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MAT-Ré : une AG riche de contenu
Le samedi 29 octobre dernier, dans la salle des fêtes de La Flotte, prêtée pour l’occasion par Léon Gendre, se tenait l’Assemblée Générale de l’association MAT-Ré (Mer, Air, Terre – Ré). Au programme le bilan (chargé) de l’année 2015 et les perspectives, tout cela autour de sujets sensibles qui nous concernent tous.
Le dossier Eqiom
C’est un peu l’histoire de David et Goliath. D’un côté MAT-Ré, de l’autre un groupe industriel (le suisse Holcim devenu Laffarge-Holcim lui-même devenu l’irlandais Eqiom) qui pèse quelques 50 milliards d’euros. L’objet du combat : la cimenterie implantée dans le Port de La Pallice, visible de la plage de Sablanceaux – et si ce n’était que cela, ce serait un moindre mal. Au milieu ? Les populations, en l’occurrence celle de l’Ile de Ré et de La Rochelle. A première vue, tout est joué d’avance. Oui mais voilà, David (MAT-Ré) a relevé le défi par la seule force de conviction de son Conseil d’Administration et de ses adhérents : combattre Goliath (Equiom) et les hautes tours de la cimenterie, vouées à rejeter dans l’atmosphère et après filtration, plus de 50 tonnes annuelles de poussières et microparticules classées dans les substances officiellement « préoccupantes ». 50 tonnes, c’est beaucoup. Et quelques-uns des éléments en question donnent la chair de poule. Il faut ajouter à cela les inévitables dommages collatéraux sur les zones marines proches mais aussi l’économie et bien sûr le bien-être des habitants. L’histoire de ce combat est dense et complexe. Clairement, le citoyen lambda a toutes les raisons d’y perdre son latin, et il ne mènerait pas à grand-chose d’en reprendre le déroulement dans les détails. L’affaire suit son cours et foi de MAT-Ré, la lutte n’est vraiment pas terminée ! Mais quand même : entre données techniques et études aux résultats troublants, autorisation d’exploitation donnée puis annulée puis finalement redonnée, sous-informations des populations, documents administratifs obligatoires introuvables, coup bas pour ne pas dire tordus et pressions en tous genres, il ne manque à cette affaire aucun des ingrédients d’un excellent thriller industrialo-politico financier dont nous savons bien que les meilleurs sont généralement tirés d’histoires vraies.
En tout état de cause, et tout en préservant le devoir de neutralité qui incombe à notre profession, il paraît légitime de prêter une oreille (attentive) à l’ensemble des données de cet énorme dossier, et à témoigner (au minimum) du respect à une association (David/ MAT-Ré) qui, malgré les embûches, n’est pas du tout disposée à baisser les bras. Après tout, Goliath a déjà perdu deux tours (puisque quatre étaient initialement prévues) ! Particulièrement pugnace, Le Président Frédéric Jacq et son Conseil d’Administration ont obtenu un quitus à l’unanimité tant sur le rapport moral que financier de l’année 2015. Et même l’adhésion quant à un éventuel nouveau recours, ce qui suppose quand même de mettre la main à la poche. Affaire à suivre donc…
MAT-Ré sur tous les fronts
Alors certes, la cimenterie est un gros, très gros dossier. Mais il n’est, hélas, pas le seul. Dans le viseur de MAT-Ré, on trouve également le GPM (Grand Port Maritime de La Rochelle).
