La Java, emblème d’un plaidoyer pour une île vivante
Ré à la Hune s’en est fait l’écho dans l’été, l’Association de protection des sites de Saint-Clément (APSSC) a déposé un recours contre la Commune, afin de faire annuler l’autorisation d’installation de La Java. Les réactions de soutien à La Java ont afflué de toutes parts, en faisant l’emblème de ce combat pour une île vivante versus « une maison de retraite ».
La Java des Baleines a été invitée par le Tribunal à présenter, si elle le souhaite, un mémoire en défense. Et son post Facebook du 29 août, intitulé : « L’avenir de La Java toujours en stabilité délicate » a recueilli 22 000 vues, 631 emoji, 150 commentaires, 156 partages au 12 septembre. Au-delà des statistiques, c’est la teneur des réactions qui interpelle une nouvelle fois.
La Java explique que les motifs principaux, évoqués dans les documents qu’elle a reçus en copie, sont qu’elle va « entraîner une augmentation de la population dans un secteur étant reconnu comme étant soumis à un aléa très fort en terme d’inondation ».
L’APSSC se positionne aussi pour « la défense des espaces naturels », et estime enfin que « le fonctionnement de ces spectacles entraîne par ailleurs une très importante population tant le jour que la nuit avec toutes les nuisances qui peuvent s’en suivre comme le bruit, les lumières, les véhicules qui stationnent sur des parkings sauvages. »
« Un succès populaire et intergénérationnel »
La Java réplique point par point. « Concernant le 1er motif, il est évident que la saison touristique n’a pas besoin de La Java des Baleines pour entrainer des augmentations de population sur tous types de zones. Concernant le 2e motif, il nous semble que les collectivités ont tout intérêt à se doter de projets comme le nôtre qui, de par leur caractère temporaire et démontable, ne présentent aucun impact sur l’environnement. De plus l’absence de constructions et de fondations permet au projet d’évoluer avec son temps et selon les attentes des publics. Enfin, le terrain du Moulin Rouge, rappelons-le, est un champ entouré de routes, bordé soit d’habitations, soit de champs cultivés et non une zone connue pour sa faune et sa flore. La mairie de Saint-Clément des Baleines est en plein travail de concertation, avec l’aide d’un cabinet spécialisé, pour l’aménagement paysager de ce terrain. Ce processus permettra et à La Java des Baleines et à tout autre projet temporaire de pouvoir s’intégrer davantage dans un « paysage ».
Concernant le 3e motif, oui La Java fait du bruit, mais avant minuit et de manière contrôlée. Ce qui n’est pas forcément le cas autour. Beaucoup de nuisances sonores dont nous entendons parler sont assimilées à La Java sans en être. Pour exemple, nous avons régulièrement à gérer vers 3h du matin le bruit et les détériorations des jeunes revenant en navette du sud de l’île.
Si La Java attire « une très importante population », cela ne démontre-t-il pas qu’il existe un besoin et que c’est un succès populaire et intergénérationnel ? 5 ans d’existence et toujours aucun débordement, aucun comportement agressif, le site et ses parkings sont vidés en douceur à la fermeture tous les soirs… Nous souhaitons cultiver cette bienveillance qui habite le projet !
Enfin, avant La Java des Baleines, le terrain du Moulin Rouge était en effet un parking sauvage, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui puisque la mairie a aménagé un petit espace délimité pour cet usage qui vient compléter les parkings existants, des modifications sont encore prévues avec le plan d’aménagement paysager à venir.
En conclusion, nous en appelons à votre soutien afin que continue d’exister ce type de projet fédérateur, local et ouvert à tous les publics sur notre territoire. Il nous semble qu’une bienveillance, une tolérance des autres modes de vie et un respect mutuel entre les différents types de populations fréquentant l’île est possible. Nous en sommes l’exemple parfait, il suffit pour cela de constater la diversité des publics et de la programmation ! », écrit La Java.
