Les déchets vampirisent les débats budgétaires de la Communauté de Communes
Le Conseil communautaire du 31 mars dernier était consacré essentiellement au vote du Budget 2022, composé du budget principal et de quatre budgets annexes : Déchets, écotaxe, cinéma-spectacle et Zone d’activité économique (ZAE). Ainsi que le vote des taux d’imposition 2022, du produit GEMAPI et de la TEOM (taxe d’enlèvement des ordures ménagères).
La population de référence pour la comptabilité publique est de 17 655 habitants et 13 612 résidences secondaires.
Le résultat 2021 du budget principal a été affecté en réserve d’investissement pour 2,3 M€ et en report de fonctionnement pour 88 890 €.
Fiscalité constante et Taxe GEMAPI
Lionel Quillet a rappelé que les impôts du budget principal n’ont jamais été augmentés depuis quatorze ans : « On garde un vrai dynamisme, avec un bon niveau de recettes, et l’on est une des seules collectivités à ne pas augmenter la fiscalité. La taxe de séjour au forfait a eu l’avantage de faire sortir du bois certains loueurs, le passage au réel a généré une augmentation importante des recettes » a expliqué le Président. De fait la taxe de séjour est passée de 2,2 M€ au précédent budget à 2,7 M€ au budget primitif 2022.
Il est aussi revenu sur les investissements considérables de 80 M€ réalisés depuis 2008 et le plan Digues à 100 M€ dont 20M€ pour l’île de Ré. Si la taxe GEMAPI est dédiée à la protection des côtes et milieux aquatiques, elle ne couvre pas toutes les dépenses en la matière.
La Capacité d’autofinancement (CAF) de 2,5M€ et l’endettement faible (5,5 ans pour rembourser la dette, pas de nouvel emprunt depuis 2017) « témoignent d’une bonne gestion et permettent d’envisager une dynamique forte pour 2022. »
Le président a proposé que pour la 14e année consécutive le taux de la taxe foncière ne soit pas modifié, ce qui a été voté à l’unanimité, sans abstention. Taxe affectée et plafonnée à 40 € par habitant (pour le calcul de son montant global, ce n’est pas ce que paie chaque habitant, la taxe étant calculée sur des bases foncières), la taxe GEMAPI représente un montant total maximal autorisé de 1 258 400 € (40 € X 31 460 habitants en 2021), selon la population prise en compte pour le calcul de la Dotation Globale de Fonctionnement (DGF). Le produit de cette imposition est exclusivement affecté au financement des charges de fonctionnement et d’investissement pour la défense des côtes. Or les prévisions budgétaires concernant l’exercice de cette compétence s’élèvent à 1 941 750 €. Le produit de la taxe GEMAPI a ainsi été voté à l’unanimité au montant maximal, il ne couvre pas l’intégralité des dépenses GEMAPI.
Budget des déchets : pas d’illégalité, un choix politique
Les choses se sont corsées quand il s’est agi de voter la TEOM (taxe d’enlèvement des ordures ménagères). Le président a rappelé en préambule la démarche inadmissible à ses yeux de l’ACNIR (Association des contribuables du Nord de l’île de Ré) qui a envoyé le 15 mars une lettre recommandée à tous les délégués communautaires, les invitant à s’abstenir ou à voter contre le budget primitif 2022 du budget annexe « Déchets » et du budget général, lettre à laquelle était jointe copie d’un courrier de Maître Pielberg, avocat de l’ACNIR, adressée au président de la CdC. « Quand une association intime l’ordre à des élus, par écrit, de s’abstenir ou de voter contre, alors elle est politisée. Cela ne s’était jamais vu de la part d’une association Loi 1901. Celle-ci donne un ordre, profère des menaces, envoie un courrier recommandé en y joignant une lettre de son avocat à tous les délégués communautaires, ce sont des manoeuvres d’intimidation. Cette association est montée au créneau quelques mois avant les élections départementales, regardez ses membres, vous comprendrez. Une réponse lui a été apportée par nos services de la CdC, par un avocat, par la Chambre Régionale des Comptes, qui a opéré un contrôle sur les comptes de 2015 à 2019 et à laquelle les réponses ont été apportées par les vice-présidents Patrick Rayton et Jean-Paul Héraudeau et par moi-même. Dans son rapport de septembre 2021, la CRC fait des recommandations, notamment sur la création d’un budget annexe pour la gestion des déchets, ce qui a déjà été fait au printemps 2021 par la CdC. Elle ne relève pas d’illégalité, contrairement à ce qui a été martelé pendant la campagne des élections départementales par l’ACNIR, puis par les candidats Patrice Raffarin et Véronique Richez-Lerouge. »
« Il y a une action politique derrière tout cela »
La Chambre Régionale des Comptes a redit sa position dans un courrier daté du 1er décembre 2021 et adressé à l’ACNIR, en réponse à des mail et courrier de celle-ci en octobre et novembre 2021. La CRC écrit noir sur blanc : « Le Code général des collectivités territoriales n’impose… aucune obligation d’inscrire… les excédents générés par la gestion antérieure du service dans le cadre d’un budget principal ». Il précise aussi que rien non plus ne l’interdit. La Chambre précise qu’ « elle a pris acte de la décision de la CdC de créer un budget annexe de déchets, qui améliore la visibilité de la politique afférente aux déchets… ».
