Rhétais ou Rétais ? Vous avez dit « réforme de l’orthographe » ?
On pourrait écrire, comme le grammairien Vaugelas qui, au moment de mourir, disait « Je m’en vais ou je m’en vas : l’un ou l’autre se dit ou se disent » ! Le « h » apparaît ici inutile, puisqu’il est inaudible et ne change rien à la prononciation. Comme les « h » aspirés. Et, chacun le sait, la consommation de « hasch » est prohibée (avec un « h » ici bien utile). Alors à la hache le « h » ? Comme l’accent circonflexe, victime d’un attentat orthographiste en ce début d’année ! Imaginez « coût » sans « ^ » : cout ! Corolle moins un, on devrait dire une de ses « l » : corole…
Mais d’où vient, à quoi sert le « h » de Rhétais repris par nombre d’enseignes de l’île ?
La question est débattue (jusque sur wikipedia). Selon certains, il n’est pas d’origine. Ce serait une pédanterie graphique de poètes en mal de légendes attribuant à la déesse Rhéa la protection de l’île. Les érudits répondent que les Latins nommaient l’île Insula ratis… l’île des fougères… A tout prendre, qui ne préférerait la légende à la vérité ? Comme dit le proverbe italien : si non e vero, e bene trovato ! Si ce n’est pas vrai, c’est bien trouvé ! Mais si c’était bien la déesse Rhea qui avait donné son nom à l’île ? En supprimant le « h », c’est l’Histoire, avec un grand « H », qu’on oblitérerait d’un trait de gomme ! Et n’est-ce pas joli ? Sinon, la graphie, du moins légende ! A moins qu’il n’y ait que jalousie. Alors rien n’empêche les adversaires du « h » de s’inventer une légende ! Pourquoi ne pas y voir l’île du Dieu Soleil, Ra ou Ré chez les Égyptiens ? Si non e vero… D’ailleurs, l’île fut aussi supposée, par d’autres, tenir son nom de « Isle du Roy », lequel fut, au temps de Vauban, le Roi Soleil ! CQFD, non ? Les utilitaristes, cruciverbistes, peuvent se rassurer : le mot est valide au scrabble (source : 1mot.fr). Et les musicologues pourront se réjouir de la communion avec rhapsodie, qui peut s’écrire aussi rapsodie !
Questions oiseuses ? L’orthographe est tout sauf anodine. Vouloir guillotiner les mots, n’est-ce pas aussi priver un peuple de son Histoire et de ses légendes ? Les particularités de l’orthographe et de la grammaire sont les traces aimables de l’Histoire. Alors, « h » ou pas « h » ? Que s’applique la formule de Saint Augustin : « Dans les choses nécessaires : l’unité ; dans les choses douteuses : la liberté. En toutes choses : la charité » ! Sans oublier l’humour. Une des marques de fabrique de « Ré à la (H)Une » !
Jean-Baptiste Le Proux
D’ailleurs, de l’humour les lecteurs de Ré à la Hune n’en manquent pas : à preuve, cette missive-missile reçue par la rédaction :
« Bonjour madame, monsieur, je profite toujours de la trêve hivernale pour lire ou relire les quelques numéros de « Ré à la Hune » glanés ici ou là pendant l’été et qui n’avaient été, alors, parcourus qu’en « diagonale ». Occasion, bien sûr, de mieux apprécier la qualité des analyses proposées (vertu plutôt rare chez les « gratuits » ! [Merci, Note de la rédaction] ) mais aussi, hélas, de déplorer en tant que président honoraire des UMPS (Unanimes Maniaques du Passé Simple) la façon cavalière dont ce malheureux temps – fâcheusement tombé en désuétude – est traité dans vos colonnes.
