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« Agriculteurs et citoyens : comment mieux vivre ensemble ? »
La 11ème édition de la conférence agricole organisée par le Département s’est tenue le 29 novembre à la Maison de la Charente-Maritime. Si la rencontre a permis de motiver le dialogue entre élus et professionnels locaux, ces derniers auraient souhaité voir plus de pistes et leviers d’action émerger face aux enjeux qui touchent le monde rural.
Viticulture (cognac, pineau et vins charentais), céréales (blé tendre, maïs), oléagineux (colza, tournesol), cultures légumières et maraîchères (pommes de terre et asperges de l’île de ré, mojettes de Saintonge, melons), élevages bovins (Blondes d’Aquitaine, beurre de Surgères -le premier à obtenir l’AOC en France-) ou de volaille (poule de Marans)…
L’agriculture est un fleuron de l’économie du département, avec une surface d’occupation qui couvre au dernier recensement 64 % du territoire et une proportion des effectifs jusqu’à deux fois plus élevée que sur le reste du pays.
Pour autant, ici comme partout en France, l’anglicisme « agribashing » redondant sur nos ondes, concentre et traduit le malaise d’une profession qui subit les défis d’une industrie au service des sociétés urbaines. Peu de familles comptent encore des paysans, et les villages de moins en moins. Auraient-ils perdu nos campagnes ? Doivent-ils s’engager dans celle qui, du champ à l’assiette, devrait leur conférer de nouveau un rôle essentiel au coeur d’une ruralité qui fait le patrimoine culturel de nos régions si souvent défendu, et cible d’une diplomatie gastronomique comme on a pu le mesurer lors de la récente China International Import Expo de Shanghai ?
Une frontière entre le monde agricole et les néo-ruraux
Dominique Bussereau, président du Département, revenait en préambule de la conférence sur la genèse de la mutation à l’oeuvre dans la valorisation de nos paysages. Alors qu’une génération de trentenaires s’installe en périphérie des villes davantage pour des raisons économiques que par conviction, recréer le lien qui unissait jusque là leurs parents et grands-parents, soucieux d’offrir des « vacances à la campagne » à leur progéniture, semble complexe. « L’inquiétude des citoyens sur la capacité des agriculteurs à proposer des produits de qualité » creuse le fossé.
En tête de liste des pratiques dénoncées, l’usage des pesticides bien sûr ! Laurence Guichard (agricultrice et ex-chercheuse à l’Institut National de Recherche en Agronomie) préconisait le bon sens, en soutien à ce premier état des lieux. « La bonne dose au bon moment, et la substitution d’un produit de synthèse par un produit naturel chaque fois que c’est possible », en admettant toutefois qu’il convient de combiner toutes les techniques pour réduire de façon efficiente le recours aux alternatives pharmaceutiques (diversifications des cultures, allongement des rotations, résistance aux maladies…) chaque cas étant spécifique.
En conclusion de ce tour d’horizon pour faire bouger les lignes du système bien installé des phytosanitaires, pierre angulaire du dispositif en vigueur, « seules les innovations qui ne remettent pas en cause la stratégie des acteurs et leur organisation » pourront accompagner l’ambitieux mouvement qui se joue vers une transition.
Un pavé dans la mare
On peut regretter (chez nous en tous cas, quoique d’autres l’ont félicitée), les propos radicaux, voire violents comme certains les ont ressentis, sur le bio qui ne serait que l’affaire de lobbyistes parisiens « bobo », selon la journaliste Géraldine Woessner (elle a quitté Europe 1 en septembre pour rejoindre « Le Point ») qui dénonçait, prompte à « faire le buzz », les discours alarmistes autour du glyphosate ; assurant sur la base d’études scientifiques (dont les sources ne furent pas citées) qu’à ce jour aucun impact sur la santé humaine n’a été prouvé. La qualité de l’environnement et de la santé seraient donc deux indicateurs distincts s’interrogeaient les parties prenantes ?
« La communication : une partie désormais essentielle de notre métier »
Sur ce point, les voix s’élèvent collégialement, tant la connaissance des conditions des métiers fait défaut. Trop souvent, les médias n’évoquent l’agriculture qu’à l’aune du malêtre animal, du non respect de la nature, laissant en coulisse des êtres engagés à perpétuer la qualité d’un terroir qui fait la réputation de la France.
Comment parler positivement des activités agricoles ? Comment mieux intégrer un projet de méthanisation sur son territoire ? Cohabitation agriculteurs et riverains : faut-il repenser les paysages ruraux ?… L’après-midi était consacrée à cinq ateliers au choix permettant d’approfondir la thématique.
Témoignages recueillis au sortir de l’un ou l’autre : il convient d’instaurer le dialogue, d’ouvrir nos portes et d’expliquer… Les uns d’évoquer les enfants qui ont du mal à assumer que leurs parents travaillent la terre et son élevage, taxés « d’antispécistes » ! Et de prolonger : l’Education Nationale (qui relègue aux municipalités la gouvernance de multinationales à la gestion des cantines scolaires) ne devrait-elle prendre à bras le corps ce qui relève, finalement de la pédagogie ?
Les réponses restent en suspens, mais les liens noués à l’occasion de cette journée permettront sans doute d’initier des synergies profitables à l’ensemble de ces représentants d’une économie durable.
Et sur l’île de Ré ?
Gisèle Vergnon, maire de Sainte- Marie (qui a la seule cantine autonome et entièrement bio de l’île), était présente pour défendre nos valeurs. L’élue aimerait voir se développer son modèle de cantine en production locale (l’école propose des menus frais et de saison au meilleur coût) en marge des multinationales de la restauration scolaire pointées sur la qualité nutritionnelle de leur prestation.
Louis Merlin, saunier militant, s’inquiète du cahier des charges en vue de la certification bio à l’étude dans les pays du nord, où l’or blanc extrait des mines et stockages souterrains, impose par la méthode, une requalification du savoir-faire traditionnel.
Jean-Baptiste Lacombe se lance dans la conversion de ses parcelles. « Une démarche à anticiper quand on est maraîcher ». Il faut tout repenser, d’un légume à l’autre. « C’est sans doute plus facile de démarrer à zéro ».
Carole Pardell (administratrice de la coopérative Uniré en charge de la transition durable) fédère les professionnels autour de la qualité des produits.
Les problématiques ont été posées, les sujets discutés… Restent les solutions à trouver. « Pédagogie » reste le mot primordial pour réconcilier défenseurs de la qualité et consommateurs en quête d’authentique.
La Charente-Maritime compte 375 exploitations certifiées en agriculture biologique ou en conversion, représentant 16300 ha engagés en Agriculture biologique.
L’enjeu majeur pour préserver la richesse de notre terroir : favoriser les circuits courts pour limiter le nombre d’intermédiaires entre le producteur et le consommateur. Mangeons local !
« Le 17 dans l’assiette » : Un chef et un invité réunis tous les 17 du mois autour de produits locaux…
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