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- AG de la Coopérative des Sauniers de l'île de Ré
« Regarder l’avenir plutôt que s’appesantir sur le passé »
L’année 2014 n’a pas été un long fleuve tranquille pour les responsables de la Coopérative des Sauniers, présidée par Guy Leprince, qui ont fait face avec aplomb et réactivité à toute une série de déconvenues ayant fortement impacté les résultats, tout en continuant de parier sur l’avenir en optimisant la productivité et le développement marketing & commercial, et en motivant l’équipe salariée.
La « crise de croissance » des 10 ans de la Coopérative des Sauniers, telle que l’a qualifiée Lionel Quillet « pour éviter les débordements médiatiques », tout Chef d’Entreprise l’a connue ou la connaîtra. Etre en passe – sous réserve d’une bonne récolte 2015 – de la surmonter, dans le contexte organisationnel d’une Coopérative relève d’un investissement humain des administrateurs et d’une solidarité des adhérents sans faille.
Une année noire
Comme pour mieux asseoir le fait que le conseil d’administration assume parfaitement la situation et que les coopérateurs lui maintiennent une entière confiance, Guy Leprince a d’emblée annoncé la couleur. Ou du moins enfoncé le clou, puisque les adhérents étaient déjà tous au parfum.
« En 2013, le résultat comptable était déficitaire et la récole insuffisante. Nous avions pour objectifs en 2014 de remonter la pente et de reconstituer les stocks de sel. Cette année ne fut pas à la hauteur de nos espérances et le volume de gros sel récolté (400 tonnes) a été le plus faible de ces dix dernières années ». Des départs et des arrêts maladie longue durée ont compliqué la situation.
« Par ailleurs, le mauvais résultat comptable à mi-parcours (- 205 K€ au 31/07/2014) nous a forcé à prendre des mesures économiques : suppression de deux postes (licenciement économique du directeur et du chauffeur poids lourd) et abandon du Site de stockage de La Rochelle ».
Mais aussi a sonné comme un coup de tonnerre la découverte de pertes importantes de gros sel et fleur de sel : « En voyant la baisse de volume de sel dans les silos nous avons découvert un écart entre le stock physique de sel et le stock des comptes adhérents ; un écart qui montre une perte de sel de 1300 tonnes de gros sel et de près de 94 tonnes de fleur de sel. Après étude, il s’avère que cette perte correspond au cumul des pertes non prises en compte entre 2003 et 2012. Le manque de trésorerie nous a contraint à retirer ces pertes sur les seuls comptes adhérents… Une décision difficile et douloureuse pour tous, mais vitale pour l’avenir de la coopérative ».
La solidarité, pierre angulaire d’une organisation coopérative
Ces pertes s’expliqueraient par « des mauvais bâchages, des mauvais lieux de stockage, un stock vieillissant, des pertes de reprise et de transformation pour le gros sel, et certainement par une mauvaise estimation du stock pendant le transfert du hangar aux silos ». Mais « il est malheureusement impossible de savoir exactement où tout ce sel s’est perdu » et même si les responsables de la coopérative vont mener un travail de fourmi pour essayer d’identifier et quantifier toutes les sources de pertes à toutes les étapes depuis le silo, ils préfèrent désormais davantage s’attacher à « comment régler le problème » plutôt qu’au « pourquoi ? », afin de « regarder l’avenir plutôt que le passé ».
Certains adhérents ont quelque peu tiqué à l’idée d’imputer ces pertes sur leurs comptes, mais une telle « solidarité » est le principe même d’une coopérative ont rappelé les administrateurs et il en va de la pérennité de la structure. Les bonnes années des profits substantiels ont été redistribués, comme en 2012.