« Il n’y a aucune obligation de reporter les excédents. Cela n’est donc pas illégal et relève d’un choix politique » a ainsi expliqué Lionel Quillet. Qui s’offusque que – au-delà de la méthode d’intimidation employée – dans son courrier à la CdC, diffusé avec la lettre de l’ACNIR à tous les délégués communautaires, l’avocat de l’ACNIR, Maître Hervé Pielberg, évoque encore une illégalité. « Certains délégués communautaires ont pu être déstabilisés par ce courrier, on va regarder avec nos avocats ce que l’on va faire, il est clair qu’il y a une action politique derrière tout cela et que des membres de l’ACNIR sont des extrêmes politiquement. Que cette association aille au bout de sa logique et saisisse le juge, elle ne le fait pas parce qu’elle sait bien que la position de celui-ci ne lui sera pas favorable.» « Votez contre si vous le souhaitez, mais pas sur l’argument de l’ACNIR. Les Députés se sont eux aussi opposés à ce type de démarche, essayez de garder ce cap. »
Patrick Salez, élu minoritaire de La Flotte, est intervenu pour dire que « cette lettre m’incite/m’invite à voter contre, elle ne me donne pas d’ordre. » Il estime que la TEOM est surdimensionnée et que sa baisse est insuffisante. Didier Guyon, élu minoritaire de Sainte-Marie, a tenu à préciser que sa position était indépendante de ce courrier, que la CRC avait bien écrit qu’il n’y avait pas d’obligation à reporter les excédents, mais qu’il n’est pas impossible de le faire.
Anne Pawlak, élue de Sainte-Marie, a de son côté rappelé la signification précise du mot « inciter » : « Pousser vivement quelqu’un à quelque chose » (Larousse).
Baisse à 4 reprises de la TEOM
« Depuis mon premier mandat nous avons baissé à quatre reprises la TEOM, passée de 16,68 % en 2011 à 16 % en 2012, 15,5 % en 2013, 14,3 % en 2021 et aujourd’hui je vous propose de la baisser à 13,9 % pour 2022 », a rappelé Lionel Quillet, « on essaie de cadrer les dépenses réelles, on a de gros investissements à venir, si on la baisse trop il faudra la remonter, dans ce cas-là j’espère que ceux qui demandent aujourd’hui une baisse plus importante seront à mes côtés dans un an s’il faut remonter la taxe, je préfère éviter le yoyo ». « Oui je serai à vos côtés dans un tel cas » a affirmé Didier Guyon, estimant cette baisse de 0,4 point insuffisante au regard de la précédente baisse de 1,2 point. « Il faut aller plus loin, symboliquement, on demande un effort à la population pour réduire le volume de ses déchets, il faut l’encourager. »
Patrick Salez estime aussi que « ce taux est manifestement disproportionné, on n’a pas transféré les excédents, on doit continuer de baisser progressivement cette taxe, on reste au-dessus de Noirmoutier. »
Lionel Quillet a argumenté sur le fait que « si l’on veut baisser davantage la taxe tout en ayant un service plus efficace, cela passe obligatoirement par le fait d’imposer au citoyen de consommer moins et trier davantage. Peut-être que le service est trop important aussi, que l’on a trop de déchetteries ».
Taux de TEOM à 13,9 % : 18 pour, 9 contre
Jean-Paul Héraudeau, Maire de La Flotte, a confirmé qu’il n’y avait pas d’obligation ni d’illégalité, qu’il s’agissait bien d’un choix politique. « Ce qui me dérange est une volonté de financer par une taxe quelque chose qui n’est pas financé par un impôt, il y a une procédure en cours, cela peut conduire le juge qui traitera celle-ci à conclure à une illégalité, mais aujourd’hui on n’est pas là pour en discuter. » Il a aussi tenu à rappeler tout le travail qu’il a fait, sous la présidence de Léon Gendre, en tant que vice-président à la gestion des déchets, justifiant ainsi le taux d’alors plus élevé que celui d’aujourd’hui. « Je ne suis pas impressionné par une lettre d’association et cela ne change rien à mon vote, on ne m’a jamais forcé la main, je trouve qu’il y a un peu trop de taxe d’enlèvement des ordures ménagères. »
Le vote visant à approuver ou non ce nouveau taux de la TEOM s’est fait à bulletin secret, à la demande de Didier Guyon. 18 délégués ont approuvé cette délibération, 9 s’y sont opposés. Le taux de la TEOM a ainsi été fixé à 13,9 %, soit une recette attendue de 6,515 M€.
