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Gilles Perrin, l’homme du « vivant »
Ne parlez pas à Gilles Perrin de développement exponentiel d’une production volontairement limitée. Pour ce « jardinier scientifique » d’une exigence absolue, l’essentiel est ailleurs. Rencontre au pays des senteurs et des saveurs, là-bas, du côté de la Pointe du Grouin.
Gilles Perrin et sa farandole de plantes aromatiques sont entrés cette année dans le cercle restreint des « Saveurs de Ré », et ce n’est pas sans fierté que cet agrobiologiste travailleur de la terre a signé la charte ad hoc et endossé le tablier emblématique, remis par Lionel Quillet lors de la journée « Les Régalades ». Une reconnaissance couronnant le fruit de plusieurs années d’un travail minutieux. Alors, pour en savoir plus, une rencontre rapide et un coin de table ne suffisent pas.
Entre terre et mer
Déjà, l’ « Estancia Bel Air », il faut la trouver. Tout au bout de la Pointe du Grouin, face à la mer, force est de constater qu’on l’a loupée. Avant le demi-tour, une pause s’impose devant la majesté du paysage : terre, mer, ciel, et dans le vent des parfums de sel et d’iode. Nous voilà au cœur de l’Ile de Ré sauvage et fière. Il y a peu de bâtiments dans cette contrée. Autre arrêt, auprès d’un ostréiculteur cette fois, qui accompagne ses indications d’un geste : « Ce sera là ».
Là, c’est un jardin de carrés potager où de nombreux plants profitent goulûment d’un soleil matinal déjà chaud. Gilles Perrin m’accueille sous la remarquable charpente de son bureau atelier cuisine. « Je travaille le vivant » martèle-t-il sans relâche. Alors vivant tout doit être, jusqu’au bois non traité de ce lieu tout en un, édifié dans les plus pures règles de l’art. C’est simple mais magnifique. Une longue table et des dessins d’enfants au mur, une armoire bleue remplie de fioles, des alambics de cuivre miniature et la table où nous prenons place composent le décor. Il fait bon et on se sent bien.
Gilles Perrin parle avec passion de son métier, de ses plantes et de son terroir, 12 hectares composés de terres hautes, faites de calcaire et d’eau douce, et de terres basses, argileuses et maritimes. Une vraie richesse et des caractéristiques bien différentes quand on travaille en biodynamie , c’est-à-dire avec la volonté de faire vivre un sol en respectant sa structure. Car tout le monde l’aura compris, Gilles Perrin fait de la culture bio un véritable sacerdoce. Il veille drastiquement sur ses terres et surveille la santé de son sol avec des soins jaloux : pas question de tolérer la moindre contamination.
Visite au jardin
Alors ces plantes, on va les voir ? Et les sentir ! Dans les carrés de différentes tailles où s’épanouissent des espèces que je reconnais et d’autres dont Gilles me donne les noms latins, des surprises olfactives m’attendent, comme ce basilic dont on jurerait qu’il s’agît d’un bâton de cannelle, cette plante d’où s’échappent des effluves d’ananas ou encore ce fenouil qui fleure le pastis et plus curieux encore, cette plante qui a le goût de l’huître ! Mais au-delà de ces phénomènes, ce qui frappe c’est évidemment la variété mais aussi l’intensité des parfums, une puissance qui perdurera après la cueillette, lorsque les plantes auront été séchées avec tout le soin qu’elles méritent, sur des clayettes réalisées de manière artisanale tout comme les tamis qui filtreront les imperfections demeurant après le broyage. A l’ « Estancia Bel Air », absolument tout est pensé et organisé pour que chaque étape ne compromette en rien le produit final.
Mais pour l’heure, penchés sur les plants brillants au soleil, nous savourons le végétal dans son entier, les parfums poivrés et citronnés du thym et de la coriandre, les nuances subtiles des origans, la délicate menthe anglaise et la puissante camomille. En Gilles Perrin, il y a quelque chose du talent des « nez » des grands parfumeurs couplé au savoir des oenologues, toute une science de la nature qui se fait poème olfactif et ode à Epicure.
Trouver le goût de l’Ile de Ré
C’est ce que recherche ce travailleur du vivant, dans les plantes qu’il « élève ». Beaucoup de plantes de garrigue car Gilles Perrin le rappelle, les espèces méditerranéennes sont nombreuses sur le territoire rhétais. Il m’apprend aussi que certaines plantes ne s’aiment pas (c’est prouvé chimiquement). Mélangées à d’autres molécules, ce sont encore elles, les plantes, qui décident si celle-ci leur convient ou pas. Ainsi l’estragon adore-t-il le vinaigre au contraire du thym. Moralité : en achetant un vinaigre aromatisé au thym, sachez que celui-ci ne peut être que le produit d’un arôme chimique induisant l’ajout d’un conservateur. On pourrait écouter longtemps Gilles Perrin nous raconter la personnalité et le langage des plantes.
Alors bien sûr, ces heures de travail et ce souci constant de la perfection ont un coût. Nous sommes dans le haut de gamme de l’herbe aromatique. Mais Gilles Perrin est aussi soucieux de rendre le goût accessible à tous. Aussi travaille-t-il à élargir sa gamme tout en restant au top côté qualité, avec l’objectif de satisfaire une clientèle familiale, de favoriser l’éducation au goût et d’éviter la consommation excessive de sel. Faire meilleur et autrement, tel est le crédo. Aux côtés des plantes séchées et des épices, Gilles Perrin concocte aussi de délicieux sirops et des huiles essentielles pour faire des infusions ou des vinaigres aromatisés. Mais revenons en cuisine : Gilles Perrin a pour (modeste) ambition de mettre le goût à table.
Ainsi peut-on se nourrir délicieusement et sans se ruiner. A nous une cuisine simple et de saison, tout sauf ennuyeuse car enrichie des mille et une nuances gustatives apportées par des plantes qui nous réservent de bien jolies surprises dans nos assiettes !
Où trouver les produits « Estancia Bel Air » ?
Gilles Perrin pratique la vente directe aux restaurateurs et magasins de production comme Le Panier de nos Campagnes ou encore Les Producteurs réunis. Il propose aussi aux entreprises des cadeaux pour les fêtes de fin d’année ou des évènementiels. Enfin il participe au Salon bio de La Rochelle et à quelques évènements sur l’Ile de Ré.
ESTANCIA BEL AIR – 18, route du Grouin à Loix – 06 99 41 41 34
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