L’EHPAD de Saint-Martin en grande difficulté
Quelques minutes après son démarrage, le Conseil communautaire de l’île de Ré du 5 octobre aprèsmidi a été interrompu par une délégation de personnels du Groupe hospitalier venus alerter les élus sur la situation catastrophique de l’EHPAD de Saint-Martin.
Ils ont surpris le président de la CdC et les élus communautaires, guère habitués à ce type de manifestation. D’autant plus que réunis en congrès de l’UFMICT* CGT à l’île de Ré, les délégués sont venus en force, après avoir pris connaissance de la fermeture, depuis deux ans, de 35 lits, des 10 fermetures supplémentaires annoncées ainsi que de celle de l’unité protégée d’Alzheimer et Parkinson de 24 lits.
Sensibilisation des élus rétais
Ils ont expliqué la situation aux élus, renforcés par le témoignage poignant d’aides-soignantes à bout de force et dénonçant la situation de maltraitance que subissent leurs patients. En effet, le matin même, du fait de la présence de seulement trois soignants à l’étage et trois au rez-de-chaussée (les arrêts de travail se multiplient), les résidents n’avaient pu être levés, la toilette n’avait pu être faite, et donner à manger aux patients dépendants s’est fait dans des conditions désastreuses. Mesurant la gravité de la situation et l’épuisement moral et physique du personnel, Lionel Quillet a immédiatement sollicité par écrit et en urgence un entretien avec la direction du Groupe Hospitalier.
Emmanuel Dallière, Secrétaire général CGT à l’Hôpital de La Rochelle, a reçu dès le lendemain Ré à la Hune, en compagnie de Christophe Bodin, infirmier à La Rochelle assurant des remplacements à l’EHPAD de Saint- Martin, pour nous apporter plus de précisions.
Un sous-effectif chronique
« Ce jeudi 5 octobre matin, lors de la prise de service à 7h30, le personnel était en sous-effectif. Sur les deux niveaux de l’EHPAD, comprenant 160 lits, dont 35 ont été fermés depuis deux ans, il devrait y avoir cinq aides-soignants par étage, renforcés par une personne volante faisant la navette entre les étages. Depuis le 1er octobre, ils n’étaient plus que quatre et ce matin ils se sont retrouvés à trois par étage, alors qu’il faut donner à manger à 50 % des patients. Chaque aide-soignant s’est ainsi retrouvé à gérer 16 résidents sur une matinée ! »
« Evidemment la désaffection pour les métiers de soignant, devenus peu attractifs, explique les difficultés de recrutement. Le problème de logement du personnel est un autre souci majeur. La majorité des soignants sont issus de familles monoparentales ou recomposées, ils viennent de Vendée, de Courçon, ils ont un trajet de 100 km à faire. D’où la volonté des délégués de sensibiliser les élus rétais, afin qu’ils puissent d’une part agir auprès de la direction de l’hôpital et des autorités de tutelle – ARS et Département – et d’autre part proposer des solutions de logements sociaux sur l’île pour le personnel soignant », nous a-t-il expliqué.
Emmanuel Dallière a ainsi déclenché une procédure d’urgence (DGI), permettant de protéger le personnel en cas d’incident professionnel, et alerté les pouvoirs publics.
Fermeture de 34 lits, dont l’Unité protégée, avant la fin 2023 ?
