Bilan de saison selon les secteurs et les sites de l’île de Ré
Ré à la Hune a interrogé différents acteurs du territoire, pour avoir leur perception de cette saison 2018, et bien sûr Destination Ile de Ré.
Campings : l’hôtellerie de plein air se prend un vent
La fréquentation inespérée de septembre n’aura pas suffi à rattraper une avant-saison en demi-teinte et un mois de juillet décevant.
Première offre d’hébergement en France depuis les années 2010, les campings constituent un indéniable levier de l’économie touristique, avec un chiffre d’affaires évalué l’année dernière par l’INSEE à 2,5 milliards d’euros.
Sur l’île (où pour l’anecdote, dès les élections municipales de 1956 tous les candidats des villages rétais promirent de créer des terrains), c’est carrément une tradition de vacances familiales qui voit la cinquantaine d’établissements aujourd’hui active remplir les carnets de réservations à peine les beaux jours arrivés.
Si tous s’accordaient à qualifier 2017 d’année record, les gérants faisaient grise mine venu le temps du bilan de saison malgré le soleil radieux de cette fin d’été. « 6% en moyenne de nuitées en moins sur l’ensemble de la profession », commente Aurélien Ravet directeur du camping Sunêlia Interlude au Bois-Plage. « La baisse d’avril a été compensée par les pics des nombreux ponts du mois de mai, juin s’est maintenu grâce, entre autres, à la présence des Belges et des Anglais, mais la grosse perte enregistrée en juillet reste préjudiciable en dépit des bons résultats en fin de parcours ».
À La Couarde par exemple, le camping « La Tour des Prises » affichait un taux de remplissage de 90% début septembre.
Quels enseignements peut-on donc tirer de cette saison atypique, en dehors de l’effet coupe du monde, avancé pour justifier la désaffection des juilletistes ?
Parmi les indicateurs, on s’enthousiasme de l’omniprésence des Anglais et du retour en force des Allemands. Mais c’est la clientèle française qui a fait défaut, préférant semble t-il réinvestir la Tunisie ou la Crète à moindre coût. À noter : un turnover plus important donc des séjours plus courts (avec la charge de travail afférente), contre balancés par des exigences accrues en terme de prestations et loisirs.
Ainsi, Simha Ventura, responsable du camping Les Maraises à Saint-Martin, explique avoir tiré son épingle du jeu cette année grâce à un programme d’animations et concerts attractifs et surtout la création d’un snack.
Moins de temps, plus d’envies : ne serait-ce le reflet des nouveaux modes de consommation ?
Marie-Victoire Vergnaud
Saison estivale à Loix
Comme tous les étés, le village de Loix a fait le « plein » de touristes. Le bureau d’accueil a reçu 21 350 visiteurs, sur les mois de juillet, août, et septembre. Les manifestations proposées étaient nombreuses et ont attiré beaucoup de monde. De leur côté, les commerçants sont unanimes : malgré un début difficile en juillet, la saison a été bénéfique. Le petit magasin SPAR a innové, cet été, en mettant au point la « journée non-stop », c’est-à-dire ouverture entre 12 et 14 heures. Le bar-brasserie « La Presqu’île » a organisé plusieurs soirées à thèmes, qui ont toutes obtenu un brillant succès. Le camping des « Ilates » suit le mouvement : taux plein du 1er août jusqu’à la fin de la troisième semaine de septembre. D’une manière générale, les touristes étrangers ont semblé être plus nombreux cette année…
Jacques Buisson
La saison 2018 aux Baleines
Malgré le temps maussade responsable de la chute de fréquentation pendant les vacances de Printemps, les commerçants du site du phare des Baleines, font un bilan positif de la saison en cours.
Et pour la plupart d’entre eux, l’arrière-saison reste une belle promesse si le soleil perdure cet automne.
Dans l’ensemble, toutes branches confondues, ils dressent le constat d’une fréquentation plus fluide que les années précédentes, plus étalée de mai à septembre, mise à part une décevante première quinzaine de juillet. Conjoncture politique ou coupe du monde de football, chacun justifie le médiocre début d’été selon son tempérament. Mai, août ainsi que les trois premières semaines de septembre ont été plutôt satisfaisants avec des chiffres en hausse pour certains établissements qui ont dû gérer des pics d’affluence, en terme d’horaire ou de jours de semaine, parfaitement inattendus.
