- Environnement & Patrimoine
- Risque incendies de forêt
Pleins feux sur la forêt rétaise
Si le risque « submersion marine » est omniprésent sur l’île de Ré, le risque « feux de forêt » apparait souvent secondaire. Alors que les flammes viennent de ravager plus de 20 000 hectares en Gironde, l’île est-elle préparée à un incendie d’ampleur ? Eléments de réponse.
Quand on parle de « risque » sur l’île de Ré, les regards des Rétais se tournent naturellement vers le large, surtout depuis la tempête Xynthia de 2010. « On peut dire que le risque submersion est dans les gènes des Rétais. La forêt est arrivée beaucoup plus tard, dans les années 50-60, c’est donc quelque chose d’assez nouveau dont on ne mesure pas les risques », explique Philippe Pouvesle, technicien de l’Office national des forêts (ONF) sur l’île de Ré. Pourtant, le territoire insulaire, qui s’étend sur 7960 hectares, compte 1540 hectares de surfaces boisées (pins maritimes essentiellement, ainsi que chênes verts), soit presque 20% de sa surface. L’île fait partie des cinq massifs à risque du département1, l’ensemble des communes étant concernées à part Loix. Si le terrible incendie de 1976 à la Palmyre a longtemps marqué les Charentais-Maritime, cette culture du risque est peu ancrée localement. « En l’absence de grands feux, cette culture s’érode et n’est plus présente dans la mémoire collective. C’est une culture à entretenir, d’où l’enjeu des actions de l’Etat », explique Yann Fontaine, chef du service « Eau, biodiversité et développement durable » à la DDTM. L’île de Ré dispose en effet d’un Plan de prévention des risques naturels (qui intègre les incendies de forêt) dont le but est de protéger les enjeux du territoire en imposant des règles précises en matière d’urbanisme. Un autre document, beaucoup moins connu du grand public, vise plus précisément la prévention des feux de forêt et les mesures à prendre afin d’éviter tout départ de feu : le PDPFCI, qui couvre la période 2018-2027 (voir encadré). Alors que la préfecture vient de placer l’île de Ré en risque feux de forêt « très sévère » et que la Gironde et les Landes sont ravagés par les flammes, certains élus ne cachent pas leur inquiétude. « Quand je vois la sécheresse actuelle, je me dis que la situation est dramatique. Je ne cache pas que j’ai très, très peur, et que j’ai presque hâte que nous soyons à l’automne », confie Patrice Raffarin, conseiller départemental.
Secteur « rouge » au sud
Dans le nord de l’île, les principaux massifs forestiers sont le bois Henri IV, la forêt de la Combe à l’eau et les deux forêts des Portes-en-Ré (Le Lizay et le bois de Trousse-Chemise). « Il s’agit essentiellement de forêts domaniales gérées par l’ONF », explique Pascal Couzinier, chef du pôle territorial Ouest au SDIS 17. Globalement bien entretenues et peu étendues, elles ne sont pas celles qui suscitent le plus d’inquiétude. A l’inverse du massif « sud », espace boisé de 500 hectares qui s’étend sur plusieurs communes (le Bois-Plage, Sainte-Marie, la Flotte, Rivedoux) et essentiellement composé de parcelles privées. « Déjà, c’est le plus grand de l’île de Ré, même s’il n’est pas continu. Et du fait de son morcellement, c’est le moins bien entretenu », confirme Pascal Couzinier. Quand on sait que certains propriétaires ne savent même plus qu’ils y possèdent un bout de forêt, on imagine aisément les problèmes d’entretien, avec notamment des pistes d’accès pour les pompiers envahies par la végétation ! Pour Philippe Pouvesle, qui vient de passer 22 ans au service des forêts rétaises, le