Ainsi, douloureuse surprise de voir confondues ici et là (et régulièrement!) les désinences des verbes conjuguées à la 3e personne du passé simple avec celles de l’imparfait du subjonctif ; y compris, comble de l’horreur, dans un article « littéraire » ,par ailleurs de fort bonne facture (à propos du roman « Evariste », No 125 du 18/8/2015). On y trouve à trois reprises- ce qui exclut , sans doute, l’explication du lapsus- « mourût » au lieu de « mourut ». Impardonnable même si l’auteure aurait pu invoquer l’interférence d’ une réminiscence cornélienne : le fameux « Qu’il mourût! » du vieil Horace… (mais là c’était bien le subjonctif qui était requis!). Ajoutons que, pour faire bonne mesure , on y relève aussi un « ...qui fût son dernier jour » du plus mauvais aloi. Effet de contagion peut-être : la même bourde se retrouve pages 3 et 14 du même numéro : « Ce fût le cas de… » ; « son stand fût très fréquenté…; le dépôt de gerbes fût suivi… »
Mais le plus navrant pour les quelques ringards de mon espèce, soucieux de conserver la richesse de la langue, c’est l’ostracisme dont est victime notre malheureux passé simple qui se voit préférer, de plus en plus souvent (et à tort!), un imparfait « standard »ravalé au rang de « preterit » à tout faire.
Illustration éclatante – si on ose dire – l’article évoquant le « retour triomphal de l’Hermione « ( No 126); développement haut en couleur (et bien conduit dans l’ensemble ! ) essentiellement narratif qui se prêtait donc à l’emploi constant de ce temps du récit par excellence : le passé simple (actions ponctuelles se succédant dans le temps). Au lieu de quoi on nous accable d’un empilement fastidieux d’imparfaits « passe-partout », la plupart du temps inappropriés.
Ainsi : « L’entrée de l’Hermione…. était saluée.... » au lieu de « …fut saluée… »…des milliers de triple « Hourra ! » s’élevaient spontanément… » à la place de » s’élevèrent » ; « …les chants de marins…étaient entendus » plutôt que » furent entendus » ( variante possible « ont été entendus » au p.composé) ; idem : » …faisaient le bonheur » pour « firent le bonheur » ; « le défilé était ouvert » préféré à « le défilé fut ouvert » ; de même : « …participaient au défilé » (« participèrent » ou « ont participé ») ; « les personnalités prenaient place » (prirent place). On peut faire le même procès aux utilisations tout aussi contestables qui suivent : « le défilé traversait… » ; « la place Colbert dansait… » ; « qui se terminait tard dans la nuit » ; » très vite il devenait difficile »…
Bien sûr, on peut toujours opposer telle ou telle phrase d’un prestigieux manuel d’Histoire : « Ce 2 décembre 1805, Napoléon lançait, dans la plaine d’Austerlitz, ses troupes à l’assaut..« Ici l’emploi de l’imparfait pour exprimer un événement unique et précisément daté, est dit « expressif » ; il souligne ainsi l’ampleur exceptionnelle de l’événement rapporté.Mais, justement, pour demeurer « expressif » son emploi doit rester exceptionnel et ne pas être galvaudé ! Par exemple, à propos de l’Hermione, on aurait (peut-être!) pu écrire « A l’instant même elle saluait la statue de la Liberté, la réplique de la frégate de La Fayette entrait dans la légende… » (pas moins… mais pas plus ! ).
Plus modestement, il vaudrait mieux s’en tenir aux règles simples du « bon usage » que nous inculquèrent nos maître du CM2 : l’imparfait est le temps de la description (un état des choses qui dure et se prolonge dans le passé) ou celui des actions passées mais habituelles et répétitives.
On objectera que le p. simple est banni des écoles de journalisme (à tort bien entendu) et qu’on se sent plus ou moins ridicule d’écrire » « nous mangeâmes » ou « vous allâtes » (au passage, c’est là que doivent se trouver les accents circonflexes et pas ailleurs…). Que n’emploie-t-on alors le passé composé qui en est le quasi-équivalent, ou la variante « littéraire » qui allège le propos et en simplifie l’écriture : » le présent de narration » ??
Un petit « dernier » pour la route ( même article): « qui égratigna » plutôt qu »égratina »( le correcteur annexé à Word ne semble pas d’accord!) et le soutien de la foule fut total (et non « totale »).
Ah! j’allais oublier… une règle peu connue mais qui gagnerait à l’être davantage » tout » au sens de « tout à fait », »complètement » dans » tout entière » ( édito du no 125 et p.17 du no 126) est adv. et donc invariable). L’accord ne se fait que devant un adj ; au féminin commençant par une consonne ou un « h » aspiré : « Mais n’te promène donc pas toute nue » … « la vigne toute hachée par la grêle » (Consolation : Hugo et Camus ont commis la même faute!!) »
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