Les saisonniers ont constaté la présence de vacanciers espagnols de plus en plus nombreux au fil des ans et le séjour de La Roja sur l’île en juin 2016 n’est sans doute pas étranger au phénomène. On se réjouit également cet été d’avoir attiré une clientèle italienne qu’on ne connaissait pas auparavant.
La saison 1 de la Pointe des Baleines
Sur le site du phare, la saison 2018 fait office de test suite au récent réaménagement de la pointe des Baleines. Les visiteurs, dans leur majorité, ont apprécié la qualité des nouveaux parkings malgré leur éloignement (de 800 mètres) des commerces. L’accès au site, et donc aux commerces, n’en reste est pas moins restreint pour les handicapés et pour les livraisons, ces dernières devant s’effectuer avant onze heures, rares sont les chauffeurs qui parviennent au bout de l’île avant la fermeture de la borne.
Les commerçants et restaurateurs qui restent ouverts à l’année, et donnent par là au site sa dimension pérenne, s’interrogent sur la motivation de leur clientèle hivernale, certes plus clairsemée mais bien réelle, à venir braver les vents et les pluies sur huit cent mètres pour passer leurs portes.
Dans le village, un bilan plus difficile
Les commerces villageois et particulièrement les restaurateurs se sont plaints de la nouvelle concurrence qu’ils ont eue à affronter avec l’installation temporaire (de juin à septembre) du chapiteau La Java des Baleines. « Une concurrence déloyale » selon eux, qui a lourdement grevé leurs chiffres d’affaires. En dépit de leurs démarches contestataires auprès des services concernés, ils devront, à l’avenir, compter avec le nouvel établissement puisque la mairie vient de renouveler leur contrat pour la saison 2019.
Véronique Hugerot
Du côté des maisons d’hôtes…
De Rivedoux avec « La Maison des Algues » à La Couarde avec « La Couardaise », la saison en maison d’hôtes s’est bien passée, alors que les deux n’ont pas été ouvertes à 100%. A La Couardaise, après un bon mois de mai, Sandrine reconnaît un juillet maussade, mais « c’était super en août et septembre a fait le plein de ses cinq chambres tous les jours », explique-t-elle, notant aussi la présence de nombreux Belges, + 40% en ce qui concerne sa clientèle. A Rivedoux, après 15 jours de fermeture en août, Jocelyne profite d’une très belle arrière saison qui se prolongera jusqu’aux vacances de la Toussaint. Le secret ? La qualité de l’accueil et du service.
Et des loueurs de vélos
Avec une météo pareille, il y avait fort à parier qu’ils n’avaient pas chômé. Et effectivement, la saison a tenu ses promesses. Installé sur le port de Saint-Martin, « Les vélos de Mathilde » ont connu une activité régulière, y compris sur les quinze premiers jours de juillet et bien sûr un très beau mois de septembre, comme le temps. Régularité aussi et même légère progression pour 1 Plus Cycles, implanté depuis longtemps sur le Bois-Plage, qui propose non seulement la location mais aussi vente, réparation et même sur-mesure pour des Beach-cruisers personnalisés. Le vélo sur Ré, c’est une affaire qui roule !
Pauline Rouard
Saison 2018 : des hauts, des bas et des projets
La saison touristique 2018 ne laissera pas un souvenir impérissable. Pourtant soleil et chaleur étaient au rendez-vous, prenant des allures caniculaires au coeur de l’été. Alors ?
Chaque année c’est la même chose : content de la saison ou pas, combien de passages au pont, sont les questions sur toutes les lèvres et chacun y va de son petit commentaire. Entre chiffres (pas toujours significatifs) et impressions, faire un bilan n’est pas facile. Le mieux était encore de rencontrer le Directeur de Destination Ile de Ré Guillaume Barny, pour une analyse plus fine et argumentée.