risque « majeur » sur l’île concerne les Evières. « C’est le secteur rouge sur l’île. Outre les micropropriétés, il y a assez peu de chemins d’accès. Et en plus, il y a beaucoup de personnes qui campent sur leurs parcelles ». Pour les soldats du feu, un incendie dans ce secteur relèverait du casse-tête, avec des campeurs éparpillés dans la forêt et difficile à recenser. « C’est vrai que c’est une particularité de l’île. Aller récupérer des gens au milieu de foret, ce n’est jamais évident », confie le lieutenantcolonel Pascal Couzinier. A Rivedoux, comme sur les autres communes concernées, la police municipale est fortement mobilisée -surtout depuis l’arrêté préfectoral de risque « très sévère » feux de forêt- afin de prévenir les comportements à risque et localiser les campeurs. « C’est un travail au quotidien. Attention, je ne dis pas que c’est eux qui vont mettre le feu mais que le risque est énorme pour cette population en cas d’incendie », confie Patrice Raffarin, le maire de Rivedoux. Du côté de la DDTM, on estime que les campeurs ne sont pas plus dangereux que le reste de la population estivale, du moment que les interdictions des feux ou barbecues en forêt sont respectées. A la CdC de l’île de Ré, on « espère » que ces campeurs sont conscients qu’ils se trouvent dans une zone à risque et qu’ils font attention. « Cette présence humaine au coeur de la forêt est un risque supplémentaire. A contrario, comme ils sont dans la forêt, on peut penser qu’ils vont vite s’apercevoir d’un départ de feu », explique Sylvie Dubois, directrice du pôle Environnement et développement durable à la CdC de l’île de Ré.
Des amendes « dissuasives »
Il faut savoir que 90% des départs de feu ont une origine humaine, non intentionnelle pour la plupart. En presque un quart de siècle sur l’île de Ré, Philippe Pouvesle n’a connu que trois incendies, tous provoqués par l’Homme. « La forêt s’embrase rarement toute seule, même en période de sécheresse », rappelle le technicien de l’ONF. Au SDIS, on ne cesse de répéter depuis des années le même message, espérant qu’il finisse par être entendu. « Si on ne veut pas de feux de forêt, il ne faut pas d’éclosion de feu. Cela signifie ne pas fumer en forêt, ne pas allumer de feu ou de barbecue même si on a le sentiment d’avoir pris toutes les précautions et ne pas jeter de mégots par la fenêtre », rappelle Pascal Couzinier. On y pense moins, mais les véhicules sont souvent à l’origine des départs de feux, comme à la Teste-de-Buch2 : il faut donc faire attention où on gare son véhicule, d’autant que le pot d’échappement, brûlant, peut rapidement enflammer les herbes sèches… Sur l’île de Ré, une des craintes des maires se produit entre chiens et loups, lorsque des jeunes se regroupent sur la plage ou dans les dunes autour d’un feu de camp. « Parfois, pour se mettre à l’abri du vent, ils vont en arrière-dune, voire même dans la forêt », souligne Philippe Pouvesle. Pour prévenir ce genre de pratique, l’ONF a mis en place il y a trois ans une campagne d’affichage indiquant les sanctions encourues par les contrevenants, ainsi qu’une distribution d’autocollants dans les campings de l’île. « A 135 euros d’amende par personne présente autour du feu, c’est dissuasif. Ça s’est beaucoup calmé depuis ». Le technicien ONF rappelle que la loi est particulièrement sévère en cas de déclenchement d’un feu de forêt, même non intentionnel. « C’est une prise de risque énorme. Les gens n’ont pas conscience qu’un feu festif qui s’étend, ce n’est pas juste une amende, c’est considéré comme un crime ».