Le port de commerce est devenu le grand port maritime, en fait un complexe industrialo-portuaire (CIPRé) dont il est prévu que le tonnage double (dans un premier temps). Bien visible, la cimenterie n’est que la surface immergée d’un iceberg. Il faut y ajouter d’autres sociétés aux activités elles-aussi « préoccupantes » :
Traitement des sédiments
Proximité du Parc Naturel Marin oblige, les boues ne pourront bientôt plus être rejetées en mer, au Lavardin. Pour traiter les vases du canal de Marans, du port des Minimes, de la baie de La Rochelle et celles du GPM notamment, il est donc prévu la création d’un centre de traitement des sédiments. Où ? Sur un terrain en cours de remblaiement à La Repentie, soit au pied du pont. Le menu : une station d’épuration dont la taille est apparemment insuffisante pour les 500 000 tonnes annuelles de rejets prévues. Ajoutons à cela que la zone est inondable et sismique, que le risque de pollution du milieu marin est réel ainsi que celui de l’infiltration des sols, sans oublier les nuisances apportées par la décomposition des matières organiques exposées à ciel ouvert. Voilà le tableau, peu ragoûtant, convenons-en. Lors de l’enquête publique (aujourd’hui close), MAT-Ré a, on s’en doute, émis un avis défavorable, au contraire de la commune de Rivedoux qui a délibéré favorablement sur le sujet.
Stock de déchets métalliques
Il concerne la société Atlantic Métal. Notons simplement sur le sujet que le traitement desdits déchets nécessite l’existence sur le site de portiques de détection de radioactivité. Est-il besoin d’en dire plus ?
Biodiesel sur site Seveso
ENVIROCAT, c’est son nom, fabrique le 1er méthylate de sodium européen sans mercure dans le cadre de son activité pour le biodiesel. Ce qui est nouveau, c’est l’absence de mercure. ENVIROCAT se targue donc de pratiquer une chimie respectueuse de l’environnement. Acceptons-en l’augure. Mais, elle exerce néanmoins son activité sur un site auparavant classé SEVESO, et subitement déclassé. Vraisemblablement en raison de ce « respect de l’environnement ». Gardons quand même à l’esprit que, du fait de ce déclassement, le niveau de sécurité s’en trouve amoindri d’autant.
Refermons les portes du GPM avec l’inauguration des nouveaux silos dit « bord à bord » qui a vu la présence d’élus et de personnalités, et la perspective d’un binôme portuaire Bordeaux-La Rochelle. Un objectif de la région Nouvelle Aquitaine et pour lequel des recommandations ont été publiées dans un rapport parlementaire datant de juillet 2016. Précisons également qu’un spécialiste en aménagement du territoire a émis un avis défavorable sur le GPM dans son ensemble, en raison des (trop) nombreuses faiblesses d’un projet à proximité immédiate d’habitations, d’activités touristiques et d’une Zone Natura 2000. Et là encore est à déplorer le manque d’information donnée aux populations. Sur ce dossier, MAT-Ré n’est pas seule et c’est important : quatre autres associations dont Ré Nature Environnement et Nature Environnement 17 (pour ne citer qu’elles) sont mobilisées sur le sujet. En la personne de Michel Lardeux, entré au Conseil d’Administration, MAT-Ré confirme un engagement sans faille, ainsi que pour tout ce qui relève de l’élaboration du PLUI rhétais. L’AG s’achève sur l’intervention passionnante de Pascal Lacoste, navigateur professionnel qui nous en apprend long sur les vents soufflant dans les pertuis.
Alors que conclure de tout cela ? Sans être paranoïaque ni cultiver le « on nous cache tout, on nous dit rien », restons néanmoins lucides : pendant que nous vaquons à nos petites affaires, d’autres (bien plus grandes) se décident sans nous. Et, entre opacité et revirements, leur cheminement pose parfois question. C’est le cas ici. Soyons-en conscients, à un certain niveau notre destin nous échappe. Nous le remettons entre les mains de simples mortels pour lesquels nous votons, à qui nous confions la lourde charge de gérer les affaires de nos cités. Pour le meilleur… Ou pour le pire. Ainsi va le monde. Mais le moins que nous puissions faire en tant que citoyens est de rester vigilants et d’aller chercher, s’il le faut, des informations auprès de ceux qui veulent bien nous en donner
Plus d’infos sur MAT-Ré Infos paru le 15 octobre 2016 et sur http://nub71.com
La Cimenterie en chiffres
Situation géographique : Port de commerce à moins de 500m des habitations de La Pallice et à 1 600m de Rivedoux ;
Capacité de production cimentière prévue : 1,3 millions de tonnes par an
Fonctionnement : 24H/24, 365 jours/365
Estimation de la consommation d’eau : 70 000m3
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