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Pas folle, la guêpe !
Deux espèces de frelons occupent le territoire. Le Vespa cabro, frelon européen et le Vespa velutina, l’asiatique. Si la présence de l’autochtone agace, celle du colonisateur préoccupe.
Nerveux l’un et l’autre, ces deux frelons de taille à peu près similaire ne sont pas simples à identifier en vol. L’européen est jaune orangé à pattes brunes, alors que le noir et jaune frelon asiatique aux couleurs plus tranchées, habille d’un jaune d’or l’extrémité de ses pattes. Leurs nids diffèrent, moindre et conique chez l’insecte local, il est imposant et sphérique chez le natif d’Inde.
Quinze ans après son introduction fortuite, le frelon d’Asie a presque couvert l’ensemble de l’hexagone.
Apparu en 2004 à Agen via l’importation de poteries chinoises, Vespa Velutina var. nigrithorax a envahi la France à raison de 100 km par an. Estimé danger sanitaire par le code rural, il est classé espèce exotique envahissante depuis 2012, année où il a conquis la moitié du territoire national. Car le frelon à pattes jaunes n’est pas qu’une simple guêpe attirée par confitures et salades de fruits estivales. La bestiole fait des ravages dans le milieu apicole. Les trois centimètres de colère dévastatrice contenue dans le corps du frelon asiatique décapitent les habitantes de la ruche, décimant les colonies. Si sa morsure est fatale pour l’abeille, sa douloureuse piqûre peut être létale pour l’humain allergique à son venin.
Une hécatombe qui colle le bourdon…
Sans prédateur naturel sous nos latitudes, le frelon asiatique a une proie de prédilection, l’abeille domestique Apis mellifera mais aussi ses cousines sauvages. Deux fois plus petites que lui, les butineuses déjà bien affaiblies par le réchauffement climatique et l’usage intensif de pesticides périssent de manière fulgurante. Herbicides, fongicides, insecticides chimiques de toutes sortes, utilisés par le jardinier du dimanche anéantissent quantité de plantes mellifères. Laissant croire à tort qu’ils prennent soin du végétal par leur doux nom de produits phytosanitaires, les intrants chimiques épandus par le professionnel agricole qui, à chaque usage, appauvrissent un peu plus les sols, font que la bête à miel se meurt. L’agriculture dite raisonnée n’est pas plus raisonnable et seule la culture biologique préserve les insectes butineurs qu’elle met à contribution pour la pollinisation.
Le printemps, saison propice pour limiter l’implantation et la propagation du frelon
En février/mars, sortie de sa longue léthargie hivernale, la femelle fécondée en quête de nourriture cherche à fonder un nid. Délaissant celui de la saison précédente, elle part en amorcer un nouveau, souvent dans le même secteur si la colonie de l’an passé n’a pas été dérangée. Elle y pond ses larves. En mai, celles-ci devenues ouvrières s’activent à construire le nid. En été, chaque nid génère des centaines d’individus participant au développement et à la reproduction de l’espèce. C’est à l’automne que la prédation est la plus forte, Vespa velutina met à mal l’écosystème en perturbant la chaîne alimentaire. Au mois d’octobre, toute la population quitte le nid, mâles et ouvrières s’éteignent alors que la reine part hiberner, attendant le futur printemps pour recommencer le cycle. A leur arrivée en 2004, les frelons privilégiaient la cime des arbres pour nidifier. Ces nuisibles s’installent désormais partout, à la campagne comme en centre-ville, sous les toitures, les barbecues et jusqu’aux plaques d’égout. La saison printanière est la période idéale pour anéantir l’animal.Une femelle attrapée en mars, c’est théoriquement un nid en moins dans l’été. Parce que la prise sera à coup sûr une mère et qu’il est impossible d’avoir cette certitude le temps avançant.
Mortel cocktail !
Le piège est facile à réaliser : il faut découper des encoches de 8,5 millimètres dans le haut d’une bouteille en plastique, y verser un mélange de bière brune, sirop de fraise et vin blanc, ce dernier étant censé repousser les avettes. Suspendu aux branches d’un arbre ou posé dans les potées de fleurs, le voilà prêt. Malheureusement nombreux insectes tentés par le sucre se font prendre. Apiculteurs, amoureux de la nature remercient par avance l’inventeur du piège sélectif qui saura n’attraper que le redoutable invasif.
La nature est bien faite !
Au poison, son antidote ! Celui du frelon asiatique est la poule Noire de Janzé. Friand d’insectes, l’oiseau se méfie des abeilles mais raffole du frelon au vol bruyant. Et particulièrement l’asiatique qui contrairement au frelon commun est facile à gober grâce à son vol stationnaire. Gallinacé en voie de disparition, cette poule rustique a gardé son instinct sauvage. Grande vagabonde cherchant activement sa nourriture, elle n’hésite pas à grimper dans les arbres et nicher dans les haies. Non polluant, n’altérant pas le réseau trophique ce volatile breton est à la fois le parfait protecteur des abeilles et le plus sain destructeur de frelons.
Mieux vaut prévenir que guérir…
Le sage adage ne s’applique pas dans l’île de Ré où aucune prévention n’est envisagée indiquant la conduite à tenir en début de printemps pour éradiquer les premières invasives et leurs nids en devenir. Seules, des campagnes d’information présentant l’espèce et son impact néfaste sur la biodiversité rétaise sont animées par les écogardes lors de manifestations locales. Les demandes de destruction de nids étant en nette progression, le Conseil Communautaire a mis en place en 2014 un dispositif de lutte du 1er mai au 31 décembre. Si vous voyez un nid, contactez les services municipaux qui constateront sa présence et établiront une attestation afin de faire intervenir une entreprise spécialisée. Les Autorités intervenant trop tard, leur réponse est la pulvérisation d’un insecticide chimique à l’intérieur du nid. Contrairement au piège sucré, la facture est salée : il en a coûté 2145 € à la Communauté des Communes pour détruire 12 nids en 2011 et 37 777 € l’année dernière pour supprimer 269 nids. Les populations d’abeilles déclinent tout comme le moral des apiculteurs. Dans le nord de l’île, M. et Mme Renouf installés à Saint-Clément depuis 1987, déploient des efforts considérables depuis quatre ans. Ils renouvellent leurs ruches, domestiquent des abeilles sauvages… En vain. Trop apeurées par le frelon, elles ne sortent plus butiner. Sur 90 colonies, à l’automne dernier il n’en restait plus que 15. Lors de votre prochain apéro, prélevez un peu de l’alcoolisé nectar et confectionnez un piège. Il en va de la survie des abeilles. Et de la nôtre !
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