Souvent situés en lisière de forêts, les nombreux campings de l’île de Ré sont un autre sujet de préoccupation. En 2009, les services de l’Etat pointaient du doigt le non-respect des règles de débroussaillement dans 2 campings du département sur 3, et encore dans la moitié d’entre eux en 2015 ! Les campings ont en effet l’obligation, entre autres, de débroussailler l’ensemble de leurs parcelles avant le début de la saison (ou avant le 15 mai pour les campings ouverts à l’année) ainsi qu’une bande de 50 mètres en lisière. Pour faire appliquer ces règles, la DDTM contrôle chaque année une dizaine d’établissements sur l’ensemble du département, essentiellement dans les campings à risque des Mathes, de l’île d’Oléron et de l’île de Ré. « Les choses se sont nettement améliorées », assure Yann Fontaine, chef du service « Eau, biodiversité et développement durable » à la DDTM. A la CdC de l’île de Ré, Sylvie Dubois, ancienne spécialiste « des massifs boisés à risque feu » à la Direction départementale de l’agriculture et de la forêt (DDAF), connait parfaitement le sujet. « Les campings étaient une de nos cibles principales. Aujourd’hui, ce n’est plus un sujet d’inquiétude. S’il y en a qui respectent leurs devoirs de débroussaillement et de sécurité incendie, c’est bien les campings. Le travail a été fait ».
L’impératif du débroussaillement
S’il y a bien un sujet qui est sur toutes les lèvres, c’est celui du débroussaillement. Depuis 2012, l’article L134-6 du Code forestier oblige les propriétaires situés en zone à risque à débroussailler leur parcelle lorsqu’elle se situe en zone urbaine, et même à débroussailler une bande de 50 mètres autour de leur parcelle lorsqu’elle se trouve en « contact » (moins de 200 mètres) avec la forêt. « Le plus souvent, le feu se développe au sol, les feux de cimes, comme en Gironde, étant assez rares. Le débroussaillement est donc primordial car le feu va moins vite et a peu de chance d’atteindre les habitations. Cela nous permet de mieux faire notre travail », explique Pascal Couzinier. Toutefois, cette obligation de débroussailler autour de sa parcelle implique parfois le fait de nettoyer le terrain…du voisin ! Certes, la loi autorise cette pratique, mais cela peut poser des problèmes évidents. « Débroussailler, ça ne veut pas dire faire table rase, rappelle Philippe Pouvesle. Ça veut dire élaguer les arbres sur deux mètres de haut et broyer les taillis inférieurs à 12 centimètres de diamètre et les branches mortes ». Pour mieux coordonner ces opérations, une Association des riverains arsais de la forêt domaniale de la Combe à l’eau (ARAFCE) a vu le jour à Arsen- Ré en 2004. Son but ? Organiser et mutualiser le débroussaillement (dont la charge est aux propriétaires) autour des différentes parcelles et obtenir un aspect paysager uniforme. « A ma connaissance, c’est une des plus grosses associations de ce type en France. Ça fonctionne tellement bien qu’ils reçoivent même des courriers de propriétaires du sud de la France, pourtant plus habitués au risque feux de forêt », se félicite Philippe Pouvesle. La même année, une structure similaire, l’Association des riverains portingalais des forêts domaniales (ARPF), s’est constituée aux Portesen- Ré, signe que cette question du débroussaillement est prise au sérieux sur l’île de Ré. Quand ce n’est pas le cas – la présence d’une majorité de résidences secondaires ne facilitant pas l’entretien régulier – le maire dispose du pouvoir de police pour rappeler aux propriétaires leurs obligations. « Il y a une prise de conscience, mais encore beaucoup de travail à faire. Sur ma commune, il n’y a pas une journée sans intervenir auprès des propriétaires, car bon nombre de parcelles ne sont pas entretenues », déplore Patrice Raffarin. En tant que conseiller départemental, il se dit également « extrêmement vigilant » sur les parcelles boisées relevant du Département, « car nous devons montrer l’exemple ».
