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Le miracle est dans le verre
Rencontre avec Jeanne Alméras et Tristan Rainteau, pratiquants du vin nature, passeurs et passionnés.
Depuis l’été 2021, La Couardesur- Mer abrite un bar à vins 100% nature : le Method, tenu par Jeanne Alméras et Tristan Rainteau. Tristan a des racines dans le village, par son grand-père maternel qui tenait une poissonnerie où se trouve maintenant le restaurant La Cabine de Bains. Lorsqu’avec sa compagne Jeanne, ils décident de monter leur propre restaurant, le choix de l’île coule de source. Tous deux se sont formés aux métiers de la restauration à Paris, dans des établissements qu’ils ont choisis pour leur éthique. Jeanne se souvient de la Fontaine de Belleville, un bistro 1900 attenant à une brûlerie, dont tous les produits étaient « sourcés, jusqu’au sel. » De son côté, c’est au Marie-Céleste que Tristan apprend le métier de barman, dans ce bar à cocktail exigeant qui fait partie du classement des World Best Fifty Bars.
Jeanne et lui se rejoignent sur le besoin de cohérence. Le projet naît d’ouvrir un bistro qui soit le reflet de leurs valeurs. En 2020, ils reprennent le local du Peu des hommes, fermé pour des raisons administratives. La première saison, Jeanne se met en cuisine, et propose une carte de petites assiettes qui accompagnent les vins. « On a fait ce qu’on savait faire », raconte-t-elle humblement. Elle vient du Pays basque : il y aura des padrones1. Le grand-père paternel de Tristan était boucher à Paris : sa terrine sera au menu. Petit à petit se constitue une clientèle de fidèles qui apprécie la qualité des produits. Ils engagent un chef pour la saison suivante, qui crée une cuisine « plus travaillée mais accessible, réconfortante et qui parle aux gens. » Les fidèles reviennent, preuve que l’esprit du Method ne s’est pas perdu.
Prendre le temps
Dans l’ADN du Method, il y a de l’authenticité, de la qualité et pas de compromis. « Aujourd’hui, le « local » est un argument de vente. Nous, on le prend très au sérieux. » Mais cette éthique a un coût, qui se mesure en temps. « Sourcer un producteur, cela nécessite de lui rendre visite, de nous rendre compte de ses conditions de travail, puis de mettre en place la logistique pour acheminer ses produits jusqu’à nous. On parvient à le faire de presque tous nos produits, maintenant, en cuisine comme au bar. Mais ça nous aura pris presque trois ans. »
Cet hiver, au lieu de partir en vacances, Jeanne et Tristan ont parcouru le pays à la rencontre des vignerons. Ils se souviennent de Clément Poirel, de Beaulieu sur Layon. « On l’a découvert sur un salon, un homme réservé avec beaucoup de charisme. On a eu le temps de voir que c’était un poète. Il fallait aller toquer à sa porte pour en savoir plus. Mieux comprendre le vigneron permet d’appréhender le vin d’une autre manière. » Jeune vigneron, encore, puisque l’installation de son propre domaine date de 2020, il leur fait goûter toutes ses barriques. « C’était un moment privilégié. Il était très à l’écoute de nos ressentis sur son vin. » Tristan pose beaucoup de questions techniques, pour se rendre compte de l’éthique du vigneron. Elle transparaît dans l’émotion que le vin suscite. « Ses bouteilles sont des petits bijoux. On en a ouvert une récemment avec des clients réguliers, on était sûr de ne pas faire d’erreur. Il a touché tout le monde, sans clivage, connaisseurs ou non. » Et il ajoute : « Il met la surprise dans le verre, c’est joli. »
Vin nature, vin vivant
Pour les vignerons eux-mêmes, l’engagement d’un bistro comme le Method est précieux. « Le vin nature est soumis plus que tout autre aux aléas climatiques. A chaque étape, tout peut partir en fumée. Cette endurance dans l’adversité rend le résultat miraculeux. Sans chimie, la vigne redevient un métier paysan. » Entre le vigneron et le client, Tristan tient le rôle de passeur. « Les gens oublient, dans les moments festifs, le travail qu’il y a derrière. Et c’est tant mieux ! Mais c’est pourquoi on peut entendre des remarques comme : c’est trop cher pour un vin de France. A nous d’en expliquer la raison. » Dans le choix des vins qu’ils mettent à la carte, entre aussi en ligne de compte la diversité des profils de leur clientèle : « Prenons par exemple le rosé. Nous, on aime les rosés « vineux », pas filtré au charbon2. Mais on veut aussi pouvoir offrir un rosé à quelqu’un qui l’aime servi avec des glaçons. C’est ça, un lieu de vie. »
A voir la joie qui pétille dans leur regard à tous deux, le Method est, sans conteste, un lieu vivant.
1 – Petits piments de la région de Padron
2 – Technique qui donne au rosé sa couleur grise
Bistrot Method
21 bis avenue du Mail, à La Couarde-sur-Mer
Ouvert du mercredi au dimanche, midi et soir.
Le Method organise des événements pendant l’été : pop-up (un chef invité à cuisiner une soirée) et concerts. Programmation à suivre sur Instagram : @methoood
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