Régulation des meublés de tourisme : quels impacts ?
Elle a fait la Une tout l’automne. La régulation des meublés de tourisme est lancée et des voix dissonantes s’expriment.

Enregistrement, changement d’usage, quotas… à l’instar d’autres régions françaises, les pouvoirs publics insulaires se sont emparés de ce dossier épineux avec un objectif clair : enrayer un système jusqu’alors en roue libre. Voilà pour le côté face et il ne viendrait à personne l’idée de contester la démarche. Mais côté pile, d’autres arguments se font entendre, venant en toute logique de la part d’acteurs particulièrement concernés.
Trop vite, trop fort ?
« Une réglementation est bienvenue face au marché parallèle qui s’est développé à un échelon quasi industriel », reconnaît Alexandre Druet, gérant d’Artémis Location, agence spécialisée dans la location saisonnière et la gestion de biens. Professionnel de l’immobilier implanté depuis quinze ans à La Flotte, il a vu la situation évoluer « tout le monde s’est mis à faire de la gestion locative sans carte professionnelle et aujourd’hui on dit ouh là là ! », dénonce-t-il, estimant que c’est plutôt contre ce phénomène qu’il faudrait lutter. Mais l’essentiel est aussi ailleurs « Derrière, il y a bien d’autres métiers, entreprises de ménage, artisans… c’est une économie. », précise-t-il. Et selon lui, changer tout du jour au lendemain aura des conséquences. « C’est difficile à faire comprendre » ajoute Alexandre Duret regrettant « le manque de concertation avec les professionnels de l’immobilier qui ont des idées et des suggestions ». « Il faut une vision globale et écrire une feuille de route », estime-t-il.
Des quotas controversés
« D’accord pour l’enregistrement et le changement d’usage », poursuit le professionnel, même si le dernier a entraîné un retard dans l’ouverture des réservations pour la saison à venir. Mais les quotas sont « un mauvais signal décourageant les investisseurs », affirme-t-il. On peut répondre qu’il s’agit justement de cela, décourager ces acquéreurs en quête de rentabilité spéculative. Pour Alexandre Druet, ils restent peu nombreux. « L’essentiel du marché c’est 60 à 61% de résidences secondaires et c’est historique », affirme- t-il. Soit une clientèle investissant souvent pour rejoindre l’île à l’heure de la retraite et louant occasionnellement pour financer l’acquisition ou de futures charges, explique-t-il, appuyant son argumentation sur le témoignage récent d’un confrère dont des clients ont finalement décidé d’aller acheter ailleurs face à l’obstacle des quotas.
Autre point d’achoppement, la non cessibilité. Car seul le demandeur est titulaire du changement d’usage. En cas de décès par exemple, les héritiers d’une résidence secondaire seront sortis du marché et devront reprendre la totalité des démarches, quitte à se retrouver en liste d’attente si les quotas sont atteints. Une situation injuste pour Alexandre Druet concluant par la vigilance nécessaire sur « une évolution à regarder avec des dommages collatéraux probables à trois ans ».
Point d’étape à la CdC
« Oui c’est sûr, le marché est désormais contraint et plus concurrentiel pour les professionnels qui devront aller chercher des clients aussi ailleurs », assume Peggy Luton face aux arguments livrés par Alexandre Druet. Et si la viceprésidente déléguée au logement à la CdC reconnaît volontiers l’hémorragie causée par les non professionnels s’improvisant gestionnaires de biens (cela relevant de la législation nationale), elle tique sur l’absence de concertation, se référant à l’ensemble des informations et explications données aux acteurs du marché. « C’est sûr on peut toujours faire plus mais quand même… », conclut-elle.
Sur le dernier trimestre 2024 la Communauté de Communes a traité l’ensemble des dossiers dits prioritaires, c’est-àdire à la taxe de séjour acquittée, sur le fondement de quotas calibrés à hauteur de trois mille quatre cent soixante-quinze, chiffre revu à la hausse car avaient été omises les personnes réglant la TS directement via les plateformes. « Les quotas n’étaient pas atteints », souligne Peggy Luton évoquant seulement deux refus réels, un non prioritaire et quelques autres pour dossiers incomplets. Depuis le 1er janvier c’est au tour des nouveaux entrants et « il reste encore un peu de mou. ».
Sur la question des ensembles de logements en meublés de tourisme alors qu’ils devraient être en résidence de tourisme voire en service hôtelier, « nous les invitons à rentrer dans les cases professionnelles », précise Peggy Luton ajoutant qu’il n’y a « aucune dérogation aux quotas par demandeur : deux c’est deux ».
Sur les aides aux travaux de réhabilitation, l’un des volets du PLH*, la vice-présidente déléguée au logement évoque « déjà pas mal de demandes ». Mais pour avancer, « nous attendions le vote du budget et la décision sur le dispositif Ma Prime Renov’. Annoncé à la baisse, il a finalement été ajusté à sa consommation réelle en 2024 », se réjouit-elle, même si un reliquat d’incertitude demeure concernant le système Loc Avantages.
Peggy Luton nous annonce une seconde édition des Assises du Logement pour le mois de mars. Sur l’autre versant, un recours contentieux a été déposé devant le tribunal administratif de Poitiers par un collectif regroupant professionnels de l’immobilier, commerçants et propriétaires. Sur quel fondement ? Alexandre Druet ne veut pas le préciser, estimant que « la justice doit suivre son cours ». Un recours déposé en fait à deux reprises. « Nous avons dû recommencer en décembre puisque le nombre maximum de biens acceptés en meublés de tourisme était faux », ironise-t-il quelque peu.
Côté face, côté pile, la régulation ne va pas de soi et les nouvelles règles en place n’ont pas fini de faire parler d’elles…
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