Le Bois-Plage en première ligne
Au Bois-Plage, commune ceinturée par la forêt (Les Evières, les Biettes, les Mille-fleurs ou les Oisières), la question des feux de forêt est une priorité. « Nous avons les plus grandes surfaces boisées de l’île. Nous n’avons donc pas attendu les évènements actuels pour nous en inquiéter », souligne Ludovic Corbeau, directeur général des services de la mairie. Depuis 2020, elle s’est dotée d’un nouveau Plan communal de sauvegarde (PCS), véritable outil opérationnel du maire en cas de crise. « C’est un document de prévention et de gestion de crise absolument capital. Nous avons fait quelque chose de vraiment pointu : sur le volet feu de forêt, c’est une machine de guerre », confie Ludovic Corbeau. En avril 2021, la commune a recruté Kevin Mouëllic, seul garde-champêtre de l’île de Ré, chargé de veiller, notamment, sur les espaces boisés de la commune. Avec son pick-up et son quad, il passe en ce moment beaucoup de temps dans la forêt pour des actions de prévention, de recensement des campeurs sur la centaine de parcelles privées de la commune, de répression quand cela est nécessaire ou d’entretien (débroussaillement). Il vient même de s’équiper de trois pièges photographiques connectés : posées sur les arbres dans des endroits critiques de la forêt, ces caméras détectent les mouvements suspects et produisent des photos en rafales, envoyées directement sur le téléphone du garde-champêtre. « Dernièrement, il y a eu un rassemblement de jeunes autour d’un feu, en 10 minutes j’étais sur place », confie Kevin Mouëllic. D’autres caméras du même type viendront compléter le dispositif dans les prochains mois. Par ailleurs, son pick-up sera bientôt équipé d’une citerne portable électrique de 300 litres d’eau, afin de pouvoir intervenir sur tout départ de feu. « En tant que garde-champêtre, c’est vraiment le premier maillon de la chaîne et le premier à pouvoir intervenir rapidement en cas d’éclosion d’un feu », argumente Ludovic Corbeau.
Des pare-feux aux Portes ?
La question de l’entretien des forêts, sur l’île de Ré comme ailleurs en France, se posera à coup sûr dans les prochaines années. Si l’entretien est indispensable, il faut le concilier avec le respect de la biodiversité. « Une forêt a besoin d’être ‘sale’ pour pouvoir vivre, autrement ça devient un parc », souligne Philippe Pouvesle. Pour le technicien de l’ONF, créer de nouveaux pare-feux sur des forêts de taille relativement modeste n’aurait pas vraiment de sens. « Si vous faites un pare-feu de 150 mètres de large au Lizay, il n’y a plus de forêt. Après, c’est un choix ». Sans parler de parefeux de cette dimension (ils font par exemple 50 mètres de large en forêt de la Coubre), la commune des Portesen- Ré estime, au regard de l’incendie de la La Teste-de-Buch, qu’il faudra mettre cette question sur la table. « A La Teste, on a vu qu’une association s’était opposée à la mise en place de pare-feux. Il faut parfois accepter de perdre un peu de biodiversité avec un nouveau pare-feu plutôt que de perdre toute la biodiversité à cause d’un incendie », soutient Patrick Bouraine. Le premier adjoint au maire des Portesen- Ré souhaite « tirer les leçons » des incendies de Gironde et engager des discussions et des études avec l’ONF. « Les pare-feux sont parfois pointés du doigt par des associations environnementales comme une atteinte à la biodiversité. Mais si on veut garder nos forêts, il faut les entretenir », estime Patrice Raffarin. En tout cas, tout le monde est unanime pour dire qu’il faut se préparer à des périodes de sécheresse de plus en plus longues, et que la végétation en fera les frais. « Les conditions météorologiques sont exceptionnelles en ce moment. Mais avec le réchauffement climatique, il va falloir s’habituer à d’autres étés comme celui-ci », prévient Pascal Couzinier
1) Les cinq massifs à risque recensés par les services de l’Etat sont, du nord au sud : l’île de Ré, l’île d’Oléron, la presqu’île d’Arvert, la forêt de la Lande et la Double saintongeaise. Il concerne 72 communes au total, situées dans ces massifs forestiers.
2) Un problème électrique sur un véhicule stationné en forêt semble être à l’origine du sinistre qui a ravagé 8000 hectares de pinède.
