La Couarde honore deux tirailleurs sénégalais

Débutée devant le Monument aux Morts de la commune, la cérémonie couardaise du 11 novembre s’est achevée dans le cimetière.

Entouré du Maire de La Couarde, Patrick Rayton, de membres de l’équipe municipale et de Véronique Richez-Lerouge, conseillère départementale, le Président de l’Union Locale des Anciens Combattants de La Couarde, Michel Pelletier, a rendu hommage aux trentesix noms gravés sur le Monument aux Morts du Square Roger Bonin, avant d’évoquer les conflits ébranlant la paix mondiale, rendant plus que jamais important « le travail de mémoire afin d’éviter un retour des erreurs du passé ». Un second temps fort et riche de sens a ensuite mené l’assistance dans le cimetière tout proche.

« Le soldat inconnu » du cimetière couardais

Alors qu’il fait des recherches dans le cadre du Centenaire de la Grande Guerre en 2018, Michel Pelletier prend connaissance d’un procèsverbal de la Marine Nationale dans les archives communales. Celui-ci fait état de la découverte des deux corps de tirailleurs sénégalais dont un seul a été identifié, portant le nom de Noga Illibouda, originaire de Ouagadougou. L’autre corps, ne donnant pour seul indice qu’un numéro – 71920 – à l’intérieur de la vareuse (semblant être un numéro de matricule), est resté inconnu pendant plus d’un siècle. Il faudra toute la persévérance de Michel Pelletier pour qu’à « l’approche de Noël 2018 », un nom apparaisse enfin. Dri Sako était « originaire de Noumou, né en 1897 à Nioro au Soudan » (l’actuel Mali). Il est mort à vingt ans.

Triste souvenir d’un naufrage

Au lendemain d’un autre naufrage, celui de Verdun, la France mobilise toutes les forces disponibles, étendant son recrutement à ses terres coloniales. « Parmi les deux cent mille soldats venus d’Afrique, des Antilles d’Orient, d’Extrême-Orient et d’Océanie » venus se battre pour la France, « trente mille y laisseront leur vie », rappelle Michel Pelletier.

Affrété le 27 avril 1917 dans le port de Buenos Aires avec un chargement de denrées diverses, le paquebot Sequana (138 mètres) et son équipage de « 99 officiers et marins », se dirige ensuite vers Dakar où il embarque « 400 hommes du 90ème Bataillon de Tirailleurs Sénégalais et 166 autres passagers », dont femmes et enfants. Noga Illibouda et Dri Sako sont du voyage. Destination Bordeaux.

De nombreux sous-marins allemands croisent alors dans le Golfe de Gascogne et le Sequana reçoit ordre de remonter vers l’Ile d’Yeu. Le 8 juin 1917, il est malgré tout repéré, reçoit une torpille et finit par chavirer. Les barques de sauvetage sont réservées aux femmes, enfants et Européens, les tirailleurs ont des radeaux. Mais quittant trop tard le navire car ne parlant pas notre langue et ne sachant pas nager, 198 d’entre eux périront.

Noga Illibouda et Dri Sako sont parmi eux et leurs corps dériveront jusqu’aux plages couardaises, tandis que d’autres de leurs compagnons d’infortune iront s’échouer ailleurs sur l’Île de Ré mais aussi sur les îles d’Oléron et d’Aix ou encore à La Rochelle.

Noga Illibouda et Dri Sako sont morts pour la France, un pays qu’ils ne connaissaient pas et ne connaîtront jamais de leur vivant. Ils reposent néanmoins ici, au calme du cimetière de La Couarde, leurs deux noms désormais apposés sur une même plaque, inaugurée ce 11 novembre 2022 en présence des jeunes du Service Militaire Volontaire du 3ème Régiment « qui ont apporté leur concours pour l’entretien et la rénovation de leur tombe », nous dira Michel Pelletier.