Résidence Seniors des Gollandières : un dossier controversé
Il est des lieux emblématiques. Celui-ci en était un pour le Bois-Plage. Si feu l’hôtel des Gollandières a laissé place à un vaste chantier, le projet en cours soulève toujours des questions. Auxquelles nous allons modestement tenter de répondre
A deux pas de la plage, ressemblant plus à une vaste demeure privée qu’à un hôtel, il a fait le bonheur de générations de vacanciers et nul n’imaginait sans doute le voir un jour disparaître. Jusqu’à la rentrée 2018. Depuis, le projet en cours alimente les conversations boitaises. Du côté des Gollandières, il flotte un parfum d’amertume et d’incompréhension coléreuse. Comment a-t-on pu en arriver là, à l’émergence annoncée d’une construction de telle ampleur, même avec pour objectif (louable) le logement de personnes âgées ?
Absence d’information préalable
Appartenant à un propriétaire privé, l’hôtel des Gollandières pouvait bien sûr être vendu librement. Mais force est de constater que nulle information n’a filtré et que nulle présentation du projet n’a été faite par la Municipalité. C’est donc par l’affichage du permis de construire que les riverains apprennent la nouvelle, suivie simultanément d’un courrier les invitant à une réunion d’information. En lieu et place de l’hôtel Gollandières, s’élèvera à l’horizon 2022 une Résidence Seniors, exploitée et gérée par Les Jardins d’Arcadie, appartenant au groupe immobilier Acapace.
Le permis de construire a été signé le 20 août 2018 et précisons que la transaction était soumise à une condition suspensive concernant son obtention. Reste le temps du recours des tiers de deux mois. Fin du premier acte. Et début des contestations.
Concertation réussie
L’affaire n’ira pas très loin, une concertation ayant été rapidement lancée avec les riverains immédiats. Interrogé, François George, Président du Groupe Acapace répond sans détours : « Nous n’avions pas envie de problématiques de refus de permis de construire. Nous avons choisi d’être pacificateurs. Les interrogations ont été réglées rapidement, par des aménagements ».
En effet, dès le 15 octobre 2018, deux des acteurs du projet, Atao (promoteur maître d’oeuvre) et Open Partners (société d’investissement immobilier) confirment par un communiqué la nature des modifications, notamment la suppression d’étages prévus le long de l’avenue des Gollandières. Un permis de construire rectificatif est déposé. Le projet définitif sera ensuite présenté au printemps 2019 et effectif en juin. Une perte de temps qui conduira le propriétaire de l’hôtel à rempiler pour une ultime saison. Puis la démolition est programmée et réalisée.
En 2020 interviennent les élections municipales, la crise sanitaire, le confinement, la saison estivale et enfin l’automne. Du côté des Gollandières, rien ne bouge. Enfin pas tout à fait. Sur le vaste terrain désert rôde l’ombre des questions restées sans réponse.
Gérard Juin interpellé
Par une lettre ouverte également diffusée aux médias locaux, Odile Rojarre – Présidente de l’ADRM (Association de Défense de la Raise Maritaise), devenue par modification de ses statuts le 19 août 2020, ARMG (Association des Riverains de la Raise Maritaise et des Gollandières) – s’adresse au maire du Bois-Plage, Gérard Juin. Elle y évoque la taille « disproportionnée » du projet (6 000m² de bâti contre 1 750 auparavant), la problématique du stationnement, les préjudices liés aux travaux et un accord « secret » entre les parties concernées par la concertation ci-dessus évoquée, à savoir la Municipalité, le promoteur et quelques riverains, demande au nouvel élu sa position, un « audit du projet », une « négociation avec le promoteur » et la lumière sur ce fameux accord.
