« Chanter, résister »

Le fado est le chant que son âme a choisi. D’origine française, Lizzie se passionne pour le fado après avoir découvert, à 17 ans, la chanteuse Mariza à la télévision. « L’origine du fado est polémique. On dit que la musique est née de la langue, le portugais, et que son coeur est à Lisbonne », raconte Lizzie, qui décide alors d’entamer des études de portugais et part à Lisbonne. Mais le fado « ne s’apprend pas, ne s’explique pas ». La tradition est orale, et c’est en côtoyant les musiciens, chanteurs et chanteuses que la jeune femme s’initie au répertoire, mais surtout à l’esprit du fado. « C’est un jeu subtil, poétique et musical. Il y a un répertoire de thèmes musicaux et un répertoire de textes, et l’on peut faire varier les associations à l’infini. »

Le 22 juin, Lizzie nous donnera à entendre certaines de ses variations, en portugais pour la plupart. « J’ai choisi du fado simple, traditionnel, à l’exception d’une chanson, sur un poème de Charles Baudelaire. » Car Lizzie a à coeur de transmettre la beauté de ce « chant de l’âme » au public français, dans sa langue. « L’Albatros s’y prête bien, dans sa forme qui est simple et qui permet les répétitions, importantes dans le fado, mais aussi par son thème : la figure du poète maudit est un sujet très fadiste. » Cependant, Lizzie s’insurge contre l’idée selon laquelle le fado serait un chant plaintif. « Il y a des fados joyeux, qui parlent du quotidien, de la vie du quartier. Il y a même eu des chants anarchistes, avant la dictature, quand il était encore possible de contester. » Pendant les 48 ans de dictature, parler de l’intime permettait de retrouver une liberté d’expression. « Le fado refuse le “paraître”, et en cela, il est une forme de résistance contre les injonctions sociales. Il y a un chant qui dit : “Je préfère des mensonges avec toi toute la vie, la vérité n’a qu’à dormir dehors.” Ce n’est pas une chose que l’on avoue aisément, mais le fait de le dire impose le respect. Le fado rend compte de toute la complexité de l’âme humaine, d’une vérité plus profonde de l’être et par le chant, rend à la personne sa dignité. »

Elle sera accompagnée de deux musiciens français, Dominique Oguic à la viola et Edgar Afonso à la guitare portugaise. « On observe un renouveau du fado en France, notamment chez les descendants d’immigrés. » Pour être traditionnel, le fado n’en est pas pour autant figé dans le temps. « Les femmes ne portent plus le châle pour couvrir leurs épaules. Musicalement, certains fadistes ont introduit de nouveaux instruments, comme la batterie. On fait le fado à notre image. » Une belle image, à découvrir le 22 juin à 20h.

1) « Le Portugal à l’honneur ».