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Franck Michel : un rescapé
Frank Michel a disparu des écrans rétais depuis plusieurs années. Pas de nouvelles, pas d’expositions jusqu’en juin dernier lors du festival d’arts actuels à l’Hôtel de Clerjotte. Que s’est-il passé, qu’était-il devenu ?
Élevé à l’ombre de la bienveillante figure tutélaire d’un grand-père toscan, il a vécu une enfance heureuse. Obligé de s’expatrier pour trouver du travail, le grand-père, qui travaillait la pierre, parcourait à pied pratiquement toute l’Europe, jusqu’au jour où il rencontra une avenante Normande qui devint son épouse et fit souche en France. Il parlait plusieurs langues, était convaincu de la nécessité d’une Europe unie et sa vie était régie par des valeurs qu’il estimait essentielles de transmettre à ses descendants : le travail bien fait, le partage, la tolérance et le respect de la parole donnée. La Villa Verdiania abritait les grands-parents, leurs enfants et les petits-enfants. C’était un véritable paradis pour ces derniers dont le père, navigateur, était absent durant de longues périodes. Frank se souvient de chacun de ses retours comme d’une fête : il arrivait chargé de grandes malles contenant des jouets du monde entier.
Les années de formation
La vie aux côtés d’un grand-père originaire de Florence, sculpteur à ses heures laissera forcément des traces. À 8 ans, Frank possède déjà tous les outils permettant de travailler la pierre comme le bois et la sculpture l’accompagne déjà. À 16 ans et demi, il s’engage dans la Marine nationale et entre à l’école des mousses à Brest. Il a la très grande chance, à la fin de la première année, de pouvoir choisir une spécialisation qui l’intéresse et engagera son avenir professionnel : la météorologie. La formation suivie dans la Marine, où il restera six ans, débouche sur une équivalence dans le civil et Frank deviendra ingénieur météo. Cette météo qui lui fait tutoyer le ciel lui convient parfaitement et il devient très performant. Cela se sait et un chasseur de têtes de la compagnie pétrolière Chevron le contacte. Il est recruté, complétant sa formation par des études d’océanographie qui le passionnent.
Une vie ponctuée de terribles dévastations
C’est ainsi qu’il se retrouve en Écosse, à Kishorn un petit village perdu au fin fond d’un loch, responsable des prévisions météos dans le cadre de la construction d’une gigantesque plate-forme pétrolière. Tous les ouvriers sont suspendus aux lèvres du météorologiste dont ils attendent l’avis avant d’engager les travaux sensibles aux intempéries. Impression de toute puissance déjà éprouvée à Mururoa, où il avait été envoyé dans le cadre de la Marine nationale, lorsque la mise à feu d’une bombe nucléaire dépendait de son pronostic.
Jusque-là, tout va bien, il gagne confortablement sa vie et acquiert, avec son épouse française, une grande maison située en bord de mer. À la fermeture du chantier, trois ans plus tard, il est licencié économique, mais les problèmes financiers ne sont pas à l’ordre du jour. Par contre, son épouse souhaite divorcer et rentrer en France et lui assène le premier des coups du sort qui le dévasteront à plusieurs reprises. Les femmes seront toujours, directement ou indirectement à l’origine des drames qui marqueront cet homme tendre et son dernier divorce le ruinera totalement.
Quand il commence à rêver de fruits mûris au soleil, il comprend qu’il est temps de rentrer en France. Il entreprend alors une analyse qui le conforte dans sa démarche artistique : apporter la joie et la force à tous, quelles que soient la nationalité ou la langue, par le biais de son art. Parallèlement un merveilleux vieux réfugié roumain lui enseigne tout ce qu’il sait sur le métal et la fonderie. C’est une découverte majeure pour Frank qui trouve là le matériau idéal pour son travail. Il en aime et joue avec les couleurs, les oxydations et les patines. Toutes les conditions sont désormais réunies pour que Frank devienne le sculpteur que nous connaissons aujourd’hui. Dans les années 90, il découvre l’île de Ré où il s’installe avec joie près de la mer.
Le coup de grâce
Frank, rêveur, pétri des grands principes d’éducation de son grand-père, vit la tête dans les étoiles. Il est à mille lieues des courantes bassesses de l’âme humaine tout autant que des arcanes de l’administration. Il paiera très cher son apprentissage, y perdra ses illusions et tous ses biens matériels. À chaque fois il réussira à se reconstruire jusqu’à ce jour de 2009 où il entame une grève de la faim de 32 jours en raison d’une menace d’expulsion de son atelier de La Flotte sans espoir de se reloger. Cette fois-là sera suffisamment sérieuse pour qu’il en perde l’envie de sculpter. Beaucoup d’amis, des élus dont Léon Gendre maire de La Flotte, se mobiliseront pour tenter de le sortir de là. Mais le mal est fait, profondément et durablement. Aujourd’hui, grâce à une femme, il a retrouvé un lieu à lui qu’il aménage pour exposer ses sculptures et recréer « le monde merveilleux de Frank Michel ». Il ne s’est pas encore remis à sculpter, mais il est serein, apaisé. Il ne se pose plus seulement la question de savoir « comment il va crever » et pense aux sculptures qu’il aura encore le temps de faire.
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