Une saison tardive
Tout avait bien commencé avec une Ascension sous un soleil radieux, compensant des vacances de printemps décevantes. S’ensuivit un mois de juin sans pont (la Pentecôte tombant au mois de mai) et un 14 juillet à l’avenant, auxquels il faut ajouter la Coupe du Monde de Football qui maintint vraisemblablement nombre de vacanciers à leur domicile. Bref, la haute saison a démarré bien tard, « avec une concentration du 25 juillet au 25 août », précise Guillaume Barny. Bon d’accord mais cela suffit- il à expliquer des résultats parfois médiocres ? Pas vraiment.
L’effet météo à rebours
Souvenons-nous : la saison 2017 s’était plutôt distinguée par un temps instable. Moralité : les vacanciers déçus (et les autres, prévoyants) se sont portés en masse sur le Sud-Est, la Corse et l’étranger, délaissant du même coup les rivages atlantiques pour se garantir le soleil. Parions alors qu’avec la météo exceptionnelle de cette année, ces infidèles reviendront vers nous en 2019 ? Sans doute mais pas si simple selon Guillaume Barny qui souligne d’autres facteurs.
La fin des vacances franco-françaises ?
C’est un fait : l’île de Ré est historiquement une destination franco-française. Or, ils ont été 700 000 (Français) à choisir cette année des destinations plus lointaines, y compris dans des pays où ils n’allaient plus depuis quelques temps. Autant de vacanciers en moins sur l’hexagone en général et par voie conséquence sur l’Ile de Ré. Est-ce grave docteur ? C’est une tendance indéniable de même que les réservations de dernière minute rendant difficile les prévisions de fréquentation. Capricieux les Français ? En tous cas, ils ont des envies d’ailleurs confortées par la perspective de vacances moins chères. Car il ne faut pas se leurrer : une semaine sur l’Ile de Ré, ce n’est pas donné.
La clientèle étrangère en hausse
C’est indiscutable et Guillaume Barny s’en réjouit : la clientèle étrangère est en nette progression, résultat d’actions de communication ciblées, lors de salons à Bruxelles, Londres ou Berlin, afin de « vendre l’Ile de Ré » à des professionnels du tourisme, médias et voyagistes.
Et c’est vrai qu’ils se sont largement déplacés vers nos rivages nos voisins d’outre-rhin et d’outre-manche, tandis que les Belges, en congés dès la fin juin, ont profité de la période attractive allant du 30 juin au 15 juillet. Sans oublier les Espagnols (effets de l’Euro 2016) et même des Chinois. Concernant ces derniers, Guillaume Barny rappelle la notoriété internationale de l’équipe espagnole hébergée sur l’Ile de Ré et suivie par des télévisions chinoises avec de grandes résonances sur les réseaux sociaux.
Largement présents en haute saison, les étrangers étaient encore là fin septembre et représentent un vrai plus. Pourquoi ? « Ils font des séjours plus longs et disposent d’un pouvoir d’achat plus élevé » explique Guillaume. « Nous sommes trop dépendants de la clientèle française » poursuit-il avant de confirmer que la participation à des salons professionnels hors hexagone sera renouvelée cet hiver.
Trois petits tours et puis s’en vont
Si ce n’est qu’une impression, elle est tangible. A Saint-Martin par exemple, après des après-midi très denses, le vide semble sidéral le soir. Un fait qui n’étonne pas Patrice Raffarin. C’est qu’il est bien placé le Maire de Rivedoux pour constater les encombrements qui obstruent sa commune. « Il y a quelques années encore, les bouchons survenaient essentiellement en fin de semaine. Cet été, c’était tous les soirs » affirme-t-il, précisant qu’il a mené sa petite enquête et tire la conclusion suivante : « Ils sont nombreux à loger sur le continent où ils trouvent des locations bien moins onéreuses. Passer une journée sur l’Ile de Ré fait partie du programme des vacances et un pont à 16 € n’est pas un frein. Ils arrivent avec le pique-nique, vont à la plage, se promènent et repartent. Le vrai problème est que, pour la majorité, ils viennent en voiture ».
