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- Que sont-ils devenus : Martine Strelinski
La vie ce n’est pas d’arriver, mais d’être
Martine Streliski est née à Angers, dans une famille qui a su lui insuffler confiance en elle-même et en ses capacités. Un père journaliste, une mère sage-femme pionnière de l’accouchement sans douleur, un frère et une soeur, entourent ses jeunes années empreintes d’ouverture intellectuelle autant que de l’apprentissage de l’autonomie. Les parents tiennent à ce que leurs enfants reçoivent une bonne éducation, passeport ultérieur pour tous les milieux et cela se fait d’une manière plutôt harmonieuse. Sa mère décède lorsqu’elle a 17 ans et l’oeil de Martine s’éteint. Encore aujourd’hui c’est le regard que l’on remarque en premier chez cette femme gracile. Un oeil qui sait voir à l’intérieur comme à l’extérieur d’elle-même et des autres. Il faudra de longues années pour qu’elle retrouve cet oeil.
La découverte du monde À 20 ans, ses jumeaux sous le bras, elle rejoint son mari aux États-Unis où il a obtenu une bourse d’étude dans le Minnesota. Elle étudiera la photo à l’université de Minneapolis tout en faisant des petits boulots pour arrondir les fins de mois du jeune couple : cours de bridge à l’Alliance Française, mannequin chez Rodier, etc. La petite famille vit sur le campus. Des amis leur prêtent une voiture et la vie s’organise agréablement. C’est pendant ces années 60 qu’apparaît le New Age, dans le contexte de la guerre du Vietnam sur fond violent de racisme et que naît en contrepoint, l’idée d’un monde nouveau accompagné d’idées libertaires où le développement personnel serait favorisé. Ces idées qui naissent en Californie conviennent fort bien à la rebelle qu’est Martine Strelinski. Encore aujourd’hui elle déclare que « lorsque l’on a la chance d’aller vivre dans un pays comme celui-là, on gagne dix ans ». Dix ans d’expérience et de maturité.
Après ce premier séjour à l’étranger, le couple rentre en France et y reste deux ans, le temps pour son mari d’effectuer un service militaire long en raison de la guerre d’Algérie. Dégagé de ses obligations militaires, celui-ci trouve une situation en Angleterre où naîtra leur fille. Martine se sent bien dans ce pays. Elle aime les paysages de la campagne anglaise, le mode de vie, la retenue de cette société qui laisse une fabuleuse liberté à l’individu. Puis ce sera l’Italie où son mari est envoyé par la société mère pour monter de nouvelles usines. A Milan elle crée un magasin de sport où elle vend entre autres sa propre ligne de vêtements pour le tennis.
Quand on lui demande comment elle est devenue styliste, elle répond que c’est en observant ce qui va aux gens, ce qui les embellit et bien sûr en dessinant. Ce qu’elle ne dit pas, c’est que c’est d’abord en se faisant confiance, en s’autorisant à faire ce qu’elle n’avait pas appris de manière scolaire et en donnant libre cours à son imagination et son talent. Aussi folle et inhabituelle que puisse être l’aventure dans laquelle elle se lance, elle est tellement convaincue de sa réussite qu’elle arrive toujours à convaincre son entourage de la suivre !
Les années de galère et de construction
Le couple rentre définitivement en France et s’installe à Angoulême. Elle a la joie de faire les plans et de voir construire une maison où le regard n’est jamais arrêté et qui laisse abondamment entrer la lumière. Parallèlement, elle travaille dans un magasin de mode où elle crée une marque de vêtements à son nom avec une ligne pour bébé et une autre en éponge pour thalassos.
Elle s’éloigne progressivement d’Angoulême alors qu’elle est enceinte de son quatrième enfant. Elle laisse derrière elle une agréable vie bourgeoise. « On est soumis … ou fou » a-t-elle coutume de dire. C’est alors qu’elle vient s’installer dans l’île de Ré qu’elle connaît pour l’avoir visitée. Elle y vivra dans la pauvreté avec le panache et la foi en la vie qui la caractérisent. Le stylisme va l’aider à survivre : elle trouve une couturière, lui fait exécuter ses créations, poupées et vêtements, qu’elle vend sur les marchés tout en élevant son dernier fils. Elle s’en sortira et, comme à chaque fois, dépassera ce cap difficile.
En même temps, elle reprend un travail personnel entamé aux États-Unis et entreprend une formation de psychothérapeute. À partir de 1988, elle se remet progressivement au TaÏ Ji, pour lequel elle a obtenu un diplôme à la Pacific Coast School of Taï Ji à Newport Beach, en Californie. Son parcours personnel, son écoute et l’extraordinaire intérêt qu’elle porte à l’humain font que les résultats avec les patients sont excellents. Le bouche à oreille bat son plein et il en arrive de partout et en particulier de Dordogne. Elle partage alors son temps entre La Couarde et la Dordogne où elle séjourne deux jours chaque semaine. Puis pour compléter sa pratique elle obtient un diplôme d’art thérapie. Précisons que l’art est ici un moyen d’expression utilisant aussi bien la peinture qu’une autre discipline permettant d’exprimer une souffrance et de retrouver la joie. Selon Martine il nous faut retrouver l’artiste en nous.
Transmettre
Ces années difficile l’ont fait grandir et mûrir. Elle a transformé l’essai et aujourd’hui à 70 ans passés, elle est arrivée à un moment de sa vie où elle souhaite faire en sorte que ce qu’elle a créé perdure.
C’est dans ce cadre qu’elle s’est associée avec un entrepreneur altruiste de Cognac, Jean-Philippe Roger. Jean-Philippe ayant expérimenté le talent de Martine au sein de sa propre famille et de son entreprise s’est facilement laissé convaincre de créer « État d’Esprit » à La Couarde. Difficile de définir la fonction économique d’État d’Esprit. On y vend des peintures respectueuses de l’environnement, des pigments et des enduits de rénovation naturels… mais c’est également un atelier de bricolage qui renvoie sur « Le Lieu » de Martine où il est possible de participer à une séance d’art thérapie ou bien un cours de Taï Ji qui permet de retrouver le vivant en soi et que Martine adapte à chaque métier. D’ailleurs, à Cognac, l’entreprise de Jean-Philippe dispose, depuis la première intervention de Martine, d’une salle de Taï Ji et la création d’une nursery est prévue. L’idée ici est d’embaucher des personnes en situation de précarité, deux ou trois à la fois, de les former à ce qu’elles aiment, ce pourquoi elles sont faites, de leur apprendre à se connaître à retrouver le bonheur que chacun porte en soi et de leur trouver du travail grâce à l’entreprise.
À première vue on pense que c’est utopique. Puis on apprend que leur premier essai à Cognac donne des résultats positifs. Et devant leur conviction profonde à tous deux, on finit par y croire.
Ce ne sera pas le dernier grand chantier de Martine avant de partir, car elle est incapable de s’arrêter. Mails elle souhaite que « Le Lieu » puisse continuer d’exister après elle et réfléchit actuellement à la forme juridique à lui donner, les personnes que Martine a formées étant prêtes à assurer la relève.
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