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La défense des côtes et la carte des aléas enfin sur de bons rails
Après des mois de forte crispation entre les services de l’Etat et les élus de l’île de Ré, l’heure semble enfin au dialogue constructif et le PPRL de l’île de Ré devrait fortement bénéficier de l’énorme travail réalisé par la Communauté de Communes et ses experts. Notre Site www.realahune.fr a ainsi publié dès mardi 5 février au soir le communiqué de presse commun de la préfecture de Charente-Maritime, du Ministère et de la CdC, qui nous est parvenu juste après la réunion au Ministère.
Ce qui justifierait a posteriori la « méthode forte » employée par Lionel Quillet et les Maires rétais depuis l’été 2012 et surtout l’été 2013, que certains détracteurs et médias ont souvent contestée ou raillée. Ou essayé de « politiser » ou réduire à des « enjeux électoraux » (sic). Prouvant là au mieux une forte méconnaissance du dossier, au pire une opposition systématique et personnelle, alors que l’enjeu est bien le maintien d’une vie permanente sur l’île de Ré.
Retour sur le calendrier de ces derniers jours, où tout s’est accéléré
Acte 1 – 27 janvier 2014 : La Préfète laisse entrevoir des évolutions
Lors de ses vœux à la presse, le 27 janvier dernier, interrogée par Ré à la Hune, la Préfète, Béatrice Abollivier, laissait déjà entrevoir une évolution sensible des positions de l’Etat. Rappelant les échéances des grandes marées de fin janvier, puis de début mars et début avril, elle a confirmé que la première priorité était de protéger les populations et qu’elle ne s’opposait pas à de l’enrochement de dunes là où cela s’avère la solution technique la plus viable, y compris en site classé. « La protection des populations ne doit en aucun cas souffrir des procédures, dans l’urgence ».
Elle prévient : « évidemment il n’est pas question d’enrocher toute l’île de Ré », de plus en s’exonérant des procédures, d’autant que « les enrochements déplacent et parfois aggravent le risque. On est sur un territoire fragile, il faut être prudent quant aux conséquences de l’aménagement ».
Et avoue : « On constate une évolution depuis 2012/2013 de la doctrine très figée du ministère jusque-là sur les dunes, le dossier est ré-ouvert au regard des enjeux pour les populations. De même, une participation financière de l’Etat est vraisemblable ».
Toujours interrogée par Ré à la Hune sur la non publication des cartes d’aléas de l’Etat prévue en décembre et de la CdC prévue le 31 janvier soit 4 jours plus tard, elle confirme : « les modélisations et les cartes d’aléas sont en discussion au Ministère, le compte rendu de la 1ère réunion du 16 janvier entre le directeur de Cabinet du Ministre de l’Ecologie, Francis Rol-Tanguy, Lionel Quillet, la Préfète de Région et moi-même n’a pas encore été validé, bien que la CdC le réclame sans doute en vue de la réunion publique du 31 janvier ».
Acte 2 – 31 janvier 2014 : Les experts confirment que leur travail de modélisation aura un fort impact sur le PPRL
En point presse, puis en réunion publique, Didier Rihouey, Casagec, et J. Van der Meer viennent cautionner et conforter les déclarations de Lionel Quillet, quant aux avancées très importantes obtenues sur deux fronts : d’une part les modélisations – même si elles doivent encore être précisées – révèlent une « emprise de submersion » qui n’a plus rien à voir avec celle découlant de l’analyse forfaitaire de l’Etat (équivalente à un scénario informatif en l’absence d’ouvrages !). D’autre part, l’Etat a suspendu la publication de sa carte pour prendre le temps d’étudier les modélisations et fondements techniques présentés par les experts de la CdC.
« On ne peut inverser la nature, mais on peut la domestiquer, il existe des côtes défendables… L’Etat co-financera une partie des travaux mais une nouvelle loi celle du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale – passée totalement inaperçue – donne la possibilité aux collectivités type EPCI – de créer un impôt pour financer la défense contre les submersions, plafonné à 40 € par personne et par an. Ce qui signifie clairement que l’Etat a déjà entériné que la défense des territoires incombe aux collectivités, ainsi que la responsabilité juridique afférente. Dans 3 ou 4 ans, les territoires vont se réveiller avec l’ensemble du coût financier de défense à leur charge. C’est pourquoi l’île de Ré a anticipé depuis Xynthia ».
« Evalué à 100 millions d’€, le budget du plan de défense de l’île de Ré correspond à ce qui n’a pas été fait entre 1965 et 2015, il aurait fallu mettre 2 millions d’ € par an sur la défense de l’île de Ré depuis 50 ans. Au-delà de 2015, on fera chaque année 1 à 2 millions d’€ de travaux, ce qui représente à peine 5 % du budget actuel de la CdC. Mais il faut jusqu’en 2015 rattraper le retard ».
Pour le Président, « tout n’est pas défendable, mais le réchauffement climatique ne justifie pas d’abandonner un territoire ».
Acte 3 – 4 février 2014 : une carte d’aléas commune et finalisée pour fin juin 2014
Il semble ainsi que le dialogue avec l’Etat se soit largement ouvert depuis l’arrivée du Ministre Philippe Martin, alors que ses positions étaient figées jusque-là, malgré le travail d’alerte et de sensibilisation fait depuis 2010 auprès des Ministres successifs : Nathalie Kosciuszko Morizet, Delphine Batho, etc, faisant dire à Lionel Quillet qu’il ne s’agit pas d’une affaire politique « droite ou gauche » mais d’une « absence de doctrine de l’Etat qui se forge au fur et à mesure », avec il est vrai une propension au dialogue accrue avec le dernier Ministre en date.
