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De la fourest de Ré au petit bois de Trousse Chemise
Jacques Boucard, dans le cadre des « Journées du Patrimoine de Pays et des Moulins » a donné le 26 juin une conférence, organisée par l’association Vauban Fortifications au musée Ernest-Cognacq. L’objectif était d’expliquer les raisons de la disparition de la forêt dans l’île et dans quelles conditions s’est opéré le reboisement
Le boisement a beaucoup évolué sur l’île au fil des siècles. La forêt qui couvre partiellement Ré est récente. Il existait autrefois une importante forêt dite primitive mais qui disparaîtra dès le Moyen Age. Au moment de l’occupation romaine, il existe quelques villages sur un territoire constitué de quatre îles qui vont disparaître à des dates différentes, se retrouvant soudées à la plus grande île. La population peu nombreuse laisse croître une belle forêt primitive. Les invasions barbares et en particulier celles des Vikings vont dépeupler les îles de l’Atlantique aux environs de l’an Mil, si bien que la forêt primitive couvrira l’île sans être malmenée par l’homme.
Au début du XIe, l’île commence à se peupler. Guillaume, grand duc d’Aquitaine et comte de Poitiers, dit Guillaume le grand, encourage l’installation de domaines ecclésiastiques dépendant des grandes abbayes sises sur le continent telle Cluny, Maillezais et Notre-Dame du Puy. Il y aura alors quatre prieurés sur Ré, puis l’abbaye des Châteliers verra le jour. Le but de Guillaume le grand est de faire venir une population active qui défrichera afin d’implanter la vigne et d’assurer la défense de l’île en cas d’invasions ou de guerre. Sa motivation relève du bien être de ses intérêts. Il est économiquement plus intéressant de planter de la vigne et de vendre sa production plutôt que de conserver des bois qui seront utilisés pour le chauffage, la construction et la cuisine.
Le recul de la forêt
Raoul de Mauléon qui vient peu sur l’île y possède cependant un droit de chasse exclusif. En 1199, les habitants se plaignant des animaux sauvages et des lapins qui ravagent les cultures, menacent de quitter l’île. Il n’est pas question de les laisser partir et Raoul va leur vendre son droit de chasse et percevoir en retour une redevance annuelle. Les Rétais ayant obtenu la liberté de chasser restent dans l’île. Au XIIe, il existe encore dans l’île un espace boisé important dont la trace perdure de nos jours dans le vocabulaire et la toponymie de l’île. Breuil, par exemple, que l’on retrouve dans le Haut de Breuil au Bois-Plage signifiait à l’origine petit bois. Ars, qui vient du verbe arser, est une zone défrichée par le feu. Les essarts sont des zones déboisées. Les essences plantées à l’époque vont de l’aubépine (abaupin) au chêne (chaigne) en passant par le peuplier (oible) et l’olivette. Notons au passage que l’olivier n’était pas une importation récente dans l’île où il a prospéré jusqu’à l’hiver 1940 ne survivant pas à son froid extrême.
Les moines de l’abbaye des Châteliers défrichent activement et occupent les territoires de La Flotte et de Saint- Martin. La vigne devient la culture dominante car en plus de l’intérêt financier qu’elle représente, les sols lui conviennent. Pierre Tardy indique qu’en 1404, le vignoble rétais avoisine les 2 000 ha. Malgré la Guerre de 100 Ans, qui sera pour les insulaires une période d’insécurité, 66% de la surface de l’île sont cultivés en vigne. Le précompte de la seigneurie de Ré en 1494 mentionne le grignotage des parcelles par la mer et aussi la progression des sables qui gagnent du terrain sous l’effet du vent. Ce qui signifie que le défrichement a atteint un stade où il est suffisamment avancé pour ne plus arrêter les transits de sable.
L’hégémonie du vignoble et ses conséquences
Le dénombrement de 1695 indique que la surface en vigne est de 4520 ha, en terres labourées de 659 ha et en bois de O,8 ha. On constate ainsi que la vigne a plus que doublé en trois siècles et occupe très exactement 87% de l’espace cultivable. Or, la population a besoin de bois pour la construction, la boulangerie, le chauffage, la distillation et la tonnellerie et l’on constate que l’on importe dans l’île du bois depuis le XVe siècle. La majeure partie du commerce s’effectuant avec les pays du nord, les navires ramènent du bois et des planches de Scandinavie. On fait venir aussi, jusqu’en 1920, du charbon de terre anglais. Rappelons que Ré, bénéficiait du statut de pays étranger et ne payait donc aucun droit sur ses expéditions de marchandises à l’étranger, ni sur ses importations.
Jusqu’à la Révolution, il fallait l’autorisation du seigneur pour reboiser. Ce dernier ne tenait pas à augmenter ses surfaces boisées au détriment de la vigne qui lui rapportait plus. Le reboisement débutera après la Révolution. Des résineux seront plantés pour stabiliser les dunes. Ce n’est qu’après la fin de la Deuxième Guerre mondiale, que des pins maritimes seront plantés. Constatant le dépérissement de cette espèce, on la mélangera à l’acacia et à l’érable. D’autres résineux seront ajoutés comme le pin d’Alep et le pin parasol et des chênes verts et constituent la forêt domaniale actuelle de l’île de Ré.
Le développement du boisement est spontané et comme l’a fait remarquer Jacques Boucard, il doit absolument être maîtrisé, sinon il gêne les cultures. On voit que dans l’île, la surface boisée a été multipliée par trois depuis la fin de la Deuxième guerre mondiale, il faut donc s’en occuper. Le PEAN (Protection d’espaces agricoles naturels) est un outil qui peut être utilisé pour réguler cet espace, mais qui doit être mis en place par le Département.
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