Jacques Djeddi : Bruce Lee made in Ré !

Arbitre international, juge d’examen aux Dans, le professeur et président de l’Océan Karaté Club de La Flotte est avant tout un homme de coeur et de défis qui a oeuvré pour intégrer les vertus de la discipline à un public en situation de handicap au sein de la fédération française.

Difficile de dérouler le CV de Jacques Djeddi tant son palmarès est riche, au delà même de la seule pratique de son sport favori. En trente-cinq ans de carrière, le karatéka a gravi tous les échelons, porté par la passion d’une maîtrise qui convoque autant la créativité et le développement psychologique que les aptitudes physiques.

N’oublions pas que le Dojo (littéralement : étudier, chercher la voie) était historiquement la salle du temple consacrée à la méditation bouddhiste.

Responsable d’arbitrage pour la ligue régionale Nouvelle Aquitaine, Jacques Djeddi est également juge national kata (chorégraphie codée) et juge international combat depuis 2015. En décembre 2018, il obtenait son 6ème Dan, un an pile après avoir reçu des mains du préfet de La Charente Maritime la médaille d’argent du ministère de la Jeunesse, des Sports et de la Cohésion Sociale.

Mais ce n’est pas tout ! Le dépassement de soi, Jacques Djeddi l’expérimente dans bien des domaines grâce à la richesse du karaté.

Du pénitencier de Saint-Martin à la route du bagne

En 2001 il participait à un raid en Guyane et parcourait avec succès 180 km en pleine forêt amazonienne. Cinq ans plus tard il s’attaquait à la traversée de l’Atlantique à la rame, en solitaire et sans assistance alors même qu’il n’avait aucune expérience de la navigation ! Arrivé à la 9ème place à Cayenne, il sera décoré de retour sur l’île de la médaille du « Courage et Dévouement », pour avoir secouru quelques minutes après le départ de Saint-Louis du Sénégal neuf personnes dont les embarcations avaient été renversées par une déferlante.

Ces défis, il les a entrepris à la demande des prisonniers qu’il entraîne depuis trente ans. Dès 2008, il était nommé responsable national du karaté carcéral, une première en France. À la maison centrale de Saint-Martin de Ré (connue pour accueillir des détenus condamnés à de très longues peines) son implication contribue à la resocialisation. « C’est une activité où les règles sont omniprésentes. Il y a une hiérarchie, par la fonction et par les grades, qui s’instaure dès l’instant où l’on entre sur les tatamis ».

Du karaté adapté pour mettre les préjugés au tapis

La pratique du para-karaté se développe nettement ces dernières années et Jacques Djeddi peut là encore se targuer d’avoir été le premier club à accueillir des adultes porteurs d’un handicap, aujourd’hui encore le plus important de France.

Telle une philosophie de vie, la discipline est pour tous un outil de développement personnel, pour une meilleure connaissance de soi et une meilleure capacité à interagir avec l’environnement et les autres.

Tous les jeudis matin, le petit groupe de résidents volontaires du CDAIR* investit avec Théo Brand, leur moniteur de sport, l’espace Bel-Air à La Flotte pour une heure et demie d’un moment de partage amical et ludique autour des valeurs du karaté. Des habitués pour qui il a développé une pédagogie proche de celle qu’il met en place avec les petits, et qu’il considère comme « des licenciés comme les autres » quoique particulièrement « attachants, entiers et sincères ». Les progrès sont bien là, même si l’objectif des cours est davantage d’accéder à une vie sociale et associative. Bientôt aura lieu en interne (le projet est en cours de finalisation), la toute première compétition mixte entre valides et « para », et Jacques l’assure : « Il y aura des podiums pour tous ».

* Centre Départemental d’Accueil de l’Ile de Ré pour les adultes souffrant de déficience mentale.