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« Nager vers les rives de terres inconnues »
« Nager », récit initiatique et poétique, suggère comment de la nature et de la réalité de la vie naît l’imaginaire de l’artiste Richard Texier.
Peintre et sculpteur de renommée internationale, Richard Texier ne s’était pas jusqu’ici essayé à l’écriture. D’une monographie initiale prévue de quelques pages sa plume s’est emballée sur 220 pages, fluides et denses tout à la fois, à l’image de l’océan présent en filigrane de la 1ère à la dernière page.
L’imaginaire justement se forge dès l’enfance, dans les marais poitevins : « je parvenais à me fondre dans le souffle invisible de mon marais. C’était ma terre d’élection, mon territoire premier…Ma relation au monde s’était construite entre ces eaux dormantes et les embruns de la côte sauvage, entre marais et océan ».
Ses « premières impressions océaniques » aux Sables d’Olonne et les bains du matin, « expérience émotionnelle la plus forte que j’avais ressentie jusque-là » le marquent tout aussi profondément : « L’océan est pour moi l’évènement fondateur, le point zéro du contact avec la matrice ; vacciné aux embruns, le jeune enfant ne l’oubliera jamais. Adulte il y reviendra encore et toujours, jusqu’au terme de sa vie. La lisière océanique est une grande machine à ouvrir les sens, à augmenter les sensations, la perception de l’espace ».
« Durant ces premiers étés, je sentais une trame se construire en moi, une envie impérieuse de me saisir du dispositif que la vie m’offrait ; un théâtre de jeux bien plus vaste que le club Mickey où je me rendais chaque matin pour apprendre à nager. C’est bien de cela qu’il s’agissait. Nager. Comment ? Vers où ? »
Faisant sienne la phrase de Matisse « Toute ma vie, j’ai essayé de dire la fraîche beauté du monde », tout est chaque jour prétexte à sensation, imagination, et création pour l’artiste…
L’ autre grande « Révélation » pour Richard Texier naît entre les folios 352 et 353 du tome du XXè siècle du pédagogique « Lagarde et Michard », et la découverte de l’œuvre de Tanguy « Jour de lenteur ». Celle-ci a « changé ma vie, orienté radicalement mon destin… C’est à ce moment-là que je suis devenu peintre… J’avais trouvé, sans le vouloir, le point de départ de ma vie. »
L’initiateur-accompagnateur fut Michel Chenilleau, « un artiste local, modeste et talentueux », « patient et attentif à mes progrès »… avec et grâce à qui la passion des débuts se transforma en « ferveur » puis en « frénésie » créatrice.
La découverte puis l’acquisition d’une « fragile cabane sur pilotis », un carrelet, du côté d’Aytré offre à Richard Texier un point d’observation exceptionnel de l’estran et de l’océan mais lui ouvre aussi la porte à des « moments de sensualité maritime, suspendus entre ciel et mer » qui « enchantent mon cœur et mon esprit ». Expression d’un art de vivre atlantique ces carrelets permettent à chacun d’y « régler librement son sentiment de l’espace… c’est de l’art brut…. L’expression du génie populaire. Ces cabanes offrent le lieu privilégié pour retourner en enfance et déployer sa version personnelle du bonheur d’exister ».
« Les marges océaniques appellent le monde ouvert et font ressentir la fragilité de notre condition humaine… ».
Certaines réflexions subtiles sur l’art, notamment en fin d’ouvrage, un peu plus inaccessibles à des non-initiés, ne parviennent pas à gommer l’impression d’ « empathie » qui se dégage de « Nager », cette empathie qui « dépasse en tout l’intelligence analytique, tellement valorisée dans nos sociétés occidentales et pourtant si infime à trouver les chemins du cœur, de l’émotion, du partage et de l’instinct de survie. Ressentir l’autre comme nous-même est un salut »…
« Nager » chez Gallimard – 19 €
Voir le bilan de l’Île aux Livres 2015
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