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Renard roux, sur la piste du goupil
Caché parmi les nuances de vert que lui offre la forêt, le plus rusé de tous les prédateurs de l’île de Ré est invisible, jusqu’à ce qu’il daigne montrer sa fourrure rousse. Voici ma rencontre avec l’insaisissable renard roux rétais.
Face à face inattendu avec le goupil
Nous sommes le 8 juin à 10h du matin. Je suis en vadrouille dans les bois à la recherche d’une colonie d’aigrettes garzettes nichant en forêt durant leur période de reproduction. Sachant qu’elles se trouvent sur les plus hauts pins, je dois marcher une bonne demi-heure avant de les atteindre. La lumière matinale est bonne et j’entends déjà les cris des va et viens incessants des parents venus nourrir leurs poussins de poissons. Alors que je m’enfonce dans un lieu de plus en plus impénétrable où les ronces foisonnent, j’aperçois enfin des feuilles recouvertes de fientes blanches au sol; le signe que la colonie est juste au-dessus à quelques mètres. J’enfile mon filet de camouflage pour éviter d’être repéré et aucun oiseau ne remarque ma présence.
Le feuillage crée un beau contraste de lumière autour de moi, dans une forêt où seuls les bruits de la nature sont perceptibles. Alors que je m’avance prudemment, j’observe le sol couvert de restes de poissons et de quelques poussins morts tombés au sol; une bonne affaire pour les charognards. Je commence quelques clichés des jeunes aigrettes se dorant au soleil puis je m’assois tranquillement sans qu’il n’y ait le moindre être humain aux alentours.
Soudain, un petit bruit dans les buissons. Certainement une crotte tombant à terre, mais ce bruit ne cesse de me titiller les oreilles. Pas de doute, c’est surement un animal qui approche. Je me tourne pensant voir un lapin, et la… c’est le choc !
A seulement quelques mètres de moi s’avance le mammifère le plus insaisissable de l’île de Ré : Vulpes vulpes alias le Renard Roux. Mon sang se glace car jamais je n’aurais imaginé croiser un jour le regard de ce merveilleux animal sur l’île et encore moins d’aussi près. Recroquevillé dans mon filet, je sors mon appareil et commence quelques prises de vue de quelques secondes. Le renard est un jeune adolescent ayant quitté le terrier depuis un moment déjà et cherchant sûrement de la nourriture : une jeune aigrette tombée du nid ou des restes de poissons certainement. Le jeune goupil finit par remarquer ma présence et contre toute attente s’avance prudemment pour me renifler. Il est maintenant à trois mètres seulement, le renard me regarde comme s’il demandait à être apprivoisé; je suis certainement le premier humain qu’il voit. Deux secondes après arrive la mère de ce jeune; elle sait ce que je suis et pousse un frémissent d’alerte. Ni une ni deux le jeune renard court rejoindre sa mère et disparaît. Je venais alors à peine de me remettre de cette rencontre incroyable avec mes premiers renards et il me tardait de recommencer.
Le renard roux dans l’île
Le renard roux est un mammifère carnivore de la famille des canidés au même titre que les chiens. Reconnaissable à son pelage roux orangé et à son ventre et museau blancs, il est présent dans une grande partie de l’île de Ré et a su coloniser tous les types de milieux. Que ce soit en forêt, dans les marais ou même les dunes, le renard apprécie tous les endroits du moment qu’il y a à manger. C’est dans les prairies du bocage qu’il est le plus abondant. Des traces sur les plages prouvent qu’il s’y rend pour manger ce que rejette la mer et il n’est pas rare non plus de le croiser en ville le soir car il aime y chercher des rongeurs.
A la fin de l’hiver, débute la période de reproduction où le mâle chante afin d’attirer une possible compagne. Le couple s’installe dans un terrier appelé « renardière » souvent en tuant le lapin qui y réside. La femelle met au monde entre trois et sept renardeaux qui au bout de six mois peuvent sortir du terrier pour jouer. Ils ont également un appétit d’ogre et les parents effectuent des allers-et-retours sans arrêt pour les ravitailler en proies. Ils apprennent rapidement à chasser et restent avec leur mère jusqu’à l’automne où ils deviennent autonomes.
Le renard se nourrit surtout de lapins sur l’île. L’abondance de ceux-ci représente un atout majeur pour leur survie, d’autant qu’il peut en trouver n’importe où de jour comme de nuit. Il chasse aussi campagnols, faisans, rongeurs, oeufs et poussins et pêche même du poisson parfois. A noter que même les fruits et champignons peuvent compléter son menu.
Il est fort probable que les renards rétais soient arrivés via le pont de Ré et que plusieurs couples se soient établis par la suite. Autrefois très peu nombreux, leur population est en nette augmentation avec plusieurs dizaines d’individus dans toute l’île. Malheureusement le goupil continu d’être persécuté et tué. La cause principale est qu’il est considéré comme un nuisible s’attaquant aux poulaillers. Pourtant avec l’abondance de lapins, les attaques sur les volailles sont très rares. La chasse sportive et les meutes de chiens de chasse qui les traquent sans relâche sont leur plus grande menace. Certains chasseurs et agriculteurs n’hésitant pas à dénicher les renardeaux dans leur tanière pour les exécuter. D’autres préfèrent pratiquer les empoisonnements sur des cadavres de poules, tuant ainsi parents et condamnant les petits au printemps. Cette pratique peut aussi s’avérer fatale aux rapaces. Enfin, la mortalité sur les routes est importante. Toutes ces menaces font que le renard est un animal très discret et donc très difficile à observer. Aujourd’hui, il est plus que jamais nécessaire de protéger notre prédateur roux préféré au risque de voir la population de lapins grimper en flèche et provoquer un déséquilibre écologique important.
Mathieu Latour
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