Olivier Falorni réélu avec l’un des meilleurs scores de France
Rassemblant 74,71 % des suffrages exprimés sur son nom, contre 66,11 % en 2022, Olivier Falorni a tout à la fois capitalisé sur son action de député depuis 2012 et bénéficié du désistement de Jean-Marc Soubeste (NFP) au second tour, face à Emma Chauveau, la jeune candidate RN, quasi-inconnue des électeurs et totalement absente de la campagne. Nous l’avons interviewé au lendemain de sa victoire.
Ré à la Hune : J’imagine que vous êtes à la fois soulagé localement et inquiet au plan national ?
Olivier Falorni : Oui soulagé et surtout j’ai ressenti une grande joie devant un tel résultat sur notre 1ère circonscription de Charente-Maritime, c’est l’un des plus gros scores dans notre pays. C’est au-delà de toutes mes espérances, je ne m’attendais pas à un tel niveau et c’est une belle satisfaction de recueillir aussi une telle confiance des électeurs de l’île de Ré, qui m’ont fortement soutenu dès le 1er tour*. Il y a également eu un bon report de voix des électeurs de Jean-Marc Soubeste, qui a amplifié le phénomène.
Certes, on peut considérer que le RN (25,29 % sur la circo, 27,38 % sur l’île de Ré – NDLR) a progressé sur notre territoire, qui n’échappe pas à la montée nationale de ce parti extrémiste, mais on enregistre l’écart le plus important de tout le pays.
Pourquoi n’avons-nous pas voté ici autant RN qu’ailleurs ? Nous ne sommes pas épargnés par les difficultés sociales, économiques et les enjeux de sécurité. Mais les habitants ont en tête l’Histoire de notre territoire et mesurent plus que d’autres, à la lumière de cette Histoire lointaine, les conséquences que peut avoir un petit bulletin de vote, ce petit papier RN avec sa flamme tricolore. Le Front est devenu Rassemblement, mais la flamme n’a pas changé, comme la flamme tricolore italienne en référence à Mussolini, que mes grands-parents ont fui dans les années 1930, ils sont partis d’une Italie fasciste pour venir vivre en République française.
Je crois à la mémoire qui se transmet de génération en génération. Ici, on résiste, on refuse l’inacceptable, on se bat pour des convictions. C’est à l’aune de celles-ci que je me suis engagé, ce sont les références de Michel Crépeau et de Georges Clémenceau qui m’animent.
Pendant notre campagne nous n’avons rien lâché et nous sommes fortement mobilisés, tous, pour que le RN fasse le score le plus bas possible.
Progresser de 9 points entre 2022 et 2024, dans un contexte particulièrement difficile, où ce n’était pas évident de se remobiliser et alors que j’ai pris un coup de massue, après avoir été tout entier impliqué en tant que rapporteur général sur le texte de loi sur la fin de vie… ce résultat fait plus que du bien !
Pensez-vous que la France sera gouvernable dans l’année à venir ? Quelle sera votre ligne rouge de conduite à l’Assemblée Nationale ?
Il va falloir si possible construire un rassemblement républicain, trouver une majorité ou des majorités sur des textes indispensables. Ma ligne rouge s’arrête aux extrêmes, le RN et LFI, comme je l’ai martelé pendant la courte campagne. Je persiste et signe, je parle bien des extrêmes droite et gauche. Evidemment que je ne considère pas le PS comme un parti extrémiste, mais Jean-Luc Mélenchon et de nombreux députés qui l’entourent sont dans des positionnements extrêmes. Cette analyse que je fais depuis longtemps a été confirmée par quelqu’un comme François Ruffin qui a annoncé qu’il ne siégerait pas avec LFI à l’Assemblée Nationale, estimant la position de ce parti comme intenable, on ne peut pourtant le soupçonner d’être un socialdémocrate macroniste !
Il n’y a pas d’alliance possible avec LFI, qui est dans une conflictualisation du débat public et dans des propositions ou promesses absolument intenables. La politique a besoin en France d’apaisement et non de bruit ni de fureur.
Avez-vous été surpris par les résultats des Législatives au plan national ?
Oui, je n’imaginais pas que les désistements du second tour, dans les deux sens, entre le bloc majoritaire présidentiel et le bloc NFP, fonctionneraient aussi bien, je n’en étais pas persuadé dans certains cas.
Il y a eu une prise de conscience dans ce pays avec une majorité de Français qui ne veut pas de l’extrême droite au pouvoir. Cela s’est aussi manifesté par une participation nettement plus forte. Et pendant cette campagne d’entre deux tours, entre les candidats RN muets et invisibles et ceux qui ont montré leur absolue incompétence et impréparation, cela a créé une prise de conscience. Jordan Bardella a aussi montré ses limites sur le fond des dossiers, malgré sa mécanique de communication, ainsi que ses changements de pied, ses renoncements et propositions intenables.
Pour autant, attention à ne pas considérer ce résultat comme une victoire totale contre le RN, il a fallu des désistements pour contrer la montée de l’extrême droite, les problèmes restent présents et le RN est le troisième bloc, qui met en avant des problématiques en y apportant les mauvaises réponses. Il n’a pas été effacé d’un coup d’ardoise magique et risque de ressurgir à la prochaine élection présidentielle.
Quel est l’enjeu aujourd’hui ?
La logique qui a cours depuis le début de la Vème République voudrait que le premier ministre soit issu du bloc arrivé en tête. Mais on est dans une situation totalement inédite. Pendant des décennies on a eu des majorités absolues, puis relatives conséquentes. Aujourd’hui on se trouve face à une tripartition, avec aucun des trois blocs qui soit en situation de gouverner.
