visiteurs de Prison (ANVP) et visiteuse à la caserne de Saint-Martin depuis neuf ans.

Elle, qui accompagne chaque semaine trois condamnés à de longues peines, fait partie de ceux qui pensent que la prison française doit assumer en plus de sa mission de détention (qui vise à mettre hors du circuit social les condamnés), une mission de réinsertion.

Se pose la question des outils permettant la mise en place de processus de réhabilitation (bracelets électroniques, travaux d’intérêt général, quartiers de semi-liberté où le détenu travaille à l’extérieur et dort en prison, etc.).

Une récente expérience en Espagne visant à responsabiliser des détenus au travers d’ateliers, traduit un climat apaisé, une propreté améliorée et une meilleure réinsertion grâce aux activités.

Comme le dit encore Denise : « Une prison qui répare plutôt que d’isoler serait un indicateur d’une société sereine », mais ça, c’est en utopie… Quoique… En Finlande les chercheurs ont commencé à examiner l’efficacité de la punition sur la réduction de la criminalité (les prisons ouvertes existent depuis les années trente dans les pays scandinaves). Conclusion : l’enfermement a une efficacité nulle !

La prison ne serait-elle pas l’aboutissement d’un système en faillite ?

* Le groupe local de concertation prison regroupe les associations : ACAT, ANVP, Aumôneries 17, Croix Rouge, LDH, LR-Aunis, Secours Catholique, SOS Amitié, Synapse.

Quelques chiffres :

– Population détenue 68 300 pour 54 000 places.

– Surpopulation en Maisons d’arrêt : 139 %.

– Environ 100 000 peines prononcées non exécutées.

– De 2002 à 2012 : 29 lois pénitentiaires.

– Budget prison 2,5 milliards.

– Récidives sans aménagement de peine : 63%, après une liberté conditionnelle : 39%.