L’examen des comptes 2014 révèle un chiffre d’affaires stable à 3,448 millions d’€, une légère progression du taux de marge de production à 48,30 %, malgré une variation d’encours de production de près de – 84 K€ impactant directement la production de l’exercice et un taux de marge commerciale en progression sensible à 20,19 % des ventes (14,24 % en 2013). Le fort déficit d’exploitation qui se monte à près de – 345 K€ (- 65 K€ en 2013, + 244 K€ en 2012) résulte aussi des coûts complets de 130 K€ des deux licenciements économiques. Le résultat financier de – 18,6 K€ creuse encore un peu plus le déficit net de l’exercice de 2014 qui s’élève à – 362 856 K€, alors qu’un résultat exceptionnel de + 45 K€ en 2013 avait permis de limiter la perte nette à – 17 811 €. L’intéressement des salariés, qui s’était élevé tout de même à près de 78 K€ lors de la faste année 2012, qui avait connu un résultat d’exploitation de + 244 K€ et un résultat net de +193,5 K€, est bien sûr à zéro depuis deux ans… et n’a pas été évoqué lors de cette AG, ni d’ailleurs les redistributions importantes aux adhérents cette année-là.
Malgré une capacité d’autofinancement (résultat après amortissements et provisions) de – 166 K€ en 2014 (+ 114 K€ en 2013, + 322 K€ en 2012), les fonds propres restent positifs tout comme la trésorerie qui s’élève à 300 000 €, les coûts des licenciements ayant été provisionnés dans les comptes mais pas encore décaissés.
Un outil de production performant, une activité commerciale encourageante
Après la phase de travaux et d’industrialisation réalisée en 2013, et le délai nécessaire en 2014 pour appréhender les nouvelles technologies installées dans l’atelier, un gros travail d’amélioration de la productivité a été entrepris à l’arrivée du nouveau responsable de production fin juillet 2014, qui se poursuit.
Côté réglementaire, l’association française des producteurs de sel marin de l’Atlantique récolté manuellement a traité trois dossiers d’importance. La reconnaissance européenne du sel marin comme produit bio serait en bonne voie, de source ministérielle, tandis que celle du terme « fleur de sel » et de sa « Spécificité traditionnelle garantie » (STG) est dans les mains de l’INAO. Par contre la non reconnaissance du sel comme produit agricole pourrait remettre en cause l’aide d’installation versée aux jeunes agriculteurs (DJA).
L’activité commerciale de la Coopérative a été stable. La répartition en volume des ventes se fait à 85 % en gros sel et 6 % en fleur de sel, mais en chiffre d’affaires le gros sel ne représente que 39 % contre 43 % pour la fleur de sel… De même, si les marques distributeurs MDD représentent 69 % des ventes totales, contre 22 % en GMS (sous la marque des Sauniers de l’île de Ré) et 9 % en « trade », les MDD représentent 48 % en valeur, la GMS marque Sauniers 39 % et le trade 13 %.
L’export représente seulement 5,5 % du chiffre d’affaires contre 15 % en 2012, cette baisse étant liée à l’arrêt volontaire de certains contrats avec « Lidl » en fleur de sel.
La gamme « Les Sauniers » a été totalement renouvelée tant au niveau des contenants que des chartes graphiques, tandis que des réorientations stratégiques des gammes MDD ont aussi été prises, avec un exercice de style compliqué pour garder du tonnage afin de développer la marque des Sauniers, tout en satisfaisant les demandes MDD.
Ces mesures commencent à porter leurs fruits, avec un développement « presque à deux chiffres » de la gamme « Les Sauniers » et un prévisionnel commercial 2015 plutôt bon pour le moment. Afin de mieux suivre l’activité opérationnelle et éviter de nouvelles mauvaises surprises, des tableaux de bord composés des indicateurs clés sont élaborés et les méthodes de management des équipes intègrent des échanges réguliers et fournis entre les salariés et les administrateurs.
Ainsi la reprise de la direction et la réorganisation de l’Entreprise par le conseil d’administration, la recherche de marchés plus adaptés et valorisés, des mesures d’économies prises (abandon du site de La Rochelle et licenciements économiques) jointes à l’amélioration de la productivité doivent permettre de remettre le navire à flots en 2015. La reconstitution des stocks de sel reste toutefois l’objectif principal cette année et tous croisent des doigts pour que 2015 soit un bon crû de récolte, si les conditions météorologiques sont enfin au rendez-vous.
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