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- Conseil communautaire du 13 août 2019
Le second arrêt du PLUi de l’île de Ré consacre un tournant politique majeur
Le second arrêt du PLUi de l’île de Ré consacre un tournant politique majeur
Alors qu’il avait été arrêté lors du conseil communautaire du 16 mai 2019 à l’unanimité, les avis défavorables des conseils municipaux de La Flotte du 5 juillet et de Rivedoux-Plage du 7 août 2019 ont amené de facto le conseil communautaire à délibérer de nouveau pour arrêter le PLUi à la majorité des deux tiers des suffrages exprimés. Rivedoux bascule dans l’opposition, tandis que La Flotte rejoint la majorité !
Si le PLUi a cristallisé le divorce entre le président de la CdC et son premier vice-président, le maire de Rivedoux-Plage, le feu couvait depuis un certain temps déjà, Patrice Raffarin étant de plus en plus critique vis-à-vis de Lionel Quillet. La délibération du 13 août a permis de clarifier les positions de chacun, sur fond de Plan Local d’Urbanisme intercommunal. Pas de réelle surprise donc de ce côté-là.
Lionel Quillet à Léon Gendre : « 25 ans après on se retrouve sur le projet de l’île »
Le ralliement du maire de La Flotte, Léon Gendre, et du chef de file de son opposition, Jean- Paul Héraudeau à la politique de territoire qui sous-tend le PLUi constitue par contre une belle surprise pour le président de la CdC et sa majorité. Ce qui a fait dire à Lionel Quillet, s’adressant à Léon Gendre : « Vingt-cinq ans après, on se retrouve ensemble sur le projet de l’île de Ré ».
Rivedoux-Plage se trouve du coup très isolée, puisque sur vingt-cinq votants, vingt élus ont émis un avis favorable avec observations, un élu (le maire de Saint-Clément, absent) s’est abstenu, une élue (l’adjointe au maire de La Flotte, absente) a émis un avis favorable avec réserve (ce qui équivaut à un avis défavorable) et les trois élus de Rivedoux ont émis un avis défavorable à l’arrêt du PLUi.
Depuis le premier arrêt du PLUi lors du conseil communautaire du 16 mai 2019, chacun des dix conseils municipaux a étudié de près l’énorme dossier : huit d’entre eux ont émis des avis favorables, souvent à l’unanimité, tandis que deux conseils – La Flotte et Rivedoux – ont émis des avis défavorables.
La nouvelle délibération du 13 août portait sur exactement le même document qu’au mois de mai. Les avis favorables de la plupart des conseils ayant été donnés sous réserve de la prise en compte des observations, extrêmement nombreuses. L’enquête publique qui démarre ce 23 août et se déroule jusqu’au 24 septembre amènera aussi son lot d’observations, tout comme la consultation des Personnes publiques associées, dont l’Etat. La Communauté de Communes va avoir un énorme travail d’étude de ces observations, de discussions avec tous les acteurs du PLUi, puis d’arbitrages, car on s’en doute toutes les observations ne pourront être prises en compte. Le président Quillet s’est montré ouvert à l’intégration des observations allant dans le sens du projet de territoire, il sera vigilant à défendre l’esprit du PLUi, une vision globale de l’île de Ré, et non les spécificités de chaque village.
Rivedoux-Plage s’isole par un vote défavorable
Amené à s’exprimer en premier, le maire de Rivedoux, Patrice Raffarin a expliqué pourquoi la position des élus rivedousais a basculé entre le 16 mai et le 7 août. Le conseil municipal de Rivedoux a en effet fait travailler un cabinet d’avocat et un cabinet d’urbanisme, qui l’ont tous deux conforté dans sa position. L’objet de la discorde concerne l’OAP (orientation d’aménagement et de programmation) proposée par le conseil municipal sur le secteur Nord de Rivedoux, notamment le quartier des Bragauds (lire en page 3), non intégrée dans le PLUi. Patrice Raffarin estime que « préserver les spécificités des villages n’est pas incompatible avec l’intérêt général de l’île de Ré ».