Lors d’un entretien, Odile Rojarre argumente, ne comprenant pas très bien qu’un tel dossier ait pu passer les mailles d’un filet revendiqué serré pour protéger le territoire. « Jusqu’où ira-t-on dans l’urbanisation du Bois- Plage et de l’Ile de Ré ? », expliquet- elle. Et quid de cette « maison de santé » dont l’intégration a favorisé l’obtention de la mention « d’intérêt collectif », permettant lui-même certaines dérogations au PLUi, et dont elle craint qu’elle ne s’avère « qu’une coquille vide » ? Quid également de cet accord par lequel l’ancien Maire Jean-Pierre Gaillard « a engagé la commune » ? Mme Rojarre et les habitants du quartier des Gollandières ont de nombreuses questions et autant de craintes de voir leur quartier et sa douceur de vivre mis à mal par une opération immobilière vertueusement habillée.
« On subit un dossier »
Direction la Mairie du Bois-Plage. Quelques semaines ont passé, Gérard Juin ayant préféré nous rencontrer après son rendez-vous avec le Président des Jardins d’Arcadie. Un « entretien d’explication », précise-t-il.
Gérard Juin est clair : ce dossier il l’a « reçu en héritage ». « On a vendu à la municipalité un projet de résidence seniors avec services » explique l’élu. D’où l’intérêt collectif. Que sait-il de cette fameuse structure de services médicaux ? Toujours pas grand-chose, « le dossier est en construction » du côté des Jardins d’Arcadie. Si M. le Maire évoque une vérification scrupuleuse du permis de construire, il reconnaît n’avoir qu’une marge très réduite voire nulle sur le bâti.
Reste l’environnement naturel sur lequel il peut espérer travailler mais aussi la question épineuse du stationnement sur une zone déjà lourdement chargée en saison. Quant à l’accord avec les riverains, il existe bien mais n’a rien de « secret » pour l’élu, qui nous confirme par ailleurs que L’ARMG et sa Présidente Odile Rojarre ont reçu réponse à leur lettre ouverte.
Finalement, M. le Maire a les mains aujourd’hui liées mais il assure que l’équipe municipale sera « d’une grande vigilance ». D’ailleurs il a déjà fait réaliser par un huissier un constat de l’état de la voirie en amont des travaux de déblaiement alors en cours et précédant l’ouverture réelle du chantier. Un plan de circulation volontairement diffus a été mis en place et les travaux seront interrompus le temps de la saison touristique. Pour le reste, la Municipalité ne pourra éventuellement intervenir qu’une fois le chantier en phase d’achèvement. Autant que faire se peut.
Ventes ET Locations
Pour tenter d’éclaircir les points restés vagues, ne restait plus qu’à interroger directement le Président M. François Georges, un entretien téléphonique obtenu sans réserve en ce début décembre.
Aucune équivoque : le permis de construire est définitif et purgé de tous recours. Sur la totalité des 99 appartements prévus, « 93 sont déjà vendus et 6 en cours de régularisation ». Voilà déjà qui est éclairant. Il s’agit bien d’une opération immobilière à destination d’investisseurs, sur des biens mis ensuite en location et gérés par Les Jardins d’Arcadie. « On construit ce qu’on gère et on gère ce qu’on construit » précise M. Georges.
Oui, mais alors quelles garanties qu’il n’y ait pas de changement d’usage, transformant des logements pour personnes âgées en locations de vacances déguisées ? M. Georges explique : « il s’agit d’une Résidence Seniors de seconde génération. Des investisseurs achètent et louent à un exploitant unique à loyers fixes, celui-ci trouvant ensuite des résidents locataires ». Quelle différence par rapport aux résidences de première génération ? « Les acquéreurs étaient les personnes âgées, ce qui laissait ouvert le risque de changement d’usage » poursuit le Président des Jardins d’Arcadie. Présentement, les investisseurs ne peuvent pas récupérer leurs biens pendant 20 ans. La phase locative démarrera 6 mois environ avant l’achèvement de la résidence.