Philippe Martin et son directeur de cabinet ont ainsi « jugé souhaitable de prendre le temps d’examiner les études-diagnostics des digues réalisées par et pour le compte de la CdC de l’île de Ré. Il a inversé la charge de la preuve : la CdC fournit sa carte d’aléas et ses études, à charge pour l’Etat de les valider ou non ».
Ainsi une carte commune est attendue pour fin juin, « on s’est fait confiance, car on est crédibles ».
Et effectivement les 700 rétais présents à la réunion publique du 31 janvier ont pu découvrir le gigantesque travail réalisé par Casagec et J. Van der Meer. Le cabinet d’Ingéniérie a déjà pu aboutir à des résultats significatifs et très impactants pour l’île de Ré puisque là où le « REX » (retour d’expérience) de l’Etat évoque 23 km2 d’emprise submergée suite à Xynthia, Casagec aboutit à 19 km2 avec ses calages mathématiques… « L’Etat a travaillé par l’absurde, alors que nous avons travaillé sur un modèle robuste pour proposer une emprise de submersion fiable » confirme Didier Rihouey.
« 9 mois de travail et de calages mathématiques changent totalement la carte PPRL » a ainsi confirmé Lionel Quillet.
Et ces modèles sont confortés par les nombreux tests opérationnels réalisés par J. Van der Meer, même si « c’est très difficile de mettre une digue en modèle, les formules mathématiques ont été établies sur la base d’une multitude de tests (canal à houle, stabilité des murs, des revêtements…) ».
Objectif final : trouver le bon équilibre entre protection des populations, aménagement du territoire et environnement
La CdC et l’Etat disposeront ainsi dans les prochaines semaines d’un outil précis d’aide à la décision, avec un triple objectif :
– Définir un scénario de défaillance des ouvrages pour le PPR « raisonné et raisonnable »
– Mettre à l’épreuve les digues PAPI sur ce modèle
– Améliorer le dispositif de protection de l’île de Ré.
En attendant, les Rétais – particuliers, élus et professionnels – doivent tenir le coup. Certes, sur les environ 110 permis de construire actuellement bloqués, essentiellement sur le canton nord, 13 ont pu être débloqués lors d’un examen au cas par cas entre la CdC et le Cabinet du Ministère et 17 sont en cours de négociation. Il n’empêche que le Maire des Portes, Christian Bourgne, qui est l’un des seuls maires rétais à avoir signé tous les permis de construire qu’il estime concerner des zones non submersibles, et ce malgré l’avis négatif des services de l’Etat, a aujourd’hui à gérer près de 20 recours devant le Tribunal Administratif. Et ne décolère pas contre l’Etat.
Le chemin entamé au lendemain de Xynthia, qui a pris des allures de croisade contre l’Etat à l’été 2012, puis à l’été et à l’automne 2013, avant l’instauration de ce nouveau dialogue plus équilibré entre les parties, sera encore long et sans doute semé d’embûches.
Car :
- tout le territoire n’est pas défendable, certains propriétaires et professionnels seront fortement lésés ,
- aucune spoliation ne pourra être juridiquement reconnue et donc aucune indemnisation possible – comme l ‘a très bien expliqué Maître Jean-Marc Février – ,
- enfin, les « droits de mitigation » à la charge des propriétaires et/ou locataires des habitations en zones submersibles risquent fort de mobiliser les acteurs du territoire, dans le cadre du nouveau PPRL, dans les années à venir.
Observations de l’association de propriétaire Ré-Veille, du 7 février 2014
1. Sur les 13 permis débloqués + 17 en cours de déblocage = 30 (sur plus de 120/130 permis refusés aujourd’hui)… combien dans le canton Nord ? À notre connaissance zéro aux Portes… combien ailleurs ?
2. La carte publiée par le Ministère en Juin 2013 et que tout le monde considère comme pour le moins « inexacte » sera appliquée jusqu’au 30 juin 2014… au mieux ! Y compris par les tribunaux administratifs… les artisans doivent patienter.
3. La carte qui devait être présentée au cours de la réunion publique du 31/01 n’est pas publiée, en attendant une « concordance » de vue avec l’Etat ; elle est aux dires du Président de la CdC beaucoup plus favorable. Nous devrions donc avoir de bonnes surprises pour les terrains aujourd’hui dans des zones à la limite.
4. Nos élus refusent de prendre en charge les « rejets de » permis de construire… initialement les instructions devaient être faites par la CdC à partir du 1er avril 2014 ; la date est repoussée au 1er septembre 2014… toujours au mieux !
5. Que fait-on pour les successions qui doivent être déclarées d’ici cet été 2014 et pour les ISF au 1er janvier 2014… pas de réponse ! La seule question « juridique » posée par une personne présente à la réunion du 31.01.2014, n’a pas reçu de réponse.
6. Nous avons retenu une réflexion du Président Quillet, appuyée par l’expert Hollandais, « tout est protégeable sur l’île de Ré » c’est une question de moyens alors dans quel délais pouvons-nous envisager qu’il n’y ait plus aucune « zone rouge » ?… du moins dans les fameux 20 % de l’île de Ré constructibles dans le cadre des PLU et du SCOT… la question est posée.
Le bureau
NDLR : Les associations ont rencontré Lionel Quillet ce mardi 11 février.
Voir la réaction des élus de l’île de Ré face à des critiques de la Préfète (février 2014)
Voir la situation des travaux sur le littoral 4 ans après Xynthia
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