Lionel Quillet a justifié cette position : « Aujourd’hui on a fixé une règle d’arrêter la constructibilité, celle-ci s’applique aux dix communes. La zone Uc de Rivedoux est gelée, la loi Littoral et notamment son concept de zone diffuse interdit d’ouvrir cette zone à la constructibilité. Le préfet et le secrétaire général ont confirmé cette approche le 16 avril 2019. Et quand bien même la constructibilité pourrait juridiquement être légitime, nous avons décidé de n’ouvrir la constructibilité que pour des projets publics de logements sociaux, casernes de pompiers, cimetières… Ouvrir les 3,9 hectares de Rivedoux dérogerait au principe appliqué à toutes les autres zones, cela ouvrirait une brèche à la promotion immobilière avec la construction de 30 à 35 logements sur 3 hectares et fragiliserait juridiquement le PLUi. Celui-ci est avant tout porteur d’un projet politique, la demande de Rivedoux n’est pas envisageable, elle conduirait à valoriser à mille euros des parcelles qui aujourd’hui n’ont aucune valeur, cela représente plusieurs millions d’euros. Cela ferait perdre toute crédibilité au PLUi et engagerait la CdC. Neuf communes n’ont ouvert la constructibilité que pour des logements sociaux et projets publics, des terrains privés posent problème ».
Patrice Raffarin estime que « l’on n’ouvre pas une nouvelle zone, cette zone Uc existait déjà dans le schéma directeur et fait partie des 20 % » et rectifie « Nous ne subissons aucune pression de la population, nous partageons son avis et avec le projet d’aménagement des Bragauds, raisonné et raisonnable, nous augmentons aussi les zones naturelles ».
Un tour de table unanime, sous réserve de la prise en compte des observations
Invité à s’exprimer à son tour, le maire de La Flotte a au préalable précisé que la zone des Bragauds, ancien territoire de La Flotte sur 85 hectares, devait comme sur les terrains de La Flotte de ce secteur rester en zone naturelle. Après avoir rappelé la position de son conseil municipal (6 avis défavorables, 4 avis favorables avec réserve assimilés donc à des avis défavorables, 6 absentions et 7 avis favorables ave observations), Léon Gendre a annoncé à la grande surprise de ses collègues qu’il voterait aujourd’hui « un avis favorable avec observations. Je réviserai mon avis si nos remarques ne sont pas tenues avec l’enquête publique ».
Après avoir regretté le manque de temps et un travail « un peu trop à partir des POS et non d’une vision globalisée au départ » Jean-Paul Héraudeau, élu d’opposition de La Flotte a également décidé de voter favorablement après avoir eu des explications du président de la CdC au sujet des 5000 mètres carrés qui seraient encore en instance d’être urbanisés à La Maladrerie, mangeant un peu plus sur la zone naturelle des 2,5 hectares initialement ouverts. Lionel Quillet lui a expliqué que cette demande émanait bien du maire de La Flotte en date du 19 juin 2018 d’agrandir le zonage de 0,8 hectare, demande acceptée par la CdC car la commune rend par ailleurs 1,10 hectare et est ainsi dans les clous, s’agissant de logements sociaux. « Tout le monde a pris conjointement la responsabilité de cette décision » a confirmé le président.
La maire de Sainte-Marie, Gisèle Vergnon s’est dite « choquée et interloquée » par la position des élus de Rivedoux qu’elle ne comprend pas, les dix communes ayant été solidaires jusque-là depuis douze ans, Sainte-Marie ayant accepté de ne plus rendre constructible un enclos alors qu’il l’était, dans l’intérêt général du territoire et non de sa commune, « un engagement lourd à porter ». « Il est dommage d’être sur des attitudes personnelles » a-t-elle estimé.
Michel Auclair, maire des Portes a précisé que le travail du PLUi avait été fait en concordance avec le PPRL, ce qui ne donne pas de possibilité, précisant que le PLUi a été largement travaillé par son conseil municipal, qui a émis des observations à prendre en compte.
