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Olivier Falorni en soutien de l’île pour le logement
Le Député est intervenu lors des Assises du Logement, nous avons approfondi avec lui les leviers d’action en faveur du logement à l’année entre régulation, incitation, sécurisation et autres outils déjà utilisés pour partie.
Ré à la Hune : le premier des leviers d’action que vous avez évoqué concerne la régulation, en quoi consiste-t-elle ?
Olivier Falorni : Le classement en zone tendue pourrait être une opportunité, une demande en ce sens a été faite au Préfet par le Président de la CdC pour qu’elle soit transmise au Ministère du logement et intégrée au décret ministériel définissant ces zones. Ce classement permettrait notamment la majoration de la Taxe d’Habitation des résidences secondaires, l’instauration d’une taxe sur les logements vacants ou bien encore l’encadrement des loyers. Ces mesures visent à contrecarrer la hausse des prix de l’immobilier mais aussi à jouer sur la quantité de logements disponibles sur le marché.
Une zone tendue est une zone dans laquelle il est difficile de trouver un logement avec une demande supérieure à l’offre qui pousse les prix à la hausse, c’est bien le cas ici. Pour être classée en zone tendue, la zone doit faire partie d’une zone d’urbanisation continue comptant plus de 50 000 habitants. La question du pont est donc la clé car l’Ile de Ré et ses communes sont attenantes à La Rochelle qui constitue bien la zone d’urbanisation nécessaire à la qualification. Il semblerait impromptu de ne pas considérer de continuité entre la commune de La Rochelle et l’Ile de Ré.
Quelle possibilité ouvrira le dernier projet de Loi de Finances, s’il est validé en seconde lecture ?
Intervenu après les Assises rétaises, il ouvre dans son article 9 bis la possibilité pour les communes n’appartenant pas à de telles zones d’urbanisation continue de plus de 50 000 habitants, de mettre en place la taxe annuelle sur les logements vacants, ainsi que la majoration de la taxe d’habitation sur les résidences secondaires.
Ces communes doivent avoir un déséquilibre marqué entre l’offre et la demande de logements, entraînant des difficultés sérieuses d’accès au logement sur l’ensemble du parc résidentiel existant. Elles se caractérisent également par le niveau élevé des loyers, le niveau élevé des prix d’acquisition des logements anciens ou le nombre important de demandes de logement par rapport au nombre d’emménagements annuels dans le parc locatif social.
Elles doivent voter en Conseil Municipal une délibération instituant soit la taxe d’habitation sur les logements vacants, soit la majoration de la taxe d’habitation sur les résidences secondaires et autres locaux meublés non affectés à l’habitation principale (art 1407 ter CG des Impôts) ou bien encore les deux taxes. Le délai pour le vote du Conseil Municipal est prolongé jusqu’au 28 février 2023 (date initiale du 1er octobre 2022).
Si ce texte est validé en seconde lecture, ce serait une très bonne nouvelle pour les communes de l’Ile de Ré.
Comment doit selon vous évoluer l’incitation fiscale ?
Il existe déjà des outils fiscaux qui pourraient être mis en place, d’autres restent à faire évoluer ou à inventer. Un constat existe aujourd’hui avec une taxation moins importante des locations meublées que celles des logements vides. Elle est aujourd’hui plus favorable aux bailleurs qui louent quelques semaines ou mois, souvent par le biais de plateformes, plutôt que pour ceux qui louent à l’année. Il faudrait faire évoluer cette fiscalité des logements vides et meublés, notamment pour les territoires en tension.
On pourrait faire évoluer la loi en prévoyant une taxation moins importante des loueurs en vide avec un abattement de 70% sur les revenus issus de la location vide dans les secteurs en tension.
Les résidences secondaires sont soumises à la Taxe d’Habitation et il serait possible de prévoir un déplafonnement de la TH dans les secteurs en tension. L’expérience anglaise à ce sujet est assez probante avec un montant de la TH qui a été multiplié par 3 ou 4. Dans ce cas, il faudra distinguer les bailleurs qui n’ont qu’une seule résidence secondaire, pour ne pas trop lourdement les fiscaliser, de ceux qui sont des investisseurs.
Cette mesure n’est pas raisonnable en l’état actuel car il faudra faire évoluer la loi et décorréler la Taxe d’Habitation sur les résidences secondaires de la Taxe Foncière sur les Propriétés Bâties. Aujourd’hui, si on augmente la première, il faut accroître la seconde dans la même proportion, ce qui accentue la difficulté d’accès au logement. J’ai interpellé le Ministre des Comptes Publics le 27 septembre avec une question écrite alertant sur le frein que constituait cette mesure prise lors de la loi de finances 2020 en imposant d’augmenter dans la même proportion la TFPB et la TH en lui demandant de les décorréler lors du projet de loi de finances 2023.
La taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFPB) s’applique aux propriétaires ou usufruitiers de terrains non bâtis afin de lutter contre la rétention d’offre foncière et le manque d’offre de logements. Cette taxe n’est pas réduite aux seules zones tendues. Pour éviter les phénomènes d’achat/revente des marchands de bien non déclarés, il serait bon de limiter le nombre de cessions de résidence principale pour éviter les flambées des prix sur les secteurs tendus. Cela pourrait par exemple prendre la forme d’une limite d’une cession de résidence principale (avec aucun impôt sur la plus-value) tous les 10 ans en France, et tous les 15 ans en zone tendue.
Des incitations fiscales pourraient être aussi prises pour les propriétaires qui font des locations aux saisonniers ou à l’année avec un abattement spécifique de la TFNB pris par les communes ou bien une prime de la CdC pour ces bailleurs.
Il faudra sans doute créer une « cellule » de contrôle pour les résidences secondaires pour éviter les locations non déclarées, les marchands de sommeil, les transformations de garage en studio sans déclaration, tout en gardant une réelle vigilance sur les problématiques de stationnement qui rendent parfois la vie des Rétais difficile.
La sécurisation des bailleurs est à vos yeux indispensable…
Il faut redonner confiance aux bailleurs pour louer à l’année et sécuriser les rapports locatifs. Je souhaite proposer une loi pour rétablir un équilibre entre les droits des bailleurs et ceux des locataires, en facilitant l’expulsion des squatteurs et des locataires qui sont en situation d’impayés, tout en leur garantissant d’avoir une proposition d’hébergement ou de logement accompagné à leur sortie. Il ne doit pas y avoir de gens à la rue qui ne le souhaitent pas dans un pays comme la France mais nous ne pouvons laisser cette loi totalement déséquilibrée perdurer car elle incite à la location de courte durée et ne rassure pas les bailleurs.
Les systèmes de garanties des loyers doivent également être revus pour s’appliquer au plus grand nombre et non les exclure comme c’est le cas actuellement (exemple de la GLI). Les dispositifs de garantie existants sont la VISALE et la GLI (Garantie des Loyers Impayés) (lire encadré).
Quelles sont les autres actions à déployer en faveur du logement ?
Avoir une maîtrise maximale du foncier pour continuer à développer le logement social. Je salue les efforts faits ces dernières années pour développer le parc social sur l’île de Ré et il faut continuer car les demandes légitimes et non satisfaites sont nombreuses, je le vois au quotidien à ma permanence parlementaire.
Il faut aussi continuer à développer le Bail Réel Solidaire avec les Organismes de Foncier Solidaire. Ce dispositif permet de dissocier le foncier du bâti pour faire baisser le prix des logements. Les acquéreurs ne supportent ainsi que le coût de la construction et ils sont locataires du foncier sur une durée plus longue avec la possibilité par la suite de racheter la parcelle. Cette expérience a déjà pu se réaliser dans une des communes de l’Ile (La Flotte, NDLR), d’autres sont en projet, je les encourage à continuer à développer cette offre favorable aux ménages aux revenus médians.
Relancer éventuellement une OPAH peut s’avérer intéressant. Cette opportunité sera à étudier avec les services de l’Etat (ANAH). Si la CdC vient soutenir une telle démarche elle a toutes les chances de retenir l’attention des propriétaires bailleurs et occupants et ainsi améliorer la qualité de l’habitat, tout en permettant de mettre sur le marché des logements supplémentaires avec des loyers plafonnés.
La problématique du logement des saisonniers est devenue très prégnante aussi..
Elle ne pourra être résolue sans une volonté et une action collective des communes, de l’intercommunalité et des employeurs, avec le soutien des bailleurs privés et publics.
Certains employeurs ont déjà appréhendé cette problématique depuis de nombreuses années dans l’ile et on ne peut que les féliciter. Il faudra construire un panel de solutions à destination de ces travailleurs saisonniers, que ce soit en labellisant des places au sein des campings, en conventionnant avec la Résidence Habitat Jeunes de Lagord, en mobilisant peut-être l’internat du collège avec un gestionnaire pour la période estivale, ou bien encore en instituant un collectif de bailleurs prêts à proposer des logements pour ces publics en les incitant fiscalement à le faire et par le biais de primes à la location.
Les dispositifs de garantie VISALE et GLI :
La première est mal connue et ne vise que certains publics salariés du privé et les moins de 30 ans. La promotion n’est pas suffisamment accompagnée auprès des bailleurs. La seconde garantit globalement ceux qui n’en ont pas besoin, qui gagnent trois fois le montant du loyer et qui sont en CDI. Mais quid des travailleurs précaires, des femmes seules avec enfants (parfois couverts par des Fonds de Solidarité Logement qui font peur aux bailleurs privés), des bénéficiaires des minima sociaux ?
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