Clap de fin pour l’Hôtel des Gollandières, place à une résidence pour seniors
Lieu emblématique qui marqua des générations d’estivants, c’est un pan de l’histoire du Bois qui s’éteint avec la destruction prochaine de l’hôtel Les Gollandières
Au commencement, un terrain boisé d’un hectare idéalement situé à quelques mètres de l’une des plages les plus convoitées de l’île. Lorsqu’Annette et Jean-Paul Faucher l’acquièrent en 1970 il n’y a rien, sauf ces magnifiques pins propices à abriter le secret de soirées animées.
Très vite, le restaurant et la discothèque qui y sont créés s’imposent comme le QG des amateurs d’une bonne humeur simple, servie par un esprit familial et l’attention bienveillante des propriétaires. Émue, Annette évoque « 30 ans de souvenirs joyeux », tandis que Francis son neveu se rappelle la visite de Michel Jonasz et la transformation de la boîte en studio d’enregistrement pour Jean-Michel Caradec. Parmi les fidèles, Roger Pierre ou Léo Ferré, quant à Jean-Louis Foulquier, il en avait carrément fait sa succursale… Jeannot, spécialiste des clubs branchés parisiens, est sélectionné pour une première saison parmi une centaine de candidatures alors qu’il a 25 ans. À l’époque l’entrée est gratuite pour les filles, il en coûte 5 francs aux galants. C’est là qu’il rencontre la belle Béatrice qu’il épouse en 1973 et avec qui il vit toujours au Bois. Des anecdotes, il en a en pagaille, lui qui des années durant a multiplié les va-et-vient entre la capitale et les Gollandières. Mais par dessus tout, il tient à souligner « des patrons classes, comme on en trouve rarement aujourd’hui ».
Quelques années plus tard le site s’enrichit de nouveaux bâtiments destinés à l’hôtellerie et d’une belle piscine autour de laquelle, là encore, de nombreux couples se sont formés.
Une réhabilitation en toute discrétion
C’est par un courrier daté du 6 septembre que le proche voisinage était invité en mairie à une toute première réunion d’information programmée dès le lendemain à 10h30. Une hâte soudaine sans doute motivée par les interrogations des quelques riverains présents, sous le choc à la découverte du permis de construire affiché quelques jours auparavant.
Si le projet est qualifié en objet de ladite lettre (qui promet un « embellissement de votre quartier et de votre ville ») « d’intérêt collectif », il semble, et c’est bien là ce qui chagrine les habitants alentour, qu’il n’ait pas justifié qu’on les y associe lors de son élaboration en toute confidentialité.
Autour de la table ce vendredi 7 septembre au matin, une poignée de nostalgiques porte-parole des résidents du secteur pas encore tout à fait résignés, et la bonne volonté de Jean-Pierre Gaillard soutenu par le promoteur pour tenter d’atténuer leurs inquiétudes à l’évocation de la démolition complète de l’hôtel au profit d’un lot de 98 logements destinés à apporter « une réponse nécessaire à un problème qui nous touche tous : l’accompagnement de nos anciens ».
Le fond certes est indiscutable. Qui pourrait s’offusquer de voir les institutionnels prendre à coeur la question du vieillissement de la population ? Tous sont unanimes sur le fait qu’il n’y a aucune objection de principe à formuler, mais c’est bien la forme qui les interpelle, tant du point de vue de l’ampleur et la densité de l’édifice que du manque de concertation qui entoure sa validation.
Plan de masse massif
Le 20 octobre, si aucun recours n’est jugé recevable, les machines pourront commencer leur ouvrage pour raser l’existant et faire émerger un complexe de 38 T1, 41 T2 et 19 T3 articulés autour d’espaces de vie communs (hall d’accueil, restaurant, salons, bibliothèque et locaux techniques en plus des places de parking). Près de 6 000m2 de surface plancher répartis en blocs de deux à trois rangées de bâtiments, dont certains à étage donneront directement sur l’avenue des Gollandières à hauteur de la rue de la Paix qui certainement verra sa quiétude malmenée à l’issue des deux bonnes années de travaux prévisibles.
Et les arbres, atout charme du site ? À en lire la légende des plans qui les signalise par un cercle vert tantôt vide, tantôt coloré, beaucoup sont conservés, d’autres plantés, aucun n’est ostensiblement supprimé… 126 unités sont mentionnées comme déplacées. Reste à comprendre comment on replante un pin vieux de plusieurs décennies.
Bien sûr, l’ensemble du fonctionnement permettra par ailleurs « le maintien et la création d’une quinzaine d’emplois directs permanents » soulignait confiant Louis Romieux, président d’Atao promotion, société bauloise rompue aux opérations immobilières d’envergure.
Avec 98 logements disponibles à l’aube 2021, le village dans le village espère susciter l’intérêt de quelques 150 nouveaux locataires, séduits par ce havre de paix et la qualité des services proposés par l’enseigne qui en assurera la gestion.
Pour qui ?
Au début du vingtième siècle, on estimait à peine à 2% le nombre de femmes (les hommes encore moins) susceptibles de fêter leur 90 ans. Aujourd’hui elles sont près de 40% à pouvoir prétendre atteindre et même dépasser cet anniversaire !
Une révolution de l’âge que le gérant de la future résidence qualifie sur son site de « porteuse de croissance, génératrice d’un développement économique », sans craindre de revendiquer être un acteur incontournable de la “Silver Economy“.
Interrogée par téléphone, l’hôtesse commerciale des « Jardins d’Arcadie » explique la difficulté à détailler un devis, les tarifs variant en fonction d’une localité à l’autre et des prestations souscrites.
Au Bois, il faudra compter une mise de départ pour le loyer et les charges classiques « entre 1 200 et 1 500 € sur un T1, environ 1 800 € s’agissant d’un trois pièces ». À cela s’ajouteront les frais annexes d’assistance médicale, surveillance des lieux, restauration, ménage, déplacements en navette, animations diverses. Elle me rassure sur l’exemplarité de la population à accueillir (83 ans en moyenne) : « La sélection se fait d’office par la tarification », et m’engage à visiter des appartements témoins avant que les postulants puissent se manifester via le numéro vert qui sera visible en devanture 6 à 8 moins avant l’achèvement des travaux.
D’ici ou d’ailleurs, tous sont bienvenus pourvu que l’entretien préalable avec la directrice signe la cohésion de l’ensemble.
Si le plaidoyer semble à charge, c’est que l’émotion est bien palpable, l’amertume liée au manque de communication regrettable…
Dernière crainte : qu’adviendra t-il du site si le projet ne trouvait pas à honorer la rentabilité escomptée ?
Marie-Victoire Vergnaud
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