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CdC île de Ré : Entre urgence sanitaire et opération économique « Ré-Ouverture »
Le président de la Communauté de Communes de l’île de Ré a reçu Ré à la Hune pour un point sur ses actions
Ré à la Hune : Concernant le volet « urgence sanitaire » où en êtes-vous de vos commandes de masques ?
Lionel Quillet : Nous avons enfin reçu notre commande de 16 000 masques, 8000 masques FFP2 et 8000 masques chirurgicaux, plus d’un mois après. Nous les réservons aux premières et seconde lignes : personnel soignant à la demande de tous les collectifs de médecins, ainsi qu’aux communes qui en auront 500 chacune pour les soignants, commerçants, élus..
Nous avons également commandé 18 000 masques en tissu dans le cadre de l’opération « Un masque pour tous » du Département qui concerne 650 000 masques commandés auprès de plus d’une dizaine d’entreprises. Gisèle Vergnon est la référente départementale pour l’île de Ré. Ces masques seront distribués début mai aux communes, qui organiseront chacune la distribution à leur population permanente. Un masque est prévu par habitant permanent, chaque Rétais devra avoir récupéré son masque pour le 11 mai au plus tard.
Pour la population non permanente, nous avons regroupé les demandes des communes pour passer une commande groupée.
NDLR – Précision le 24 avril : La CdC nous confirme bien qu’un groupement de commandes a été passé « pour commander en complément et à la charge des communes 10 000 masques complémentaires qui devraient être normalement réceptionnés en même temps que ceux du Département. »
Qu’en est-il des autres matériels de protection ?
Nous avons fourni aux Makers Rochelais Rétais cinq cents films et une imprimante 3 D pour la fabrication des visières de protection qu’ils livrent aux collectifs de médecins, nous avons aussi fourni quatre-vingts oxymètres aux médecins, qui permettent à leurs patients dans le cadre des téléconsultations médicales de mesurer le taux de saturation d’oxygène dans le sang.
Nous remercions aussi les dons de professionnels : la Coopérative des Sauniers nous a fourni des gants, charlottes, filets de cheveux, blouses, cale bras ; Ile de Ré Chocolats nous a remis des kits de protection et deux mille gants, Uniré des blouses.
Tout cela est mis dans un pot commun CdC avec distribution aux communes suivant leurs besoins.
Je tiens d’ailleurs à remercier encore les élus des dix communes qui assurent un travail de proximité et de terrain remarquable depuis le début de la crise sanitaire.
Avez-vous une idée de l’état de l’épidémie Covid-19 sur l’île de Ré ?
Nous avons deux très bonnes nouvelles : aucun des trois EHPAD de l’île de Ré – Saint-Martin, Ars-en-Ré et Sainte-Marie – n’a recensé à ce jour de cas parmi les pensionnaires et soignants ; Et le Pénitencier de Saint-Martin n’est pas touché non plus.
En médecine de ville c’est très difficile de savoir : on estime que les 23 médecins répartis dans les 15 cabinets médicaux auraient chacun suivi en moyenne entre 10 et 20 « suspicions », ce qui ferait de l’ordre de 400 suspicions ayant été prises en charge. Mais nous n’avons aucune donnée fiable. Par ailleurs, l’ARS Nouvelle-Aquitaine communique des chiffres départementaux et non pas par territoire.
Ce qui semble évident est qu’aujourd’hui notre territoire est tout de même très préservé.
Ne craignez-vous pas qu’après le déconfinement, la crise économique se révèle pleinement et ce durant plusieurs mois, les répercussions en chaîne étant colossales ?
Avec mon expérience de Chef d’Entreprise de trente années au cours desquelles j’ai vécu plusieurs grandes crises économiques – mais jamais d’une telle ampleur il est vrai – je sais que c’est l’après-crise qui est le plus compliqué. Les faillites n’ont pas lieu en mars et avril, elles auront lieu d’ici fin mai et fin juin notamment… C’est pourquoi nous travaillons au programme que nous avons baptisé « Ré-Ouverture ».
En quoi consiste ce programme ?
Depuis le 13 avril et l’annonce du Président Macron nous préparons ce programme autour de deux piliers : travaux et services, et économique.
Le premier pilier est piloté par Patrick Rayton. Concernant la collecte des déchets elle s’est très bien passée, les salariés de la Coved ont vraiment bien assuré et je les en remercie.
Nous avons réouvert depuis ce 20 avril trois déchetteries sur les cinq que compte le territoire – celles d’Ars, Sainte-Marie et le Bois-Plage – pour les dépôts des professionnels et des particuliers. Elles sont ouvertes du lundi au samedi, de 9h à 12h et de 14h à 18h30, avec un créneau réservé aux professionnels du lundi au vendredi à la déchetterie du Bois-Plage entre 8h30 et 12h30.Depuis la réouverture on a enregistré une moyenne de 70 véhicules par jour par déchetterie. Nous demandons à chacun d’avoir le sens des responsabilités et de regrouper en un chargement le maximum des déchets à déposer, pour éviter d’aller en déchetterie pour de petits dépôts. Seulement deux véhicules maximum sont autorisés en même temps à l’intérieur de chaque déchetterie. Les gardiens n’apporteront pas d’aide à la décharge. Toutes les mesures de distanciation sociale doivent être respectées, les usagers doivent se munir de leur attestation de déplacement (en cochant la case « déplacement pour effectuer des achats de première nécessité »), la brigade de gendarmerie de Saint-Martin de Ré intègre désormais les déchetteries dans ses tournées de surveillance.