J’appelle à une recomposition centrale allant des sociaux-démocrates jusqu’aux Gaullistes, sans l’extrême gauche et l’extrême droite. Mais il ne faut pas d’un rassemblement bancal, qui pencherait d’un côté ou de l’autre. Ce ne peut être non plus Ensemble et LR, ce doit être un rassemblement républicain plus large. Il y aura forcément des désaccords, ce sera un fonctionnement fait de compromis – mais pas de compromissions. La Loi sur la fin de vie peut être un symbole, mais ce fonctionnement ne peut se résumer à seulement un ou deux projets de loi, il doit pouvoir durer au moins deux ans et demi.
La France a déjà dû se rassembler en 1944-1946 pour mettre en place un programme du Conseil national de la Résistance, autour du Général de Gaulle. Une majorité de projets permettrait d’avancer jusqu’en 2027. A chacun de prendre ses responsabilités.
Êtes-vous confiant sur la capacité des forces politiques de notre pays à y parvenir ?
On est aujourd’hui dans un brouillard épais et profond, en incapacité d’avoir une France gouvernable. Pour demain ? Ce que j’ai vu dimanche soir ne me rassure pas, beaucoup d’apparatchiks soucieux de leur petite boutique.
Ce qui m’inquiète le plus – bien que notre pays ait connu des situations bien plus difficiles – est l’absence d’homme ou femme providentiel. Des crises, la France en a surmonté des terribles, mais il y avait des hommes et des femmes de haut niveau, qui ont relevé le pays. Des hommes ou femmes d’Etat susceptibles de rassembler largement, c’est ce qui nous manque le plus.
Je pars à Paris ce mardi (9 juillet – NDLR), le 18 juillet nous élirons le/la président(e) de l’Assemblée Nationale, ensuite nous déterminerons la composition des commissions permanentes. Avant tout cela, il faut que les groupes parlementaires se forment.
Si l’on se fait l’avocat du diable, Emmanuel Macron a-t-il finalement eu raison de dissoudre, puisque son objectif était de clarifier le poids des forces politiques, notamment celui du RN ?
Je ne suis pas convaincu des bienfaits de cette dissolution, présentée comme un acte de clarification, on est aujourd’hui dans un brouillard épais et rien ne s’est éclairci.
Même suppléante, même équipe d’attachés parlementaires, même fonctionnement, même permanence, vous gardez le même cap que les vos précédents mandats ?
Oui tous les jours j’écoute les associations, les citoyens, les élus sur chaque sujet à l’ordre du jour à l’Assemblée Nationale, je suis en contact permanent avec les habitants et les élus de la circonscription. Je prends en compte l’avis de tous, même si la démocratie n’est pas faite que de consensus, mais aussi de dissensus. J’écoute au maximum avant de prendre une décision, en m’appuyant sur le travail de ma suppléante Sabine Gervais et de mes trois attachés parlementaires, qui me font aussi remonter un certain nombre de problématiques locales.
Cela fonctionne très bien ainsi, pas besoin d’un comité Théodule de plus !
Pour clore cette interview, je voudrais témoigner ma grande reconnaissance auprès des habitants de l’île de Ré qui dès le premier tour m’ont largement porté en tête dans les dix communes. Je suis très attaché aux Rétais et à l’île, je continuerai à y être présent et impliqué auprès des élus. Je me réjouis de représenter une telle circonscription, atypique et singulière.
*Olivier Falorni et sa suppléante Sabine Gervais ont recueilli 45,61 % des suffrages exprimés au 1er tour des élections législatives, sur l’ensemble de la circonscription, avec 23 points d’avance sur le RN et 16 points sur le NFP. Sur l’île de Ré, ils ont recueilli 66,46 % des exprimés au 1er tour et 72,62 % des exprimés au second tour.
Un Lionel Quillet très satisfait
Interrogé par Ré à la Hune, le président de la CdC de l’île de Ré, à l’origine de la lettre de soutien au député sortant signée par les dix maires, se dit « très content pour lui et Sabine Gervais, qui ont fait une bonne campagne et enregistrent un score qui – au-delà du front républicain – est lié à l’attitude du député sur le territoire, à nos côtés. Il aime l’île de Ré, il fait preuve d’un état d’esprit apaisé. »
« Au plan national, je pense qu’un centre va se recomposer, autour du centre gauche et centre droit et des Macronistes, après beaucoup de péripéties. Une politique et une gestion parlementaire du compromis doit se mettre en place, ce n’est pas dans la culture politique française. C’est ce que l’on fait en permanence en tant que président de CdC, à notre petit niveau, nous n’avons pas de majorité assurée, nous menons une politique du compromis, ce qui n’est pas simple. »
« Oui on manque sans doute au plan national d’hommes/femmes d’Etat, porteurs de rassemblement et d’un vrai projet, parce qu’ils sont exclus par le système, ce ne sont pas ceux qui se font élire. »
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Vos réactions
J’ai lu avec attention et je constate que oui aux voix du NFP dont celles de LFI comme dans toute la France mais non pour travailler avec LFI : là il y a quelque chose qui n’est paslogique loin s’en faut ! au fait LFI n’est pas à l’extrême gauche mais propose le même programme que le nouveau FP . Je conçois que cela effraie les nantis mais il serait temps que ceuxqui ont beaucoup trop pour vivre partagent ….
Bon week-end à tous : j’aime l’île de Ré !
Bravo Olivier !
Bravo Sabine !
J’espère que l’un des Grands projets de vos mandatures va aboutir…
Mon épouse que vous connaissiez compte sur votre acharnement !
Votre dévoué
Jean Frederic PEZÉ