Le maire de La Couarde, Patrick Rayton, a estimé que « ce débat confirme que le PLUi est un exercice difficile, puisqu’il s’agissait de passer de dix POS, doc dix intérêts des communes à l’intérêt général de l’île de Ré. Avec pour dilemme où se situe l’intérêt général par rapport à l’intérêt particulier. La Couarde a émis un avis favorable à l’unanimité avec des observations importantes et d’autres qui ne pourront être prises en compte du fait de la loi Littoral. « Je serai vigilant, mais le président s’est engagé à travailler sur les demandes des communes ».
Jean-Louis Olivier, maire d’Ars a confirmé que « le PLUi cela change tout, on sort des règlements particuliers des communes. Je comprends la position du maire de Rivedoux mais je considère que toutes les communes du Nord frappées par le PPRN sont un peu choquées de la demande d’ouverture de Rivedoux pour des projets certes en partie publics mais aussi privés. Par leur avis défavorable nos collègues de Rivedoux remettent en cause l’intérêt général et c’est dommage, je sais que c’est difficile de donner un avis contraire à celui de la population et de son conseil municipal ».
Patrice Déchelette, maire de Saint- Martin a émis un vote favorable, estimant qu’il faut « rester unitaires ». Paul-Henry Jaffard, adjoint, également, précisant que cela n’engage pas son vote définitif et estimant qu’il « ne faut plus ouvrir de zone à la construction, pour encore des résidences secondaires, l’île de Ré a atteint un sommet à ne pas dépasser ».
Absent le maire de Saint-Clément avait donné sa voix à Catherine Jacob avec pour consigne de s’abstenir, alors même que son conseil municipal avait voté favorablement, il est des rancoeurs qui sont persistantes….
Au Bois-Plage, Jean-Pierre Gaillard a rappelé le vote favorable à l’unanimité du conseil, qui « a bon espoir de voir plusieurs de ses observations prises en compte. Le PLUi est un très beau projet de territoire, il est dommage que l’on n’ait pas obtenu de l’ensemble des maires de défendre l’esprit du territoire, cela m’embête un peu… Le Bois- Plage accepte de mettre en zones naturelles 13,8 hectares de zones potentiellement constructibles… Ce projet est ambitieux et novateur, avec la suppression du minimum parcellaire et l’introduction du coefficient pleine terre ».
Un PLUi porteur d’une vision politique forte et globale du territoire
En conclusion, Lionel Quillet a rappelé que le PLUi est sous-tendu par une vision globale forte de l’île de Ré, qu’il a depuis vingt-cinq ans pour Loix puis pour l’île de Ré soutenu par une majorité à la CdC et que si celle-ci est estimée n’être pas la bonne vision par certains il y a des élections en 2020. Les quatre enjeux du PLUi sont la défense aux côtes de l’île, la vie permanente via notamment les projets de logements sociaux, la préservation environnementale et la mobilité.
Avant la délibération il a bien précisé que les très nombreuses observations seraient toutes étudiées, mais qu’elles ramènent souvent aux spécificités des villages et qu’il se doit d’être garant d’une vision générale et de défendre le PLUi. Il faudra donc nécessairement arbitrer avec une majorité. Et quelle que soit la décision finale, le PLUi sera attaqué de toutes parts.
Au final le PLUi a été arrêté avec vingt avis favorables avec observations, trois avis défavorables (élus de Rivedoux), une abstention (maire de Saint-Clément) et un avis favorable avec réserve équivalent donc à un avis défavorable (Isabelle Masion-Tivenin à La Flotte).
Ce conseil a permis de voir les lignes politiques se redessiner, à quelques mois des élections municipales de mars 2020. Et il n’est pas impossible de les voir encore bouger avant la fin de l’année, tant il sera difficile à Lionel Quillet de contenter tout le monde sans mettre en péril le PLUi, les arbitrages rendus in fine ne plairont pas forcément à tous. Il est encore difficile de faire prévaloir l’intérêt général d’un territoire parfois au détriment des spécificités de chaque commune.
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