Un risque de « grand feu » relativement faible
De par la superficie des espaces boisés (1540 hectares, comparés aux 8000 hectares partis en fumée à La Teste-de- Buch) et leur discontinuité, un feu de forêt d’ampleur ne représente pas un risque énorme. Par ailleurs, l’hygrométrie de l’île, grâce à un taux d’humidité plus élevé que sur le continent, offre un autre atout pour l’île. Les pompiers recensent une dizaine de départs de feu par an (y compris les petits feux de végétation), ce qui reste relativement modeste. Classé à risque faible à moyen, l’aléa n’est pas de même nature que dans le sud du département (Double saintongeaise) ou que sur la presqu’île d’Arvert, où la forêt de la Coubre s’étend sur 8000 hectares, avec 23 campings sur la communes des Mathes/ La Palmyre. Là-bas, le SDIS a préparé un plan d’évacuation particulier puisqu’un incendie majeur pourrait concerner entre 80 000 et 100 000 personnes en été… Rien de tout ça sur l’île de Ré, même si un Plan d’Opération Forêts vient tout juste d’être mis en place (comme sur tous les massifs à risques) afin de recenser et cartographier les points d’eau, les pistes d’accès et les moyens à mettre en oeuvre. Grâce à ses 11 caméras de détection installées sur les forêts du département, dont une se situe à La Flotte, le SDIS est capable de détecter « par triangulation » tout départ de feu. La présence de nombreuses unités de pompiers dans l’île, rapidement mobilisables, doit permettre de circonscrire rapidement un départ de feu. « En cas de feu sur l’île, il n’y aura pas d’évacuation totale de la population, ça ne sera que partiel », assure Pascal Couzinier. Pour le responsable du SDIS, un des défis sera de gérer la -nombreuse- population estivale. « En cas d’incendie, on peut être amené à confiner les gens sur la plage. Nous avons connu ce cas de figure à Saint-Trojan l’an dernier, où certains voulaient à tout prix récupérer leur voiture. Il faut impérativement écouter les consignes des autorités ». En cas de besoin de renforts du continent, l’accessibilité du pont reste un problème de taille, surtout si un incendie survient le week-end…
Les « Plans » de l’Etat contre les feux de forêts
Moins connu sur l’île de Ré que le Plan de prévention des risques, le Plan départemental de protection des forêts contre les incendies (PDPFCI) recense les cinq massifs à risque du département, dont celui de l’île de Ré. « Il vise à limiter le nombre de départs de feux et les surfaces de forêts brûlées. C’est donc un outil de prévention des feux, quelles que soient les conséquences. Pour résumer, il s’agit de tout mettre en oeuvre pour éviter que la forêt brûle », explique Yann Fontaine, chef du service « Eau, biodiversité et développement durable » à la DDTM. Le PDPFCI 2018-27 fixe ainsi une stratégie et recense donc toutes les actions à mettre en oeuvre sur cette période afin de limiter la survenue de feux de forêts dans le département : débroussaillement, entretien des pistes forestières, accès aux points d’eau, prévention et information du public et contrôle de la bonne application des mesures. Un point d’étape, en présence de tous les acteurs (DDTM, DREAL, SDIS, ONF, représentants de l’hôtellerie de plein air, acteurs de la sylviculture, élus etc), est programmé en cette fin d’année, afin de voir ce qui a été bien fait et ce qui reste à améliorer. « Il s’agit que chacun dans son domaine nous apporte ses éléments afin d’avoir la vision la plus complète possible », explique Yann Fontaine.
