Bilan saisonnier : la parole est aux acteurs économiques
La dépression venue de la crise économique et de la météo maussade de juillet touche sérieusement l’économie rétaise sur plusieurs secteurs d’activités. Pour maintenir la tête hors de l’eau, les professionnels sédentaires et non sédentaires doivent redoubler d’efforts, faire preuve d’imagination pour innover et conquérir une clientèle qui vit l’île de Ré autrement et change ses habitudes de consommation. Cette année les Français sont inquiets du contexte économique et essaient d’épargner, au détriment de la consommation.
La rédaction de Ré à la Hune a écouté commerçants et prestataires, permanents et saisonniers rétais, pour une première tendance, non exhaustive, de la période juillet-première quinzaine d’août 2012.
La saison 2012 ne sera pas à la hauteur de 2011
Notre enquête fait apparaître des écarts de situation selon les secteurs d’activités. Incontestablement toutes les personnes interrogées constatent que la clientèle est moins nombreuse : « Le nombre de passages au pont ne se traduit pas en nombre d’acheteurs potentiels. Il y a beaucoup de passages à la journée. Rivedoux peut en témoigner par la fi le qui se forme tous les soirs dans le village. »
Un loueur de vélo à l’écoute de sa clientèle, gérant de 5 points de location confirme : « Nous sentons une baisse de fréquentation. Des clients habitués qui reviennent tous les ans nous le font remarquer. Ils trouvent qu’il y a moins de monde. Ce ne sera pas une saison à marquer d’une pierre blanche. Les gens sont moins dépensiers et en plus le temps n’a pas été favorable. Bien que le mois d’août soit toujours meilleur que le mois de juillet, en terme de fréquentation, il y a moins de monde sur août que d’habitude. » Une boutique du Phare des Baleines fait le même constat : « Le début de saison n’a pas très bien démarré. Jusqu’au 20 juillet ça a été très calme, mais août est très bien pour l’instant. Quand avril, mai, juin et la première moitié de juillet ont été mauvais, on ne rattrape pas avec août ».
Chaud et froid dans la restauration
Dans la restauration, la nouvelle direction d’un restaurant sur le port de Saint-Martin prend ses repères pour une première saison à la tête de l’établissement : « Juillet a été catastrophique, à cause du temps, mais le mois d’août est plutôt bon. Pour nous c’est difficile de comparer avec les chiffres de l’année dernière, qui était une année exceptionnelle, au niveau de la fréquentation ».
La restauration est un secteur économique sensible, impacté par de nombreux paramètres, et les résultats sont très variables selon les établissements. Mais la saison 2012 sera plutôt pizzas, crêpes, sandwichs, glaces, moules frites, que restauration gastronomique. On fait ses « petites bouffes » entre copains et les courses au supermarché !
L’hébergement touristique : une mutation annoncée
En hôtellerie de plein air, la clientèle a de nouvelles exigences sur la qualité des prestations offertes. Il faut faire de gros investissements et avoir une force commerciale pour séduire les nouveaux campeurs. Exit la toile de tente ! « Nous sommes au-dessus de 2011 qui a été une bonne année », dit Aurélien Ravet d’Interlude Bois-Plage. « Je pense que cela s’explique par nos propositions : spa, club enfant, restaurant, épicerie. Nous sommes satisfaits de cette saison, mais je sais que ce n’est pas forcément le cas de tous mes collègues ! »
La part de budget vacances consacré à l’hébergement pèse lourd. Les temps sont durs !
La clientèle plus aisée, habituée à l’hôtellerie traditionnelle et de qualité, ne change pas ses habitudes, même si les réservations dans leur hôtel préféré se font de plus en plus tardivement. De nouveaux hôtels franchisés, au concept et au coût adaptés aux nouvelles exigences, séduisent une clientèle plus jeune et familiale.
Pour les locations meublées la concurrence est importante et les mentalités changent : on ne vient plus chez l’habitant, on achète une prestation. La transparence d’Internet change aussi les relations entre loueurs et vacanciers.
Produits du terroir : une valeur sûre
À la cave coopérative Uniré, toujours très attractive, l’impression est plus atténuée : « Le mois de juillet n’était pas terrible, mais en août les visites des chais marchent bien même les jours où il fait beau et les gens achètent. Il y en aussi qui viennent acheter sans faire la visite ». Nous avons pu constater lors de notre visite du 16 août qu’une centaine de personnes effectuaient la visite du chai, et la boutique faisait des ventes.