Par ailleurs, la CdC a maintenu depuis le début du confinement l’ensemble de ses services, avec des modalités adaptées.
A noter que la crèche de La Couarde, ouverte aux enfants des personnels soignants de l’île de Ré a accueilli sur cette période de confinement entre dix et douze enfants, alternativement.
Les principaux chantiers de travaux vont-ils redémarrer ?
Les travaux d’AquaRé ont repris lundi 20 avril, toutes les entreprises du chantier sont évidemment décalées et au-delà des deux mois de retard liés à la crise sanitaire, le chantier va avancer plus lentement que prévu. On table sur une livraison pour début 2021 ou fin 2020, en tout cas le centre aquatique ne sera pas prêt pour la rentrée scolaire 2020/2021.
Le chantier de La Maline redémarre le 27 avril et devrait durer jusqu’en juin 2021, date prévue de la livraison, que l’on maintient.
Côté digues, le chantier de la grande digue de La Couarde reprend le 27 avril, les chantiers de la digue du Moulin à Rivedoux, de Fer Bouillant à Ars et de La Tonnelle à Loix redémarrent également.
Après avoir obtenu un avis favorable du comité de bassin Loire-Atlantique en février 2020, vous deviez défendre le projet PAPI 3 concernant notamment le Nord de l’île et le Fier d’Ars auprès de la Commission Mixte Inondation début avril, j’imagine que cette date a été reportée ?
Oui la CMI a été fixée au 27 mai.
Quels autres travaux vont reprendre ?
Les travaux de câblage pour la Fibre ont continué et l’île de Ré est même en avance, le Nord de l’île est très en avance, je pense la commercialisation par les opérateurs se fera avant l’été, ils ont tout intérêt à aller vite.
Les travaux de VRD avec le Département vont redémarrer, avec la reprise des enrobés, la finalisation des giratoires se fera à partir du 27 avril, ainsi que la mise à propre des abords. Les travaux de remplacement de câbles du Pont ont continué durant le confinement.
En France, les collectivités territoriales financent 80 % des investissements, ce sont elles qui financent principalement le BTP (bâtiment & travaux publics).
L’Etat et la Région ont annoncé leurs plans de soutien à l’économie, ils seront on le sait déjà insuffisants, notamment pour les entreprises ou autres professionnels qui passeront entre les mailles du filet. Prévoyez-vous au niveau intercommunal et/ou départemental des plans de soutien et relance économiques ?
Première action « économique » immédiate, nous avons maintenu toutes les subventions aux associations, leur versement est en cours, maintien ou non de leur festival ou autre évènement. Nous verrons après bien sûr, par exemple quand un évènement sera reporté à l’an prochain, la subvention 2021 sera réexaminée en fonction de ce qui aura été déjà versé. Ces subventions représentent un montant de 600 K€. A cet égard, plusieurs organisateurs ont annoncé l’annulation de leur festival cet été : Jazz au Phare, Jazz en Ré, festival Île de Ré Photo club, festival des 4 Saisons. Pour le moment, ceux du salon l’île aux Livres et de Musique en Ré maintiennent l’édition de cet été 2020.
Seconde action, pour toutes les Entreprises de 1 à 100 personnes et plus, nous mettons en place à partir du 27 avril une plateforme téléphonique et internet, commune à la CdC et à la SPL Destination île de Ré, dont le travail est unifié, s’agissant pour la première de services du territoire et pour la seconde de services partenaires de la CdC. Nous voulons jouer les « facilitateurs », pour notamment faire gagner du temps aux professionnels dans l’élaboration de leur dossier de demande d’aide.
Cette plateforme téléphonique de quatre personnes, deux issues de la CdC et deux de Destination île de Ré – dont Ré à la Hune communiquera très prochainement le N° d’appel. NDLR– aura pour mission d’écouter les professionnels, les orienter, faciliter leurs dossiers de demandes d’aides aux Entreprises auprès de l’Etat (Fonds national de solidarité) et de la Région (Fonds d’aide régionale), aider à analyser les dossiers souvent complexes, à recueillir les besoins et difficultés.
Je vais par ailleurs proposer au prochain Conseil d’administration de la SPL Destination île de Ré de rembourser cette année l’ensemble des partenaires de Destination île de Ré, qui se sont engagés pour une promotion de leur entreprise sur ces magazine, guides et supports numériques. Cela représente une somme de 500 K€. Bien sûr, chacun bénéficiera des retombées malgré tout de ces publicités, mais sans en supporter cette année le coût. C’est mon objectif, qui devra être validé en conseil d’administration…
Nous préparons aussi en lien avec le Département à d’adaptation du territoire et à un plan de relance touristique, le tourisme représentant directement ou indirectement une très grande part de l’économie de la Charente-Maritime et de l’île de Ré.