Ce plan est donc évolutif, puisqu’il s’adapte régulièrement aux éléments de terrain et aux données scientifiques nouvelles, surtout avec la récurrence et l’intensité des périodes de sécheresse. « Dans le prochain plan, la question du réchauffement climatique va se poser. Il s’agira donc de traduire les effets de ce réchauffement sur la problématique des feux de forêts », confirme Yann Fontaine. Quant au PPRN de l’île de Ré (2002, révisé en 2018), il vise à protéger les enjeux du territoire, à savoir les populations, les activités économiques, les habitations etc. Si son volet « risque submersion » a régulièrement fait la Une des journaux suite à la tempête Xynthia de février 2010, il comporte également un volet « incendies de forêt ». Il met en place des règles, en matière d’urbanisme et d’occupation du sol, afin de limiter les risques. L’aléa incendies de forêt est construit par croisement, d’une part, de l’éclosion potentielle (prise en compte de l’historique des feux de forêts dans un secteur) et de l’intensité et, d’autre part, de la combustibilité (capacité d’une essence végétale à alimenter le feu). Sur l’île de Ré, seuls trois niveaux d’aléas ont été retenus : très faible, faible et moyen. Par ailleurs, un critère de défendabilité (qui n’entre pas dans la définition des aléas) est pris en compte dans l’élaboration du zonage réglementaire : il tient compte de la disponibilité en points d’eau, de l’accessibilité pour les secours ou des moyens de surveillance. La règle générale est la suivante : les zones naturelles sont par définition inconstructibles. Pour le reste, les zones urbanisées en aléa faible restent constructibles (zone Vf), comme les zones en aléa moyen mais présentant une bonne défendabilité. Pour tous les autres secteurs soumis au risque incendie de forêt (zone « Rf » soit un aléa moyen et une défendabilité moyenne), les nouvelles constructions sont interdites. Quand les projets sont autorisés par le règlement, ils doivent par ailleurs respecter des prescriptions pour s’adapter au risque : cela va de la résistance des matériaux au feu, au choix des essences d’arbres pour les haies (éviter les espèces inflammables) en passant par les barbecues (dispositif anti-étincelles et bacs de récupération des cendres), la mise en place de bornes à incendie, sans oublier bien-sûr l’obligation de débroussaillement.
Est-ce que l’aléa feu de forêt entraine l’inconstructibilité de certains terrains sur l’île de Ré, à l’instar de l’aléa « submersion » ? « Certainement, mais c’est difficile à quantifier. En tout cas, il est beaucoup moins prégnant que le risque submersion qui représente au minimum 7 cas sur 10 », confie Jean-Manuel Nieto, chef du service « Risques, sécurité et littoral » à la DDTM. Par ailleurs, la DDTM souligne que d’autres règlementations (Loi Littoral, site classé, site inscrit), avaient déjà rendu inconstructibles certaines parcelles potentiellement « bloquées » par l’aléa feux de forêt, sans parler des terrains cumulant les risques et rendus déjà inconstructibles par l’aléa submersion. Contrairement aux autres communes de l’île de Ré, largement impactées par le risque « submersion », le Bois-Plage l’est majoritairement par le risque « incendies de forêt ». Le service urbanisme voit régulièrement passer des refus de permis pour des extensions, sans pouvoir en donner le chiffre exact. Aux Portes-en-Ré, Patrick Bouraine constate également que « nous avons eu des projets d’extension qui n’ont pas été possibles à cause de l’aléa feux de forêts ». A Rivedoux, on estime que l’aléa feux de forêt reste assez marginal et correspond à des cas particuliers. « Nous avons peut-être 6 ou 7 maisons en zone Rf qui ne peuvent pas s’agrandir, mais ce sont des maisons des années 60 qui étaient déjà là avant les différentes réglementations », explique Marc Chaigne, adjoint à l’urbanisme. Dans ces zones à risque, l’inconstructibilité vise à limiter toute occupation du sol susceptible de générer l’arrivée de population supplémentaire. Une disposition, qui, on le comprend bien, bloque les projets d’extension ou de création d’annexes. A noter que pour d’autres enjeux du territoire comme les campings, l’idée de ne pas augmenter le nombre de personnes exposées au risque et la vulnérabilité des biens conduit à la même philosophie. « On ne va pas exproprier un camping qui existe déjà. Par contre, il ne pourra pas s’agrandir », explique Jean-Manuel Nieto.
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