Ces visiteurs d’un jour sont-ils profitables à l’économie du territoire ? Patrice Raffarin en doute très fortement. Quant à Guillaume Barny, il se montre plus prudent, reconnaissant toutefois que c’est « une clientèle à surveiller ».
Quel rapport qualité/prix pour les vacanciers rétais ?
Elle avait été annoncée lors de la soirée organisée par Destination Ile de Ré pour ses partenaires : l’étude menée par la société Travel Tourisme s’est déployée sur la saison, de juin à septembre, permettant de rassembler un panel significatif (900 enquêtés environ). « Il s’agissait de mesurer la qualité de l’offre globale proposée aux touristes », explique Guillaume. Tous les services ont donc été questionnés, de l’hébergement à la location de vélos en passant par les activités de loisirs et la restauration. S’il est encore trop tôt pour donner des résultats définitifs (ils seront dévoilés en décembre), certaines grandes lignes se dessinent déjà : « un rapport qualité/prix sensiblement dégradé, une offre d’hébergement illisible notamment en raison des dérives liées aux plateformes type Airbnb », détaille Guillaume Barny, précisant que « 40% des enquêtés venaient pour la première fois sur l’Ile de Ré », et « que le taux de recommandation est un peu en baisse par rapport à 2015 ». Un dossier à suivre car il concerne la vie du territoire.
Innover en matière de services
Sur un marché de plus en plus concurrentiel, il n’est pas possible d’ignorer les exigences grandissantes en matière de service. Nous sommes à l’ère de « l’expérience client ». Sollicité de toutes parts, le vacancier veut toujours plus et mieux, a fortiori lorsque les prix qu’il paye sont d’un certain niveau. Il faut donc s’adapter à de nouvelles attentes et valoriser l’existant. En ce sens Destination Ile de Ré travaille sur un projet novateur : « il s’agit d’un site internet de séjour », explique Guillaume Barny, « sur lequel un conseiller virtuel proposera, selon l’endroit où l’on se trouve, cinq idées en temps réel : activités de loisirs, visite d’un site ou encore itinéraire de randonnée, pique-nique ou déjeuner en terrasse, sans oublier un parcours vélo ». Ajoutons à cela horaires des marées et météo et les vacanciers auront à leur disposition un véritable guide touristique virtuel en fonction du temps dont ils disposent et de leurs envies du moment. Une belle idée qui devrait voir le jour pour la haute saison 2019.
L’ile de Ré sous le label « Accueil Vélos »
De quoi s’agit-il ? « Accueil Vélos » est une marque nationale mise à la disposition des collectivités territoriales qui souhaitent valoriser lieux et prestataires s’engageant à mettre des services dédiés à disposition d’une clientèle cycliste. Cela passe par des pistes cyclables répondant au cahier des charges national des véloroutes et voies vertes, mais également par des prestataires proposant une offre de services dédiée : loueurs et réparateurs de vélo mais aussi restaurants, lieux d’hébergement et sites de visites sont concernés. Pour Destination Ile de Ré, il s’agit donc de construire des parcours, en l’occurrence trois boucles (Nord, Centre et Sud) d’une vingtaine de kilomètres chacune. Une prestation qui devrait être appréciée de nos visiteurs et renvoie à la nécessité d’encadrer du mieux possible la circulation cycliste.
La saison 2018 est derrière nous. Si elle n’a pas été un grand cru, elle n’est pas non plus une catastrophe et le radieux mois de septembre pèse dans la balance.
Force est de constater que sur le métier, il faut sans cesse remettre l’ouvrage. Mais sortir de sa zone de confort peut être une bonne chose : cela pousse à s’améliorer et à ouvrir de nouvelles opportunités. Comme celle du tourisme d’affaires dont Guillaume Barny se félicite de la progression, et qui représente un chiffre d’affaires non négligeable pour les acteurs touristiques rétais. Pour conclure, Guillaume tient à saluer la polyvalence de ses équipes, dont l’implication et les compétences ne sont pas toujours reconnues. Faute de bien les comprendre ou les connaître sans doute.
Pauline Leriche Rouard
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