Comment le Département et/ou la CdC de l’île de Ré peuvent aider les Entreprises qui ne bénéficient notamment pas des Prêts Garantis par l’Etat (PGE), les banques restant plutôt sélectives malgré les consignes étatiques ?
Nous avons commencé à réfléchir aux critères d’aides mais nous sommes confrontés à une difficulté majeure. Dans le cadre de la Loi NOTRe, les départements et les intercommunalités ont perdu la compétence économique, notamment en matière de soutien économique. Toute aide directe ou indirecte aux entreprises est illégale, nous pouvons juste à ce stade abonder le fonds de solidarité régional à hauteur de 2 € par habitant, soit une enveloppe globale de 36 000 €…
L’Association des Départements de France (ADF) et l’Association des Maires de France (AMF) voudraient obtenir le feu vert étatique pour pouvoir exceptionnellement intervenir en complément des Régions et interviennent fortement dans ce sens. Le Département de la Charente-Maritime pourrait proposer des aides remboursables, la CdC de l’île de Ré participer financièrement, mais pour le moment le Ministère de l’Economie bloque…
Nous suivons pour le moment la situation avec la Région, le dispositif étant complexe, nous jouons les relais, évidemment en lien avec les chambres consulaires. Cette plateforme téléphonique et numérique nous permettra d’avoir une photo de la situation.
Nous espérons toutefois que le Ministère – qui semble craindre de créer ainsi un précédent – accédera aux demandes des trois présidents des départements, maires et régions de France : Dominique Bussereau (ADF), François Baroin (AMF) et Hervé Morin (ARF). C’est tout le problème de l’hyper centralisation de l’Etat depuis plusieurs années…
Les communes ont aussi de leur côté suspendu le versement de certaines amodiations et loyers ?
Oui la CdC joue un rôle de coordination, pour essayer d’unifier ces actions entre les communes, d’adopter une position commune. Côté CdC nous payons en accéléré toutes les factures aux Entreprises, nous continuons à passer nos marchés publics er bien entendu nous n’appliquerons aucune pénalité de retard. La CdC exonère aussi certains loyers.
La crise sanitaire et l’ensemble de ces mesures de soutien aux acteurs du territoire vont, on l’imagine, fortement impacter les finances de la Communauté de Communes de l’île de Ré, avez-vous déjà chiffré cet impact sur le budget de fonctionnement ?
Il y a déjà les ressources perdues, comme les 500 K€ de Destination île de Ré qui vont être reversés aux partenaires. Ce manque à gagner sera couvert par une dotation complète de la CdC à la SPL. Il y a les exonérations de loyers. Mais aussi la perte de la taxe de séjour sur mars, avril, mai.
Nous allons avoir aussi un gros souci avec la DSP (délégation de service public) d’AquaRé, puisque le centre aquatique devait rouvrir pour le début de l’été et ne sera livré que début 2021, ou au mieux fin 2020.
Nous estimons le manque à gagner sur notre budget de fonctionnement supérieur à trois millions d’euros, auquel il faudra rajouter notre soutien au développement économique.
Le problème est que les collectivités territoriales n’ont pas le droit de prendre des emprunts pour leur budget de fonctionnement, seulement pour leur budget d’investissement.
Or, en l’occurrence, nous sommes sur du fonctionnement. Il faudrait donc que l’Etat accepte exceptionnellement que les collectivités puissent emprunter pour équilibrer leur budget de fonctionnement.
Il y a par ailleurs en attente la taxe Gemapi qui représente 1,260 million d’€, dont nous aurons besoin pour financer une partie des chantiers digues.
Les communes sont aussi fortement impactées avec la perte de droits de mutation, même si je suis persuadé que l’immobilier va redémarrer très vite, et j’ai déjà des échos dans ce sens, l’île de Ré étant plus que jamais une valeur refuge.
Le premier tour des élections a permis d’élire neuf conseils municipaux sur dix, même si l’installation de ces conseils n’a pas pu encore avoir lieu. Seule la Commune des Portes devra organiser a minima un second tour (ou les deux tours si les élections étaient repoussées à l’automne). Sous quelle configuration la CdC et les communes fonctionnent et fonctionneront ?
Nous espérons que les nouveaux conseils municipaux pourront être installés au mois de juin, ce qui permettrait d’avoir neuf communes sur dix en ordre de marche.
Pour les Portes, nous ne savons pas encore si le second tour des élections pourra se tenir en juin ou en septembre…
La CdC doit voter son budget avant le 31 juillet 2020. Il y a trois configurations possibles : soit l’élection des Portes a lieu en juin et le nouveau conseil communautaire – composé de 28 délégués communautaires contre 26 actuellement – peut être installé en suivant. Soit le conseil communautaire peut être installé avec les nouveaux délégués communautaires issus des neuf communes concernées et les deux anciens délégués communautaires des Portes. Soit le conseil communautaire se réunit sous son ancienne configuration.
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