Une « Entreprise du Patrimoine Vivant » en pleine expansion
On oublie parfois qu’avant d’être devenu un homme politique de premier plan sur l’île de Ré et au Conseil général de Charente-Maritime via la Mission Littoral, Lionel Quillet était et reste un chef d’entreprise, et même l’une des premières de l’île de Ré.
S’il mène très différemment la Communauté de Communes et l’Atelier Quillet, la chose publique et la chose privée, on sent toutefois – pour qui connaît le monde économique – l’esprit, l’organisation, l’animation d’un homme d’Entreprise, ayant certes aussi un fort sens de la vie politique, ce qui est somme toute assez rare, tant ces deux univers sont différents.
Qui n’a pas rencontré un jour Lionel Quillet dans son entreprise, au milieu de ses livres, ne peut mesurer l’intense passion qui l’anime dès qu’il parle de son univers professionnel, de ses corps de métiers, de ses équipes et de ses projets : « L’Atelier, les livres c’est ma passion, comme c’était celle de mon père qu’il m’a transmise très jeune puisqu’à 17 ans je sillonnais déjà les brocantes et les routes avec lui le week-end. Les ouvrages sont mon refuge, mon évasion, je m’y plonge, ils m’aspirent. Le dimanche matin vous me trouverez toujours à la librairie, même si elle est fermée, au milieu de mes livres, c’est là que je me ressource ».
Bientôt 30 ans et quelques dommages co-latéraux à l’activité politique
En 2017 l’Atelier Quillet fêtera ses 30 années d’activité, dans un contexte national où les relieurs et restaurateurs d’ouvrages anciens de 2000 en 1987 sont passés à moins de 200 aujourd’hui, entraînant une perte de savoir-faire et de mains extraordinaires.
Tandis que d’autres métiers d’art tels la haute couture ou la cuisine vivent grâce aux produits dérivés, la restauration d’ouvrages anciens n’a guère l’équivalent et créer un atelier privé ne serait aujourd’hui plus viable.
D’abord seul les premières années, Lionel Quillet n’embauche son premier salarié qu’en 1994 et crée progressivement six ateliers employant jusqu’à 45 personnes et finalement regroupés en 2009 en un seul bâtiment dans la ZA de Loix. A partir de 2008/2009 avec la crise les budgets se resserrent et les effectifs sont un peu réduits. Xynthia en 2010, qui épargne toutefois l’Atelier Quillet situé en zone refuge à 7 mètres NGF, suivi entre 2011 et 2013 de cinq contrôles Urssaf et fiscaux – dont il ressort avec 0€ de redressement – et du non renouvellement subi du soutien d’Oséo – « tout lien fait avec mes activités politiques et publiques et mes bras de fer répétés avec l’Etat notamment au lendemain de Xynthia serait simple supputation » dénonce-t-il – n’altèrent pas son énergie, « bien que ce soit leur principal objectif. Sans oublier la suspicion qu’ils génèrent auprès de tous, et notamment des salariés, et du temps qu’ils demandent, et que l’on ne consacre pas au développement ».
« Faire le bon diagnostic pour délivrer le bon protocole »
L’Atelier est aujourd’hui structuré autour de 36 salariés et est capable d’apporter toutes les réponses à de multiples demandes. Souvent ce chef d’entreprise fait le parallèle avec le corps médical puisqu’à l’instar d’un médecin le professionnel de l’ouvrage ancien doit faire le bon diagnostic pour son « patient », pour choisir la bonne solution technique et mettre en place le protocole adapté. A chaque époque, à chaque ouvrage il convient d’apporter une solution et un protocole personnalisés.
Le premier corps de métier concerne les restaurateurs du corps de l’ouvrage qui se penchent sur la déchirure des pages, l’acidité du papier ou encore le problème des encres anciennes. Vient ensuite le métier de relieur, avec une palette complète de savoir-faire depuis le 15è siècle jusqu’au 21è siècle, une couture du 17è siècle étant très différente de celle du 20è siècle. Les professionnels sont ainsi très spécialisés. Viennent ensuite les doreurs, sans oublier les restaurateurs de documents iconographiques non reliés, tels les cartes, affiches ou plans anciens : ce sont des spécialistes du parchemin qui interviennent. Au total, l’Atelier emploie 27 professionnels spécialisés, formés dans l’une des trois écoles publiques ou dans des écoles privées.
