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Un jugement de la Cour d’Appel de Bordeaux qui pourrait changer la donne
La Cour d’Appel de Bordeaux vient de rendre un jugement en faveur de l’île de Ré, dans un cas très attendu concernant la surélévation d’une habitation à La Couarde-sur-Mer.
Rappelons le contexte. Jusqu’à récemment l’Etat a déféré systématiquement les permis de construire délivrés en zone PPRL sur l’île de Ré, même quand il s’agit d’un garage, d’une chambre, d’une surélévation, d’un abri à vélo ou a fortiori d’une maison… Après avoir perdu 23 fois au Tribunal de Poitiers, le temps qu’une jurisprudence se mette en place et que les avocats élaborent leur stratégie de défense, depuis juin 2014 l’île de Ré a gagné 35 fois. Comme elle l’avait annoncé, l’ex Préfète de Charente-Maritime, Béatrice Abollivier, a fait quasisystématiquement appel auprès de la Cour d’Appel de Bordeaux. Ainsi, sur 11 dossiers instruits à Bordeaux (la Préfecture a retiré 3 dossiers en pleine procédure), 5 ont été jugés favorablement pour l’Etat, 5 sont en cours et un 6ème jugement très attendu vient d’être rendu, en faveur de la Commune de La Couarde-sur-Mer.
Le Président de la CdC nous expliquait il y a quelques semaines qu’il était logique que les premiers jugements ne soient pas favorables à l’île de Ré, le juge ayant besoin de se forger une idée et la pédagogie de la défense faisant son chemin. Egalement, les avocats élaborent progressivement leur stratégie, étayent et renforcent leurs conclusions sur la base des attendus des premiers jugements.
«Le PAC de l’Etat n’a pas de valeur réglementaire » estime le Juge
Dans son ordonnance en date du 25 novembre 2015 qui rejette la requête en annulation du préfet, la Cour administrative d’appel de Bordeaux souligne deux éléments majeurs. Le premier concerne l’absence d’eau lors de Xynthia : « le terrain d’assiette du projet n’a pas été inondé pendant ou après la tempête Xynthia et le permis a pour seul objet de rehausser d’un étage la maison de plain-pied existante, à usage de résidence secondaire, sans aucune modification de son emprise au sol ni création de logements supplémentaires ». Le second concerne la non-valeur réglementaire du porter à connaissance (PAC) de novembre 2014, ce qu’ont toujours soutenu les élus rétais : « Dans ces conditions, et alors que le préfet ne peut utilement opposer à la commune les recommandations du porter à connaissance de novembre 2014… lesquelles n’ont pas de valeur réglementaire, le moyen unique tiré de l’existence d’un risque pour la sécurité publique n’apparait pas, en l’état du dossier, de nature à créer un doute sérieux sur la légalité du permis de construire ».
Aller vers une finalisation concertée du PPRL de l’île de Ré
Pour le président de la CdC, Lionel Quillet, il ne s’agit pas de faire du triomphalisme « on en gagnera, on en perdra d’autres », d’autant qu’il s’attendait à cette décision sur ce cas très spécifique et exemplaire, mais il considère que les conclusions de la Cour d’appel constituent un grand pas en avant, puisque tout comme le Tribunal administratif de Poitiers elle réfute la valeur réglementaire du PAC de l’Etat. Toutefois « la Cour d’appel donne par son jugement une valorisation à l‘étage, l’Etat est aussi dans cet esprit, or la verticalisation (prévue dans la Loi ALUR) n’est pas ce qu’il y a de mieux pour l’île de Ré, nous souhaitons préserver sa typologie architecturale, et maintenir une vie permanente stable ».
Il souhaiterait désormais que la révision du PPRL avance rapidement et rencontrera le nouveau préfet, Eric Jalon, début janvier à ce sujet. « On a déjà perdu beaucoup de temps, l’île de Ré a très peu de permis de construire (lire l’encadré), sur seulement 20 % du territoire, 50 millions d’€ de travaux de protection ont déjà été réalisés et 20 millions d’arrivent, les modélisations des cartes d’aléas doivent être revues pour intégrer ces digues ». L’Etat a toujours le pouvoir de faire des PPRL anticipés, s’il ne l’a pas fait jusqu’à maintenant sur l’île de Ré, ni ailleurs en France, c’est probablement qu’il sait que de tels PPRL, non concertés et non approuvés par les élus et la population seraient immédiatement attaqués au tribunal.
Or l’annulation du PPRL d’Alès constitue un précédent fâcheux. Une sortie par le haut dans ce dossier, rendue possible avec l’arrivée d’un nouveau Préfet, est donc souhaitable pour tout le monde.
« Nous devons tous nous poser la question : comment vivre avec un risque, notre exposition participe de cette démarche » explique Lionel Quillet. En effet, la Communauté de Communes a travaillé d’arrache-pied durant deux mois au montage d’une exposition intitulée « La défense des côtes sur l’île de Ré, du moyen-âge à nos jours » qui sera accessible librement à partir du 18 décembre.
Voir 2 autres jugements sur le dossier des risques littoraux
Environ 120 permis de construire de maisons délivrés par an sur l’île de Ré
Ré à la Hune a fait un point avec la CdC sur les permis de construire instruits depuis un peu plus d’un an : « Nous nous sommes aperçus que les statistiques régulièrement communiquées par l’Etat sur les permis de construire entretiennent une certaine confusion, car il s’agit en fait d’actes administratifs d’urbanisme qui amalgament sans distinction des permis d’aménager, de démolir, des demandes préalables, des certificats d’urbanisme et enfin toutes sortes de permis de construire y compris de garages, de piscines ou encore de chambres », explique le Président.
Ainsi depuis octobre 2014, le service instructeur de la CdC a reçu environ 1000 documents d’urbanisme (25 % environ en zone PPRL), dont 150 concernent des prolongations de délais, actes purement administratifs.
Sur les 850 demandes, 450 ne sont que des certificats d’urbanisme, permis d’aménager, de démolir, qui ne sont donc pas des demandes de permis de construire.
Sur les 400 demandes de permis de construire reçues en un an pour l’île de Ré, 50 % concernent des extensions pour un garage, une chambre supplémentaire, etc. Seules 41 % de ces 400 demandes concernent des maisons, soit 180 demandes de permis de construire sur un peu plus d’un an.
Sur ces 180 demandes, le service instructeur de la CdC donne en moyenne un avis défavorable pour deux avis favorables (le Maire, seul signataire des permis de construire, suivant ou non cet avis), avec une démarche « assez tatillonne », plus que celle de l’Etat qui était à l’époque à la fois instructeur et contrôleur.
« Ce sont 120 à 130 maisons qui sont validées par an, soit moins de 10 par commune sur le nord de l’île de Ré et entre 10 et 20 par commune sur le sud de l’île de Ré, voilà la réalité de l’urbanisme sur l’île de Ré » conclut Lionel Quillet.
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