« La nouvelle directrice générale arrivée le 7 août, Valérie Bénéat- Marlier, qui a succédé à Pierre Thépot, a visité l’EHPAD de Saint-Martin début septembre et a annoncé vouloir mettre en adéquation le nombre de lits avec les ressources humaines, autrement dit fermer des lits supplémentaires avant les vacances de la Toussaint. Sont concernés les 24 lits de l’Unité protégée et dix lits de l’EHPAD. Actuellement, il manque neuf aidessoignants, à la fin de l’année on sera à moins douze. En Unité protégée, sur les douze soignants, six sont en arrêt de travail. Le personnel est en grande souffrance. La CGT est contre la fermeture prévue d’au moins trentequatre lits avant la fin de l’année 2023. », explique Emmanuel Dallière, déplorant qu’ « On a tout misé sur l’ambulatoire, au lieu de rouvrir des lits avec du personnel. »
Le Secrétaire général de la CGT du groupe hospitalier rappelle qu’il y a encore quelques années, les résultats de celui-ci était excédentaires alors qu’aujourd’hui l’Hôpital de La Rochelle serait déficitaire de près de 19 M€ et l’EHPAD de Saint-Martin déficitaire de 800 K€. L’établissement de Soins de Suite, implanté sur le même site de Saint-Martin, ne rencontre lui pas de telles difficultés. « La situation s’est dégradée à partir de la fusion de l’EHPAD de Saint-Martin avec l’hôpital de La Rochelle, en 2012. Le coût de la structure vieillissante puisque datant de 2010, avec de gros soucis de malfaçons, est devenu difficile à absorber, il y a 200 K€ de réparations à faire à Saint-Martin. »
Journée de rassemblement lundi 13 novembre
Reçus depuis par la direction, les représentants CGT n’en baissent pas moins la garde et organisent lundi 13 novembre prochain une journée de rassemblement devant l’EHPAD de Saint-Martin, avec barbecue et conférence-débat à 14h avec le député Olivier Falorni.
Le président de la CdC de l’île de Ré, Lionel Quillet, accompagné de Gérard Juin, vice-président de la CdC et médecin, de Patrice Déchelette, vice-président de la CdC et président du Conseil de Surveillance de l’établissement de Saint-Martin, et de Patrice Raffarin, conseiller départemental de l’île, a rencontré la directrice du groupe hospitalier, Valérie Bénéat-Marlier, notamment accompagnée de Sophie Le Mer, directrice des filières gériatriques, ce lundi 16 octobre.
Trois problématiques évoquées entre la CdC et la Direction de l’Hôpital
« Nous avons évoqué le passé, ainsi que le projet que la direction du groupe hospitalier prévoit de présenter à ses autorités de tutelle, pour que soient plus fonctionnels et mieux organisés l’EHPAD et l’Unité protégée. Celui-ci va dans le sens d’une rationalisation, avec le maintien d’un nombre de lits ouverts en fonction des réels besoins. Le potentiel de 165 lits n’est pas gérable faute de personnel suffisant. J’ai fait part de mon inquiétude quant à cette baisse d’activité envisagée. »
« Autre problème, qui est national, celui de l’attractivité de ces métiers. Enfin, j’ai aussi rappelé à la nouvelle direction, qui n’en avait apparemment pas eu connaissance, ma proposition faite en juillet 2022 d’essayer d’obtenir un ratio de logements, dans le programme des 25 logements de Saint-Martin à venir, pour les personnels de l’hôpital, du CDAIR et des pompiers, le préfet étant ouvert à la discussion, avec toutefois des aspects juridiques à examiner. J’ai aussi proposé en septembre 2022 que la CdC puisse occuper, pour ses différents besoins sociaux, une partie des locaux vides de l’EHPAD, contre un loyer versé à l’hôpital, nous voulions par exemple y installer une MAM (Maison d’assistantes maternelles) dans l’une des ailes du bâtiment, ce qui favoriserait aussi l’attractivité pour recruter du personnel. »
« Enfin, troisième sujet soulevé, le manque de moyens dans le contexte général. Nous avons évoqué notre insularité et les spécificités de notre île, déjà reconnues par l’Education nationale au travers du contrat de territoire. Cette notion est à remonter à l’ARS et au Département. Les coûts ne sont pas les mêmes qu’ailleurs, l’approche tarifaire doit les intégrer et être différente, l’ARS et le Département pourraient en tenir compte dans les modalités de prise en charge. »
« Si l’Unité protégée n’est pas maintenue, notre territoire va être en difficulté, où vont aller les 24 lits Alzheimer et Parkinson ? J’ai demandé à la direction de l’hôpital de me tenir informé dès qu’elle aura fait ce bilan avec sa tutelle, afin de savoir où on va et dans quelle mesure la CdC de l’île de Ré peut intervenir. », conclut Lionel Quillet.
*Union fédérale des médecins, ingénieurs, cadres et techniciens
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