Budget général primitif 2022 approuvé
Le budget général primitif 2022 de fonctionnement s’élève à 28,281 M€, celui d’investissement à 11,164 M€. « Tout est lancé, on ne pourra faire tous ces projets en 2022, mais on en fera l’essentiel. Nous sommes dans une bonne dynamique, extrêmement volontaire, avec une très bonne CAF (capacité d’autofinancement). Ce budget intègre un budget participatif de 50 K€, qui pourra concerner un projet proposé par le Comité Consultatif Citoyen » a précisé le président.
Didier Guyon a estimé que la subvention d’équilibre du budget principal au budget annexe cinéma-spectacle d’un montant de 1 M€ était insuffisante. « L’inauguration de La Maline a été de qualité, on passe de 900 K€ en 2021 à 1 M€ cette année, il faudrait soutenir davantage ce redémarrage. » a-t-il estimé, rejoint en cela par Jean-Paul Héraudeau. « En 3 ou 4 ans nous venons de doubler notre budget culturel, 25 spectacles sont programmés en 2022, la culture n’a pas de prix certes, elle a un coût et il y a un risque considérable à gérer ainsi en direct une salle, je l’ai pris, on n’est pas à l’abri de mauvaises nouvelles et déjà certains trouvent ce budget trop important. » a rétorqué Lionel Quillet.
Sans surprise et conforme à celui du taux de la TEOM, le vote du budget général primitif a abouti à l’adoption de celui-ci avec 18 voix favorables et 9 contre*, tout comme le vote du budget annexe des déchets, d’un montant de 7,940 M€ de fonctionnement, et 2,374 M€ en investissement.
Élargir les usages possibles de l’écotaxe
Le budget annexe écotaxe primitif 2022 a été approuvé à l’unanimité. Lionel Quillet a rappelé qu’il s’agit d’une taxe exceptionnelle, unique en France, toutes les autres taxes « environnementales » ayant été supprimées, que l’on n’arrive pas à utiliser dans son intégralité, son usage étant très réservé. « J’ai écrit au Préfet et à la Présidente du Département, afin de voir comment élargir son utilisation, trop restrictive. J’attends les élections législatives, et je solliciterai le Député avec une proposition d’amendement de la Loi, car il s’agit d’un vote de l’Assemblée Nationale. L’écotaxe pourrait servir en partie à financer des revêtements écologiques de pistes cyclables, ainsi que d’autres utilisations (aujourd’hui elle est exclusivement dédiée à la préemption et gestion des espaces naturels et au transport en énergie propre – NDLR), le développement durable s’est modernisé, l’écotaxe doit accompagner cette évolution. »
« Je vais totalement dans votre sens, on a le même souci pour la part communale de l’écotaxe, il faut essayer de déverrouiller cet usage » a approuvé Patrick Salez.
Interpellé par Lina Besnier quant à son souhait de Conseiller départemental exprimé par courrier auprès des Maires de revoir la saisonnalité des tarifs du Pont, Patrice Raffarin a confirmé qu’« il ne s’agit pas de baisser le tarif du péage mais de travailler sur la saisonnalité. La volonté de la Présidente du Département est d’y réfléchir au travers de groupes de travail, à recettes constantes. »
Un référendum sur la saisonnalité des tarifs du Pont
« J’ai demandé que s’il y a modification des tarifs, cela se fasse avec tous les Rétais, mais aussi après une étude très approfondie sur l’impact sur les flux et un vrai plan mobilité. Et attention au sujet des barrières, elles empêchent de forcer le passage, ce que l’on n’aurait pas en free flow. Le sujet des tarifs du Pont est extrêmement compliqué. » a, pour sa part, estimé Lionel Quillet.
« Oui c’est la volonté de la Présidente de n’exclure personne, cela pourrait passer par un référendum. L’idée est de travailler d’abord sur la saisonnalité et dans un second temps sur la mobilité » a répondu Patrice Raffarin.
« Il faudra bien expliquer les choses avant le référendum, cela induira une période plus courte à tarif réduit, il faudra être clair et précis » a estimé Gérard Juin.
Le budget annexe primitif 2022 de l’écotaxe, d’un « montant très confortable » de 6,317 M€ en fonctionnement et 2,116 M€ en investissement, a été voté à l’unanimité. Celui du cinéma- spectacle, qui s’élève à 1,555 M€ en fonctionnement et 2,331 M€ en investissement a été approuvé, avec une abstention, celle de Didier Guyon. Enfin le budget annexe primitif de la Zone d’activité économique (prévue à Sainte-Marie) a été voté à 1,950 M€ en investissement. « Il s’agit du montant d’aménagement des terrains, qui devra être compensé par la vente de ces terrains à prix coûtant, sauf si l’on décide de mettre un terrain de côté pour créer par exemple un incubateur » a expliqué le président. Ce dernier budget a été voté à l’unanimité, avec l’abstention de Didier Guyon.
Nathalie Vauchez
* Les 3 élus de Rivedoux (Patrice Raffarin, Marc Chaigne, Julie Foulquier), les 4 élus de La Flotte (Jean-Paul Héraudeau, Roger Zélie, Annie Bergeron, Patrick Salez), ainsi que Didier Guyon (élu minoritaire Sainte-Marie) et Jean-Pierre Gaillard (élu minoritaire Le Bois).
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