Le stationnement toujours flou
Côté stationnement, le projet prévoit 36 places en sous-sol et 4 en extérieur. Trop peu évidemment au regard du nombre d’appartements, sans compter le personnel. La résidence devant accueillir des personnes âgées « autonomes et semi-autonomes », nous soulignons la grande probabilité qu’ils soient propriétaires de voitures. « Très peu », répond M. Georges, prenant pour exemple une autre réalisation des Jardins d’Arcadie au Grau-du-Roi dans le Gard, dans laquelle plus de la moitié des résidents n’ont pas de voitures.
Et M. Georges de préciser qu’une navette sera mise à leur disposition pour faire leurs courses. Quid des visiteurs, enfants, petits-enfants qui pourraient venir justement en juillet et août ? A défaut d’être convaincant, M. Georges se veut rassurant. Sans vraiment répondre à cette question.
Prestations de santé à prévoir
M. Georges le précise d’emblée : pas de personnel soignant au sein de la résidence, chargée de fournir des services à la personne telle l’aide à la toilette et l’accompagnement au quotidien. Une salle de restaurant est également prévue. Et un local de 90 m² aux fins de prestations de santé sera bien intégré à l’ensemble. Des professionnels (médecins, kiné etc.), a priori du Bois-Plage, pourront venir y donner consultations et soins. Au même titre que des coiffeurs dans un salon de la résidence dédié à cet effet.
Mais tout cela sera organisé a posteriori et les professionnels du Bois sollicités. Côté équipements et agencements, M. Georges entend travailler en collaboration avec la Mairie. Un salarié à temps plein étant également prévu pour six résidents, le projet sera générateur d’emplois locaux, « sous réserve de trouver les compétences requises » souligne M. Georges.
Questions diverses
A celle posée sur l’environnement naturel et la préservation des plantations, M. Georges assure son Groupe engagé dans une politique RSE (Responsabilité Sociétale des entreprises) forte induisant le respect de l’environnement, du coefficient pleine terre à hauteur de 41% (40% réglementaires), la bonne intégration du bâti dans le paysage naturel, la conservation de certains éléments du paysage antérieur ainsi que de nombreuses plantations. Là encore, il faudra attendre pour voir, un point sensible qui retiendra sans doute l’attention particulière de la Municipalité et des Boitais.
Les travaux ont désormais débuté pour une livraison au 4ème semestre 2022, « sans trop de retard » suite à la crise sanitaire et malgré la « problématique interruption des travaux pendant la saison estivale ». Mais M. Georges semble décidé à jouer le jeu. Que conclure de l’ensemble de ce dossier sensible ? Sous des dehors parfaitement fondés (loger des personnes âgées) et par ailleurs jamais contestés, son déroulement et sa mise en oeuvre ne traduisent-ils pas un certain malaise, soulevant une fois de plus la question de la pression foncière exercée sur un territoire à haute rentabilité, souvent évoquée par le Président de la CdC Lionel Quillet lui-même ?
Le destin du site des Gollandières semble tracé. Et sans doute peut-on considérer comme légitimes les nombreux doutes que le dossier soulève par manque d’information préalable et de transparence qui auraient pu, à tout le moins, éviter le sentiment de trahison qui plane aujourd’hui au-dessus des Gollandières.
Lire aussi
-
Social
Les Essentielles sénior
-
Social
Un bateau pour Ré : ça tangue
C’est devant un parterre d’élus locaux et de membres de l’association « Un bateau pour Ré » que s’est tenue mardi 5 novembre l’Assemblée Générale annuelle, Salle Vauban à Saint-Martin-de-Ré.
-
Social
Les Petits Drôles : une nouvelle directrice pour la rentrée
La crèche associative à gestion parentale de Sainte-Marie de Ré accueillait à la rentrée sa nouvelle directrice, Aurore Thibaut. Une présentation officielle a été faite aux élus mi-octobre, dans une volonté de communication transparente avec les partenaires de cette crèche historique sur le territoire rétais, fondée en 1987.
Je souhaite réagir à cet article