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Ile de Ré Galop : premiers pas vers une rencontre
La démarche est riche de sens. Après les écoles et la maison de retraite, Ile de Ré Galop part à la rencontre des détenus du Centre pénitentiaire de Saint-Martin de Ré.
Qui la connaît sait à quel point elle est sans fards, déterminée et positive, nourrie de convictions profondes. « Quand j’ai parlé de faire venir les écoles, on m’a dit c’est formidable. Quand j’ai parlé de la maison de retraite d’Ars, ça a étonné, surtout le fait de faire venir les résidents. Quand j’ai évoqué la prison, il y a eu moins d’applaudissements », sourit Véronique Vigouroux.
Alignement de planètes
Oui mais voilà, pour Véronique, Ile de Ré Galop est l’Ecurie du Territoire. Et qui dit territoire dit absence d’exclusion. La prison ? Même pas peur, d’autant qu’elle a le soutien du président de la CdC de l’île de Ré, Lionel Quillet, et du Député, Olivier Falorni. Bon d’accord, c’est loin d’être simple, mais ce n’est pas ça qui va la faire reculer. Au contraire peut-être… Elle se met en tête d’emmener le valeureux Prophets Pride (aujourd’hui à la retraite), à Saint-Martin.
Le lien se fait par l’élue de Saint- Clément Marion Silhol, venant un jour accompagnée d’une autre membre de l’écurie, également visiteuse de prison. Celle-ci organise une rencontre avec Natacha Dennon, Coordinatrice culturelle du SPIP* 17. « Véronique m’a présenté l’écurie et ses différentes fonctions. J’ai trouvé l’idée de partager cet univers, cette volonté d’apporter une ouverture au monde équin au sein même de la prison très enrichissante pour les détenus », nous explique Natacha. Un chapitre s’ouvre…
Raconter Ile de Ré Galop
C’est ce que propose Natacha à Véronique qui ne se fait pas prier. « La première fois, j’ai présenté l’écurie à une vingtaine de détenus », explique-t-elle, tandis que Natacha nous précise que « la médiation a été proposée à tous les détenus. Ils s’inscrivent s’ils le veulent, nous sommes sur la base du volontariat ». « Je leur ai expliqué le projet, qu’eux aussi sont des habitants du territoire. C’était très touchant car ils ont été interpellés par la démarche », raconte Véronique ajoutant qu’ils « ont été particulièrement sensibles à l’initiative envers les Anciens. Mais bien sûr, eux aussi savent ce qu’est l’enfermement… ». « Ils m’ont beaucoup interrogée sur le travail avec les enfants et ce qu’apporte le cheval, écoute, respect et maîtrise de soi ». L’un deux m’a dit : « il faut en faire plus avec les enfants, c’est à cet âge-là qu’on dérape », poursuit Véronique gravement. Lors de cette première rencontre, les détenus ont également pu visionner des vidéos des courses.
Véronique repart avec une certitude : « Après avoir compris ce qu’était l’univers carcéral, je me suis dit que ce n’était pas pour Prophets Pride. Il vit une retraite paisible, je ne peux pas lui imposer ce stress ».
Création d’un groupe de parole
C’est l’objet de la seconde rencontre, suspendue à l’accord des détenus. Que nous enseigne le cheval ? « L’équilibre mais aussi la chute », explique Véronique. Et c’est vrai que, quel que soit le niveau, qui a pratiqué l’équitation est tombé…
« Quel sens a une chute, pourquoi est-on tombé ? », interroge Véronique. Face à la chute, deux attitudes : « Soit on abandonne, soit on lit l’information, on l’analyse et on passe à un autre stade. En fait on ne peut pas passer une étape sans chute », estime-t-elle. Et elle sait de quoi elle parle. « Je leur ai raconté l’histoire de ma chute lors d’un concours. En réaction, j’ai été violente avec mon cheval », confie-t-elle avec regret. Résultat, elle perd le lien avec lui, un lien qu’elle a dû aller rechercher en travaillant profondément. « Les détenus ont clairement désapprouvé cet acte », raconte Véronique avouant être sortie de ce second échange très impactée : « Je ne pensais pas trouver autant de sensibilité et d’humanité. J’ai vu leur vulnérabilité », se souvient-elle encore émue. « Si vous saviez ce que j’ai fait, vous ne seriez pas là », m’a dit l’un d’entre eux. « Je lui ai répondu qu’il avait déjà été jugé et que moi qui suis-je pour le juger… Je ne m’attendais pas à autant de normalité », conclut Véronique, évoquant l’un des détenus « qui ne sortira jamais ».
Et maintenant ?
Pour Natacha Dennon, pas de doute, l’initiative a été accueillie positivement et les détenus étaient satisfaits de la rencontre, « certains ont découvert l’univers équin, d’autres le connaissaient. Ce fut un bel échange », assure-t-elle. Alors il s’agit maintenant d’aller plus loin, étape par étape. « Un troisième rendez-vous est prévu cette fois avec Popeye, un habitué des rencontres », se réjouit Véronique évoquant le poney qui a déjà fait plusieurs visites à la maison de retraite d’Ars. « Et une 4ème étape serait de les autoriser à sortir pour une visite de l’écurie », avance-t-elle prudemment.
Une porte ouverte que ne ferme pas Natacha Dennon : « L’idée est aussi de faire découvrir aux détenus ce qu’il y a sur l’île qui est leur lieu de résidence. Et c’est une chance d’avoir des partenaires locaux. », confirme la Coordinatrice du SPIP 17.
Des extraordinaires facultés du cheval, Véronique Vigouroux est l’une des ambassadrices les plus convaincues. Absent jusqu’alors de ces rencontres, il a déjà servi de lien avec les détenus, éveillant leur intérêt et leur réflexion. Puissant, élégant mais aussi extrêmement sensible et doté d’une intelligence émotionnelle élevée, le pouvoir du cheval et de la médiation équine ne sont plus à démontrer. Véronique l’a déjà éprouvé auprès des élèves des écoles et des résidents de la maison de retraite d’Ars.
Depuis quelque 7000 ans qu’il vit aux côtés des hommes, le cheval a beaucoup de choses à nous apprendre. « Le cheval est un bon maître, non seulement pour le corps mais aussi pour l’esprit et le coeur », disait déjà Xénophon, philosophe grec disciple de Socrate, au Vème siècle avant Jésus Christ…
*SPIP : Service d’Insertion Pénitentiaire et de Probation
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