Des équilibres politiques territoriaux bouleversés
L’avant-projet de loi portant décentralisation et réforme de l’action publique dit « Acte de décentralisation 3 » et la réforme électorale en cours vont fondamentalement modifier les équilibres politiques des territoires.
Pour ce qui concerne les élections cantonales, deux conseillers devraient désormais être élus par canton, au scrutin majoritaire à 2 tours, sur une base « chabada » systématique (un homme et une femme !), ce qui accroîtra le nombre d’élus. Et fera exploser le nombre de femmes actuellement très minoritaires à l’Assemblée départementale. Le nombre d’élus ne devrait toutefois croître que légèrement, puisqu’en parallèle le nombre de cantons va être réduit quasiment de moitié, passant de 51 à 27 cantons environ, la population de chaque canton devant se situer entre – 20 % et + 20 % de la moyenne de population départementale.
Deux conseillers généraux – un homme, une femme – pour un seul Canton rétais
Ce qui laisse planer une incertitude sur le Canton de l’île de Ré – qui représente environ 18 à 19 000 habitants, alors que la moyenne départementale approche les 24 000 habitants, bien que la logique d’une certaine cohérence territoriale devrait l’emporter sur un calcul purement mathématique. Les objectifs politiques d’une telle réforme qui pourrait faire basculer la majorité départementale font réagir le Président, Dominique Bussereau, qui dénonce notamment le risque d’une sous-représentation des territoires ruraux dans le prochain Conseil général. L’existence d’un seul canton rétais au lieu de deux va bien entendu entraîner une âpre bataille pour les élections départementales de 2015 entre les deux candidats quasi déjà déclarés (sauf surprise aux municipales de 2014) que sont Léon Gendre et Lionel Quillet. Reste à savoir quelles seront leurs « compagnes chabada »…
Tout aussi importante, la modification du mode de scrutin aux municipales dans les communes de + 1 000 habitants, avec l’introduction de la proportionnelle, va sensiblement modifier la donne en facilitant l’entrée de groupes d’opposition, dans des communes habituées à passer des listes quasi entières. Sur l’île de Ré, seules les communes de Loix, des Portes et de Saint-Clément y échapperaient compte tenu de leur population électorale. A contrario, certains conseils municipaux devront apprendre à gérer des composantes d’opposition renforcées (Ars, la Couarde, La Flotte, par exemple).
La région et les intercommunalités sensiblement renforcées
L’avant-projet de l’Acte de Décentralisation 3 désigne quant à lui « chaque catégorie de collectivités territoriales comme chef de file pour la mise en oeuvre de plusieurs compétences nécessitant l’intervention de collectivités relevant d’une autre catégorie ». Ainsi la région se voit confier des responsabilités de chef de file en matière de développement économique, de tourisme, d’orientation tout au long de la vie et de transport. Tandis que le département est quant à lui investi de responsabilités similaires en matière d’action sociale, de handicap et de solidarité des territoires. Autrement dit les compétences des régions se voient largement renforcées, tandis que celles des départements sont fortement recentrées. Et les fonds européens seront très largement fléchés vers les régions, par transfert ou délégation de l’État.
L’ensemble de la « gouvernance territoriale » sera encadrée et organisée via une « conférence territoriale de l’action publique » dans chaque région, pour aboutir à un « pacte de gouvernance territoriale », tandis qu’un « Haut Conseil des Territoires » constituera le cadre du dialogue permanent entre l’Etat et les collectivités territoriales.
En ce qui concerne « la territorialisation de l’action publique locale », l’intégration communautaire est accrue : les compétences obligatoires et des compétences optionnelles des communautés de communes sont renforcées.
Ainsi, leurs compétences obligatoires – tout comme celles des communautés urbaines et d’agglomération – devraient être complétées par quatre nouvelles compétences, parmi lesquelles la « promotion du tourisme par la création d’offices de tourisme » et « l’aménagement de l’exploitation de réseaux de communication électroniques ». Il est à noter aussi qu’outre l’optimisation des politiques publiques par une meilleure répartition des compétences, la clarification des responsabilités des collectivités territoriales et de l’État et la territorialisation de l’action publique, cet Acte de décentralisation 3 vise aussi la démocratisation de la gouvernance locale, au travers de la transparence et la responsabilité financières et de la participation des citoyens à la vie des collectivités via un droit de pétition. Ce dernier chapitre reste toutefois bien maigre, à ce stade.
La répartition des compétences tourisme serait ainsi totalement modifiée, et s’il s’agit d’une opportunité bienvenue pour la Communauté de Communes de l’île de Ré d’acquérir enfin la compétence tourisme à moindres frais « politiques » (c’est la loi…), le transfert des compétences des comités départementaux de tourisme vers les Régions soulève une levée de boucliers…
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