- Environnement & Patrimoine
- Bacs à marée
N’en jetons plus, la mer est pleine…
Depuis le 19 décembre, de grosses boîtes nommées Bacs à Marée sont installées à l’entrée des plages les plus fréquentées de La Couarde.
En service de septembre à mai, intense période d’échouages en tous genres, ils sont à la disposition des promeneurs soucieux de la propreté des lieux. Unique village rétais à proposer de tels Bacs à Marée La Couarde en possède trois : un aux Anneries, l’autre au Peu Ragot et le troisième aux Prises.
Bim !
On doit cette excellente et utile initiative à Fabrice Faurre, gérant de la société coopérative Taho’e Eco- Organisation dont l’un des objectifs est, grâce au programme Trait Bleu, de connaître et quantifier la pollution de notre littoral pour mieux la combattre. Le nettoyage des plages est une lutte incessante qui se joue à chaque marée. Si l’on voit quelques détritus marins dans les poubelles communales, trop de promeneurs semblent rester indifférents aux déchets, allant jusqu’à écraser leurs cigarettes dans le sable tout en s’extasiant sur la beauté du soleil couchant sur l’océan ! Pour rappel, un seul mégot et les quatre mille produits chimiques hautement toxiques qu’il contient suffisent à polluer cinq cents litres d’eau. Une réelle prise de conscience collective s’impose. Il faut que fasse « Bim ! » le déchet, dans l’oeil du visiteur en balade et dans celui du marcheur local. Vous, moi, nous sommes tous concernés et pour certains, consternés par l’état sanitaire de la planète.
BàM !
D’aspect rudimentaire, le bac à marée n’est pas un banal coffre en bois brut destiné à recueillir les déchets côtiers. Doté d’un QR code (de l’anglais Quick Response, réponse rapide) il permet au ramasseur connecté de s’inscrire sur l’appli afin de les localiser, de signaler leur plein niveau de remplissage ou leur état (bien que robuste, il peut se détériorer) mais aussi d’avertir en cas d’échouage animal ou d’évènement inhabituel. L’application du Citoyen Connecté donne la possibilité à toute personne inscrite d’être avertie de l’arrivée d’une tempête pour se déployer après au mieux sur les lieux de collecte. Inutile d’avoir un téléphone dernier cri pour agir, seules une paire de gants et une dose de bonne volonté sont nécessaires pour bien faire !
Un panneau explicatif vissé sur le bac indique quels sont les détritus bienvenus et les indésirables. Il rappelle que la laisse de mer (algues, bois flottés, gorgones…) ne se jette pas, précieux abri et source de nourriture de la faune océanique. Rien n’égale la main de l’homme qui, contrairement au prélèvement mécanique, sait être sélective. Une fois le bac plein, c’est au tour des entreprises d’insertion de le vider, d’en estimer le volume, de trier et peser les déchets. Le 13 mars, Fabrice, fondateur de TEO et deux étudiants se sont chargés de cette tâche.
Boum !
Terrible. Le bilan résonne comme une détonation. Après trois mois d’utilisation des trois bacs couardais, 460 kg de déchets ont été stockés, dont 66 valorisables, soit environ 14%. Parmi ces 66 kg, on trouve 27 kg de verre, 16 kg de plastique, 13 de métal et 10 de bois. En un mois de ramassage, il a été prélevé 33 kg aux Anneries, 166 au Peu Ragot et 61 aux Prises. 260 kg d’immondices au total dont 17% recyclables. N’en déplaise au Martinais Ernest Cognacq créateur de l’illustre magasin, dans l’océan c’est comme à La Samaritaine, on trouve tout : boîtes de soda espagnol et de fromage turc, déodorants fraîcheur marine ou aux extraits océaniques, chaussures, balai, cartouche d’imprimante, matériel en grand nombre des travailleurs maritimes, paraffine industrielle utilisée pour décrasser les cuves des navires citernes… Un inventaire à la Prévert qu’on pourrait fredonner sur l’air de La Complainte Du Progrès si l’on avait encore le coeur à chanter devant tant de diversité.