La restauration complète d’un ouvrage s’étale en moyenne sur 2 à 3 mois, il faut laisser reposer l’ouvrage pour voir comment il évolue, avant d’achever le travail.
Outre les réponses techniques qu’il apporte, l’Atelier Quillet dispose d’une structure logistique organisée autour des trois cahiers de charge différents exigés par les archives nationales, départementales et municipales d’un côté, les archives des bibliothèques nationales de l’autre, et enfin ceux des Musées de France. En effet, la clientèle publique représente 90 % du chiffre d’affaires de l’Entreprise, les particuliers pesant pour 7 % et les visites, stages ou ventes d’ouvrages à la librairie se montant à seulement 3 % de l’activité. Les trois technicocommerciaux doivent ainsi aller sur place aux quatre coins de la France afin de recueillir toutes les informations qui permettront d’établir le devis, puis si l’Atelier remporte le marché public il leur faut aller chercher le document précieux et enfin, une fois la restauration achevée, le rapporter toujours dans des conditions de transport extrêmement sécurisées.
Une entreprise hors norme, soutenue par ses banques !
Si l’on y ajoute l’équipe de Direction et administrative, ce sont en tout 36 personnes qui sont salariées en CDI à l’Atelier Quillet, labellisée « Entreprise du Patrimoine Vivant », objet de grande fierté de Lionel Quillet et cette organisation très atypique – un ratio de 36 salariés pour un chiffre d’affaires avoisinant les 2 millions d’€ est totalement « hors normes – n’a pas manqué de surprendre à ses débuts les banques qui ont toutefois toujours soutenu son développement, elles ont même pris en 2011 le relais d’Oséo quand cette banque publique d’investissement m’a lâché brusquement ».
Depuis 2013 et le nouveau contexte de crise économique, l’Atelier Quillet est reparti de l’avant et mise sur le futur « C’est au moment où le contexte est mauvais qu’il faut savoir investir et se développer, c’est pourquoi j’ai décidé d’investir dans l’extension de nos bâtiments qui de 900 m2 vont passer à 1600 m² avec aussi davantage de parkings– soit plus de 900 000€ d’investissement – afin d’augmenter la capacité de l’atelier et offrir à mes collaborateurs de meilleures conditions de travail, soit in fine une meilleure qualité de prestations et un meilleur rendement, d’offrir un lieu dédié aux produits dérivés que sont les stages d’initiation et de découverte du livre – le stage « découverte » qu’il espère lancer au printemps/été 2015 permettra d’apprendre en une semaine à relier un ouvrage – et la librairie, « qui fut mon premier métier et reste pour moi source de plaisir et mon havre de paix », dont l’extension permettra à tous de prendre le temps de découvrir nombre de beaux ouvrages, qui vont de 5 à 5000 €… Le nouvel agencement des locaux permettra aussi d’optimiser les visites qui représentent la 3è activité et d’accueillir des groupes scolaires et de touristes, par exemple. Les salons du livre constituent aussi une autre ouverture sur l’extérieur.
L’Atelier Quillet devrait ainsi dans les deux prochaines années continuer de recruter pour retrouver son effectif de 45 salariés. Dans l’immédiat, il recrute un responsable pour les activités de librairie et de visite, avis aux amateurs de livres ayant un esprit d’entreprise et du dynamisme à revendre !
En se modernisant et en investissant, l’Atelier Quillet entend se maintenir à ce niveau d’excellence qui en a fait l’un des deux premiers ateliers de restauration d’ouvrages anciens en France, et faire partager ses savoir-faire très spécifiques au plus grand nombre. Etre une « Entreprise du Patrimoine Vivant » constitue un honneur mais place aussi très haute la barre, ce qui n’effraie pas Lionel Quillet, très serein sous sa casquette de chef d’entreprise.
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