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L’ostréiculture est-elle en danger ?
Ils sont les guerriers d’une autre première ligne, les premiers maillons d’une chaîne qui participe à l’attractivité et à la vie du territoire.
Les acteurs des activités primaires sont en difficulté, notamment ceux de la filière conchylicole. D’autant que les problèmes ont commencé avant l’arrivée du Covid-19 sur l’hexagone. « A Noël avec une pathologie », ainsi que nous l’explique Frédéric Voisin, des établissements éponymes. Ensuite c’est « la perte des exportations du Nouvel An chinois dans un pays alors en plein confinement et enfin les conséquences de la crise sanitaire hexagonale ». Le décor est planté.
Absence de visibilité
Sébastien Réglin n’a pas « perdu de temps pour mettre en place la livraison à domicile », se félicite Emmanuelle, responsable commerciale de La Cabane océane. Malgré cette heureuse initiative, le chiffre d’affaires est en berne. « C’est minable ce qu’on fait », expose franchement Emmanuelle, estimant l’activité à environ 10% de son potentiel habituel. Bien sûr les bancs des marchés de La Rochelle et de La Flotte sont opérationnels, du moins aux jours d’ouverture et avec un nombre de clients évidemment fortement réduit.
Le Bar à huîtres qui devait normalement ouvrir début mars est bien sûr fermé et surtout, à cette période de l’année, La Cabane océane tire ses ressources principales de la fourniture d’huîtres aux restaurants. « Pour le coup, on ne sait rien », déplore Emmanuelle, « le flou et la dépendance vis-à-vis de leur réouverture demeurent entiers ».
Pour autant, impossible d’en vouloir à qui que ce soit face à une crise d’une telle ampleur. « Il va falloir vivre avec et revoir nos méthodes de fonctionnement » explique Emmanuelle. Quand les restaurants et donc le Bar à huîtres rouvriront-ils, et la vente directe pourra-t-elle reprendre à plein régime, masques et gel à l’appui ? Autant de questions majeures dont les réponses sont pour le moment en suspens. Alors oui c’est sûr, le danger plane sur la profession.
Tenir en pleine tempête
De l’autre côté de l’île, sur cette somptueuse Pointe du Grouin, Frédéric Voisin fait le gros dos. Pour ouvrir son espace de dégustation l’année dernière, il a fait des investissements qui pèsent lourd. « Mais pour le moment, je ne m’en sors pas trop mal » reconnaît le producteur exploitant qui a décidé de mettre à profit cette période pour développer l’expédition, notamment auprès de groupements. « Une opportunité qu’il était indispensable de saisir avec un chiffre d’affaires amputé de moitié », explique-t-il. Il faut dire que les huîtres (bio rappelons-le) de Frédéric Voisin font habituellement le bonheur de certaines grandes tables de la gastronomie à Paris et Tours notamment. « Le Bio est dans l’air du temps. C’est une vraie valeur ajoutée », ajoute Frédéric.
Si le développement d’un réseau de distribution alternatif est bien perçu par les clients sollicités, sa démarche intervient en fin de saison de consommation des huîtres. « Elles vont devenir plus laiteuses et ne sont alors pas du goût de tout le monde », explique-t-il. Alors Frédéric Voisin espère en la réouverture des points de dégustation puisqu’ici, nous mangeons des huîtres toute l’année.
En attendant, il travaille, assure la vente à la cabane, livre sur Ré et La Rochelle à quelques clients pro qui continuent et travaille deux fois plus puisqu’en temps normal, il s’assure le soutien de quelques intérimaires, suspendu compte tenu des circonstances.
« La crise développe de nouveaux comportements », note l’ostréiculteur. Concernant les ventes groupées, permettant de substantielles économies en coûts de distribution, « un maillage est en train de se constituer avec la mise en place de points relais. Une bonne chose. Il y aussi l’accélération du digital, du paiement à distance ou sans contact » continue Frédéric.
Autre élément d’importance, le travail collectif mené avec le Comité régional conchylicole, structure professionnelle obligatoire qui bénéficie de six élus sur l’Ile de Ré, dont Frédéric Voisin et Sébastien Réglin (évoqué plus haut), eux-mêmes étant aussi membres du bureau. « Il y a un vrai travail engagé pour soutenir la filière » affirme Frédéric Voisin, « et des relations directes établies avec l’Etat et les structures de la restauration ». Il n’en dira pas plus mais évoque de manière sibylline le montage d’une belle opération en cours.
S’il se déclare très inquiet pour les générations futures, Frédéric Voisin reste malgré tout optimiste et ce grâce à l’Ile de Ré elle-même, « un territoire privilégié qui bénéficie d’une clientèle et d’un tourisme de qualité », affirme-t-il. N’en déplaise à certains, Frédéric Voisin est un Rétais heureux de voir arriver les touristes et parmi eux les Parisiens « essentiels à la vie du territoire », martèle l’ostréiculteur choqué de certaines attitudes vues dernièrement. Voilà c’est dit. Tout comme il tient à le dire aussi : « sa profession est totalement solidaire des restaurateurs ».
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