Loisirs et culture : indicateurs des centres d’intérêt
Le Musée Ernest Cognacq a reçu moins de visites en juillet qu’en 2011. Mais l’affluence a repris depuis le 25 juillet. « La piscine intercommunale Aquaré comptabilise moins de baigneurs que l’année dernière sur les horaires d’ouverture au public. Quand il pleut, c’est l’affluence. Mais nous avons des activités plus nombreuses, hors ouverture au public », disent les responsables. Les loisirs nautiques, location de jet ski, bateaux à moteurs, sont impactés par le coût élevé du carburant. Moins de ronds dans l’eau cette année…
La grande distribution : prudente et réactive !
Grandes, moyennes et petites surfaces misent sur l’ouverture 7 jours sur 7, et des prix stables pour maintenir un bon niveau de chiffres d’affaires saisonnier. Il semble que celui-ci soit en progression, bien qu’il soit difficile de dégager une tendance avant la fin de saison : l’alimentation indispensable peut bénéficier du changement de comportement des vacanciers regardant sur d’autres dépenses.
Les marchés : le rapport qualité / prix avant tout
Les marchands non sédentaires des marchés n’ont pas le moral, malgré une météo en amélioration sur la première quinzaine d’août. Dans le secteur de l’alimentation, la baisse de chiffre d’affaires varie globalement de 10 à 30 %. Les produits en bon rapport qualité prix se tiennent mieux, et quelques commerçants enregistrent même une hausse de leur chiffre d’affaires sur juillet et la première quinzaine d’août.
En revanche, le textile et les accessoires de loisirs, confort, bien être, sont fortement impactés. La première quinzaine d’août ne rattrapera pas la baisse de chiffre d’affaires de juillet. La composition des marchés avec des doublons, voire des triplés, sur le même créneau de produits sur un petit marché est souvent contestée par les marchands. « Les commerçants ne pas là pour le folklore local et meubler la place, mais bien pour servir une clientèle et vivre de leur métier ! Écrivez-le ! ».
Le commerce forain
Avec 29 saisons de fidélité à la Barbette, le Palais de la Gourmandise, tenu par la famille Fricot, a connu et ressenti au fil des saisons des variations économiques dans son secteur d’activité. Manèges pour enfants, jeux, restauration et confiserie font partie du budget « plaisir », qui subit la crise.
Tony Fricot pense ainsi que « l’île de Ré évolue et Saint- Martin est moins fréquenté cette saison. Nous ne rassemblons plus comme auparavant les Rétais et les vacanciers. J’expliquerais cette situation par la conjugaison de plusieurs paramètres : la météo maussade qui réduit les sorties en soirée, le pouvoir d’achat en baisse, avec un budget vacances très entamé par le coût des hébergements, le marché nocturne qui a perdu de son attractivité, le stationnement dissuasif. Ce n’est pas facile, il faudra engager une réflexion avec tous les acteurs de la vie martinaise, rechercher des idées nouvelles, relancer les bals à la Barbette…
Nous exerçons une activité populaire, au sens noble du terme, qui touche toutes les catégories sociales. Nous constatons une nette baisse de fréquentation sur l’ensemble de nos prestations, et de notre chiffre d’affaires. Depuis dix ans nous avions maintenu nos prix qu’il a fallu réviser cette année pour absorber des hausses de charges. Nous veillons à maintenir des tarifs d’abonnements attractifs pour conserver notre clientèle familiale. »
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Des questions se posent
Le profil des vacanciers changerait-il, avec moins de personnes dans la tranche active et plus de grands-parents avec des petits-enfants à charge, et des familles qui font attention avec un budget serré ?
L’île de Ré paierait-elle la note de son image trop médiatisée d’île de riches ? Car même si ce n’est pas toujours vrai, les vacanciers ont le sentiment de payer toujours plus cher qu’ailleurs.
La saison plus courte, pour cause de départ tardif en vacances et d’anticipation de la rentrée, l’impact météo plus fort qu’avant, incitent les vacanciers à faire des réservations locatives de plus en plus tardivement. Si la baisse du pouvoir d’achat n’est pas propre à l’île de Ré, il faut remarquer que des personnes aisées, certains « VIP », ne choisissent plus la destination Ré en saison, jugeant l’affluence « insupportable ».
L’adaptation des prestations, la flexibilité et la concertation seront demain les clés du succès !
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