Des « usages » contradictoires
La Java se retrouve ainsi – bien malgré elle – au centre de cet éternel débat qui oppose les différentes visions du territoire et de ses « usages », souvent contradictoires. La vague de soutiens qu’elle a reçus témoigne d’un immense ras-le-bol de ceux qui vivent et travaillent sur l’île de Ré et revendiquent de pouvoir aussi y sortir le soir, face à certains résidents secondaires, parfois devenus permanents, venus y chercher avant tout la tranquillité. Mais opposer les résidents permanents aux secondaires serait excessivement réducteur, le sujet des logements dits sociaux est bien révélateur de la difficulté que rencontrent aussi les élus du territoire pour mener à bien leurs projets. « On est toujours dans le même raisonnement, dans la même discussion », estime le président de la Communauté de Communes, Lionel Quillet. « A entendre certains, les déchetteries font du bruit, les logements sociaux ils n’en veulent pas à côté de chez eux, les cours d’écoles et les garderies sont bruyantes… Je suis solidaire de La Java et de la Commune de Saint-Clément. Tout est entendable, mais souvent une poignée de gens font obstacle à l’intérêt plus général, en lançant un contentieux, pour quelques intérêts particuliers. La Java a su créer un univers à part, du lien social que nous aurions du mal à recréer. Le sujet de La Java est emblématique de ce que va devenir l’île de Ré si on continue ainsi, il ne faut rien lâcher. »
« L’île est un territoire touristique »
Les nombreux commentaires publiés sous le post de La Java en rappellent d’autres, dans d’autres contextes, car ce combat est loin d’être nouveau sur l’île : « L’île de Ré est un lieu touristique », « Il faut de la vie, du bruit, de la musique, il n’y a pas si longtemps il y avait des boîtes de nuit sur l’île qui fermaient tard ! On doit pouvoir s’amuser sur l’île ! », « On en a marre de ces associations qui empêchent les gens de vivre et d’apporter des moments de partage de loisirs de faire vivre les villages », « Un lieu comme celui-ci est indispensable au bout de l’île. Intergénérationnel, avec une programmation variée, ce lieu offre de belles soirées à tous », « Plus ça va et moins il y a de distraction sur l’île ! Ça en devient inquiétant. » « C’est triste car une commune dont les habitants se sclérosent en vieillissant et refusent le partage et la cohabitation avec les générations du futur ne peut que devenir un hospice pour vieillards tristes et séniles. » « L’île se meurt ! Elle va devenir une maison de retraite. Ils vont réussir à éloigner les touristes… Tout est bon pour soidisant protéger l’île de Ré… Je suis Rétaise. A notre époque il existait au moins cinq ou six discothèques et il n’y avait pas de problèmes, Rétais et touristes s’amusaient.
Maintenant la vie devient de plus en plus difficile et en plus une poignée de personnes nous privent de joie et d’amusement. Je trouve que notre île est de plus en plus triste. » « L’île doit aussi proposer des activités, sorties, etc. le soir et la nuit ! J’ai connu une île beaucoup plus festive quand j’y venais toute jeune et cela me manque énormément… ».
La Java en « site inscrit » ? Paradoxal !
Le débat n’est pas nouveau, il est exacerbé par les positions arcboutées de certains, à l’image d’une société de plus en plus individualiste, revendicative, procédurière. Pourtant, la vague de soutiens à La Java montre s’il en était besoin qu’il serait dommage qu’il soit tranché abruptement, par une décision de justice. Comme le rappelait la présidente de l’APSSC elle-même, l’an passé, concernant le contentieux opposant l’association villageoise à la Ferme Marine des Baleines dans lequel l’association avait perdu en 1ère instance* : « Le juge du Tribunal administratif a estimé que l’île de Ré est un territoire touristique, destiné à accueillir des touristes et qu’il y en avait ras-le-bol de ces associations environnementales qui empêchent aux touristes de vivre et de profiter de l’île de Ré » (lire sur realahune.fr).
Autre paradoxe, la fragilité juridique potentielle de l’installation de La Java sur le terre-plein du Moulin Rouge tient essentiellement à son classement en « site naturel ». Il suffirait d’installer La Java en « site inscrit », autrement dit dans le centre-bourg, pour que le problème soit résolu ! Quitte pour le coup à implanter au centre du village les « nuisances sonores » et autres « nuisances visuelles » dénoncées par l’APSSC… Il est parfois des raisons juridiques… que la raison pragmatique et le bons sens ignorent.
*L’APSSC est dans l’attente du jugement en appel.
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