Navigateur au long cours, Fabrice a fait le tour du monde à la voile avec femme et enfants sur un catamaran fabriqué par ses soins. Il n’a pas appelé sa société Taho’e par hasard. En tahitien, cela veut dire « On est ensemble ». Citoyens. Entreprises de réinsertion. Associations qui peuvent décider librement d’organiser un ramassage sans autorisation préalable, puisque s’il y a BàM TEO, collecte et suivi ultérieur seront forcément assurés. Professionnels de la mer à qui est redistribué le matériel réutilisable. Communes, collectivités du département, Région, toutes attentives à offrir un écosystème de qualité, atout touristique majeur. Entreprises et fondations privées contribuant aux démarrage et développement du dispositif Trait Bleu. La préservation de l’environnement est l’affaire de tous. Même infime, chaque geste compte !
« TEO n’est pas un bureau d’études « y’a plus qu’à, il faut qu’on » ! On essaie de trouver une solution à proposer aux collectivités. On cherche à diminuer les coûts de gestion de déchets. On a bien perçu quels étaient les besoins des professionnels. On travaille la mise en place d’une plateforme de valorisation des déchets du monde de la conchyliculture et de la pêche.
La grosse erreur avec le plastique, c’est l’usage unique, alors que beaucoup de produits pourraient être consignés et remis dans le circuit vertueux de l’économie circulaire. Jamais, on aurait dû tolérer le plastique jetable. C’est une aberration réalisée par les lobbies industriels avides d’argent que les politiques n’ont pas freinés. S’il y avait eu une responsabilité environnementale des producteurs au départ, les communes auraient eu moins de difficultés à traiter les ordures. Pour moi, on culpabilise trop le citoyen. On lui fait payer par ses impôts la gestion des déchets alors que ce sont les industriels qui les produisent !
TEO, ce sont trente-huit bacs à marée répartis depuis septembre 2018 sur quinze communes et trois Communautés d’agglomération qui donnent une vision globale à l’échelle du département. Notre idée est de garder la mémoire des déchets pour en faire un indicateur de pollution. Les bacs permettent de la mesurer et de sensibiliser au recyclage » explique Fabrice.
Actuellement touchés par les centaines d’échouages de cétacés sur le littoral Atlantique, inquiets par la dérive de nappes d’hydrocarbures au large de nos côtes, il est impératif de se rendre compte de l’ampleur des dégâts et de l’impact néfaste quotidien de nos déchets sur le vivant. Abandonnés en ville ou à la montagne, ils reviendront inexorablement dans les océans. Chaque jour plus nombreux, ils mutilent et tuent faune et flore. Ignoré, le macro-déchet cuit par le sel et le soleil, fragmenté par les vagues et les vents, roulé avec les galets à chaque marée, devient micro-déchet pour finir en nanoparticules invisibles à l’oeil nu. Des régions polaires à l’équateur, à la surface de l’eau ou dans les profondeurs abyssales, grands ou petits, disséminés ou regroupés en vortex, ils sont omniprésents, jusque dans la fosse des Mariannes, la plus profonde de l’océan.
Parce que la mer n’est pas une poubelle… Parce que la plage n’est pas une décharge… Ne restons pas inertes ! Agissons !
SCIC TEO-TAHO’E
Eco-Organisation
Workingshare – 15 rue Alfred
Kastler – 17000 La Rochelle
06 17 70 54 39
www.teolarochelle.org
Les bacs à marée provisoirement enlevés En prévision de l’éventuelle arrivée de nappes d’hydrocarbures, la société coopérative TEO, en collaboration avec les quinze communes partenaires du réseau des bacs à marée déployés sur le littoral de la Charente-Maritime, les retire pour une période indéterminée. Ceci en prévision du possible risque d’une pollution toxique et agressive pour la peau des promeneurs qui participent depuis plusieurs mois aux collectages volontaires des déchets plastiques échoués sur les plages.
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